Complémentaire santé : La guerre de la communication est lancée
Les organismes complémentaires doivent anticiper l’éventuelle arrivée d’une taxe sur les dépenses non effectuées pendant la crise sanitaire. La guerre commerciale se jouera sur le terrain de la communication, selon des experts. L'assureur Alan a tiré le premier.
Comment expliquer aux assurés que l’organisme complémentaire a peu remboursé de soins pendant la crise sanitaire ? Mais qu’il y aura d’ici la fin de l’année des coûts incertains ? Comment valoriser la future contribution du secteur à l’Assurance maladie pour compenser les dépenses non effectuées ?
Les organismes complémentaires auraient économisé entre 2,5 et 3,5 milliards d’euros pendant le confinement, mais personne ne souhaite rendre public ce montant, tellement les autres paramètres de l’équation restent inconnus : l’ampleur du report des soins, des cotisations non encaissées, de la portabilité et de la sinistralité en prévoyance.
En 2020, l’impact sur les cotisations non encaissées pourrait atteindre 50 millions d’euros par trimestre, auquel s’ajouteraient environ 650 millions d’euros sur la portabilité, et 1 milliard d’euros de prestations prévoyance supplémentaires, selon Opusline. Il faudra faire preuve de pédagogie, d'autant plus que « 2020 risque d’être une année avec une moindre sinistralité mais qu'elle est encadrée par deux années à tendance haussière, 2019 et 2021 », indique Alix Pradère, fondatrice d’Opusline.
Aujourd’hui, le coût de la portabilité est calculé de façon mutualisée et intégré dans la cotisation des actifs, à hauteur de 3% du montant de la cotisation. Demain, si le chômage venait à exploser, il pourrait être calculé différemment afin de ne pas imposer de fortes augmentations de cotisation. « Le coût réel de la portabilité pourrait être externalisé de la prime des actifs. Son coût réel pourrait être supporté à la fois par l’entreprise et le salarié sortant », indique Alix Pradère. Cette option pourrait être privilégiée par certains organismes complémentaires dans les prochaines années.
Le gouvernement a demandé aux organismes complémentaires de contribuer aux dépenses exceptionnelles de la crise. Le scénario d’une taxe se profile, même si les négociations sont encore en cours. Les organismes complémentaires souhaitent que la « contribution » soit assimilable à de la sinistralité et qu’elle ne vienne pas alourdir les frais de gestion. « Les organismes complémentaires pourraient être appelés à participer notamment pour alimenter la dotation destinée aux hôpitaux pour compenser leur perte d’activité pendant la crise », signale Alix Pradère.
Besoin de pédagogie
D’autres nouveautés règlementaires comme les nouvelles obligations de communication sur les frais de gestion à partir du 1er septembre, la résiliation infra-annuelle à partir du 1er décembre, la pression des associations de consommateurs sur la lisibilité des garanties placeront les enjeux de communication au cœur des stratégies.
« Le gros risque c’est la façon dont tout cela va être communiqué aux adhérents, c’est un enjeu sectoriel, mais chaque complémentaire doit anticiper dès à présent sa communication. Dans ce contexte de perte de repères, les organismes complémentaires n’ont aucune maîtrise sur les impacts économiques de la crise sur leur activité mais en revanche elles ont la main sur leur communication. Elles ont intérêt à se positionner comme des « acteurs de santé » et pas uniquement comme des « financeurs ». Il faut tester la communication auprès des assurés. Il faut expliquer le rattrapage des dépenses de santé sur des frais visibles comme le dentaire ou l’optique, mais aussi expliquer les effets des reports de soins sur l’état de santé », insiste Alix Pradère.
Alan tire en premier
« La guerre de la communication est une partie importante de la bataille commerciale », selon Alix Pradère. Cette guerre a déjà commencé. La start-up Alan a pris les devants et dans un article de son blog intitulé "It's time to give back", elle s'engage à « verser tout le profit exceptionnel réalisé en 2020 à une fondation » dédiée aux personnels soignants des hôpitaux. Par profit exceptionnel, Alan comprend l’entièreté du résultat au-delà d’une marge brute de 20 %.
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