Le non-recours à l'Aide au paiement d'une complémentaire Santé (ACS) est cité comme la principale faiblesse du dispositif. Une étude se penche sur les facteurs de ce manque d'adhésion.
Les jours de l'Aide à la Complémentaire Santé sont comptés, selon différentes informations qui ont filtré dans la presse. Le Premier Ministre Édouard Philippe devrait annoncer le 13 septembre un Plan pauvreté qui prévoit la fusion de la CMU-C et l'ACS.
En avril 2018, 1,22 million de personnes bénéficient d'un contrat ACS, selon le Fonds CMU. Le nombre de bénéficiaires a progressé de 7,1% sur un an. En revanche, uniquement trois quarts des bénéficiaires utilisent les attestations ACS. Ce taux d'utilisation reste stable autour de 76% et a du mal à décoller. Pire encore, 55% des personnes éligibles à l'ACS ne recourent pas au dispositif.
La complexité pointée du doigt
Pourquoi un tel désintérêt ? Une étude du Credoc nommé « La caractérisation de la population éligible à l'ACS et les motifs de non-recours » de mai 2017 se penche sur les principaux facteurs de non-recours. Il en conclut que les bénéficiaires potentiels ne se sentent pas concernés par le dispositif. Les auteurs de l'étude soutiennent que le refus de l'assistanat, le désintérêt ou la crainte de la stigmatisation n'expliquent pas le non-recours. « Le facteur prédominant procède davantage de la complexité à se reconnaître dans les catégories éligibles. La non identification en tant que destinataire de l’offre est un véritable frein à la recherche d’informations sur les aides », pointe l'étude.
L'ACS a une image plutôt neutre, car elle est quasi inconnue à ce jour. Elle est cependant bien accueillie par les bénéficiaires qui connaissent le dispositif. Celui-ci est perçu comme un « bon plan », « car il révèle une nécessité économique tout en intégrant une dimension valorisée de la débrouille ». La population éligible à l'ACS manifeste un souhait de "sortir de l'invisibilité sociale" et considère l'ACS comme une reconnaissance des difficultés économique qu'elle subit.
Une aide accessoire
L'ACS est en plus une aide spécifique. Les bénéficiaires potentiels se concentrent plutôt sur des démarches « de droit commun », comme la recherche d'activité... Et espèrent recouvrer rapidement leur situation financière. La portabilité de la mutuelle d'entreprise en cas de chômage pendant un an n'incite pas les personnes en perte d'emploi à s'intéresser à l'ACS. En revanche, lorsque les difficultés se prolongent, les personnes se montrent plus réceptives, même si le réflexe d'information n'est pas immédiat et la « disponibilité psychologique est faible ».
La complexité de l'environnement administratif français et le double remboursement par l'assurance maladie obligatoire et complémentaire « accentuent la crainte des personnes en situation précaire à engager des démarches complexes, coûteuses en charge mentale, pour un bénéfice non assuré », affirment les auteurs de l'étude. « Être sûr de son éligibilité et du bénéfice final apparaît dès lors comme un impératif à tout changement », conclut l'étude.
Captifs de la mutuelle d'entreprise
Autre explication avancée, les personnes ne savent pas qu'elles peuvent s'affranchir de la complémentaire santé proposée par leur employeur. Elles ne sont pas au courant qu'il est possible d'obtenir une dispense d'adhésion et sont captives de leur mutuelle. Même lorsqu'elles sont au courant, la réticence au changement est forte, le bénéfice doit être tangible et ils s'interrogent sur la réintégration à la mutuelle d'entreprise lorsqu'ils ne seront plus éligibles à l'ACS.
La communication fait défault
En partant de ce constat, plusieurs pistes sont avancées. La première consiste à fournir "une communication multi-cibles, personnalisée et non stigmatisante". La communication doit être spécifique aux différentes cibles et par exemple mentionner que l'on peut être en CDI, propriétaire ou fonctionnaire et bénéficier de l'ACS. Sur les publics plus instables, l'étude propose d'axer la communication sur le bénéfice concret et les avantages connexes comme la réduction des factures énergétiques ou le tiers payant intégral, et d'insister sur la réduction du coût de la mutuelle et le niveau de couverture. Pour les profils fragiles, en revanche, il est important de passer par des relais sociaux. Le niveau de connaissance des travailleurs sociaux sur l'ACS est encore faible.
Aujourd'hui, pour obtenir une ACS, il faut fournir un certain nombre de justificatifs. Or, les auteurs recommandent de réduire le caractère pro-actif de la démarche. Informer par courrier les bénéficiaires de leurs droits à l'ACS et des économies potentielles ou bien déclencher l'aide sans intervention lorsque les conditions sont réunies, par exemple, permettrait de toucher un plus grand nombre de bénéficiaires potentiels.
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