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N. Gomart : "Notre profession doit être en mouvement sur le véhicule autonome"

jeudi 25 janvier 2018
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Nicolas Gomart est PDG du groupe Matmut. Dans le cadre notre édition spéciale bilan 2017 de l'assurance, il livre son regard sur l'année 2017 en assurance dommages et dévoile ses perspectives pour 2018.

Les assurances dommages constituent un champ vaste mais je souhaite, au moment d’évoquer l’exercice 2017 et les perspectives du secteur, centrer mon propos sur deux sujets : l’assurance automobile et l’assurance habitation, à destination des particuliers. D’une part parce que ce sont deux offres phares du Groupe Matmut, proposées l’une dès la création de l’entreprise en 1961, et l’autre depuis 1968. Aujourd’hui, notre Groupe gère 2,7 millions de contrats d’assurance automobile et assure 2,2 millions de logements, en France. Nous avons ainsi la prétention d’avoir une certaine expertise dans ces domaines et le recul nécessaire pour analyser les évolutions qui impactent ces marchés, particulièrement en matière de sinistralité. D’autre part, je suis convaincu que ces deux secteurs vont connaître d’importantes mutations dans les années à venir, pour des raisons principalement technologiques et consuméristes.

Concernant l’assurance automobile, si le Groupe Matmut se réjouit d’avoir connu en 2017 une reprise de sa production sur un marché toujours plus concurrentiel, il n’en demeure pas moins que notre principal point de vigilance, comme pour l’ensemble de la profession, concerne le coût de la sinistralité. Deux chiffres qui expliquent en partie le paradoxe de la hausse du coût global observé, malgré une baisse de la fréquence : 3,8% d’augmentation du coût moyen des pièces détachées et 3,6% en ce qui concerne la peinture sur carrosserie.

Au-delà de cette inflation, la technologie associée aux pièces évolue elle aussi. Je lis ici et là des propos radicaux sur la diminution à venir de la masse assurable, liée aux nouvelles technologies, à l’arrivée prochaine du véhicule autonome… Mais prenons l’exemple d’un pare-brise connecté. En cas de fort épisode de grêle, il sera bel et bien endommagé… avec donc un coût conséquent pour l’assureur.

De façon plus large et en complément d’une approche désormais moins « automobile » et plus « mobilité globale », je pense que notre profession se doit d’être « en mouvement » sur la question du véhicule autonome. C’est le sens de l’engagement, en 2017, du Groupe Matmut dans l’expérimentation menée dans le cadre du Rouen Normandy Autonomous Lab, une première européenne sur routes ouvertes. Le métier d’assureur est une activité avant tout sociologique. Il épouse les évolutions sociétales et notre rôle est d’accompagner les assurés dans leurs nouveaux usages de consommation du bien automobile. Le véhicule autonome constitue une rupture technologique qui soulève des questions complexes, à plusieurs niveaux : réglementaire, sociologique, à propos de l’acquisition et l’usage du véhicule... Au-delà de son soutien financier au projet Rouen Normandy Autonomous Lab, le Groupe Matmut lui apportera son expertise sur les questions relatives à l’assurance automobile.

Abordons maintenant l’assurance habitation, là encore sous l’angle de la sinistralité, puis sous celui de l’évolution du métier en tant que tel. 2017 a été plus clémente en matière d’événements climatiques, même si désormais il faut s’habituer à cette multitude d’événements isolés – épisodes de grêle, tempêtes… - qui de façon cumulée pèsent significativement sur notre charge de sinistres. J’insisterais en outre particulièrement sur la sécheresse. C’est un phénomène qui prend de l’ampleur et qui par nature est beaucoup plus pernicieux que d’autres risques naturels. En effet, elle ne se voit pas tout de suite, et produit ses effets 18 mois après, ce qui impacte la charge de nos sinistres.

La sinistralité enregistrée en 2017 sur le segment MRH aurait nécessité une hausse des tarifs du Groupe Matmut. Or, nous avons pris la décision de ne pas le faire. D’une part dans une démarche de solidarité vis-à-vis de nos assurés dont certains ont été touchés par les événements climatiques que j’évoquais. D’autre part parce que notre souhait est de développer ce segment. Je suis en effet convaincu que l’assurance habitation va devenir un point central de la relation entre assurés et assureurs, plus encore que l’assurance automobile.

En fait, il me semble qu’il est désormais nécessaire de raisonner en termes « d’écosystème dédié à l’habitat » et non plus simplement de « produit d’assurance habitation ». C’est ainsi que notre Groupe a pensé sa nouvelle offre, lancée en 2017.

Comme pour l’automobile, les évolutions sociétales et technologiques poussent les assureurs à se transformer en permanence. Le consommateur, entre omnicanalité et « self care », et avec la place croissante des objets connectés, de la domotique, de l’intelligence artificielle… « crée » de nouveaux usages, auxquels nous devons répondre, sous peine de voir d’autres acteurs devenir, à la place des assureurs, les interlocuteurs de celles et ceux qui recherchent les meilleurs solutions et services, pour leur protection, leur confort et ceux de leur famille, au domicile.

En conclusion, que ce soit dans le domaine de l’automobile ou de l’habitation, le défi des assureurs est de se réinventer dans le domaine des offres, afin de toujours mieux s’adapter aux changements dans les modes de vie de nos concitoyens. Dans un contexte de forte évolution sociologique et compte tenu de l’arrivée de nouveaux acteurs sur leurs marchés, il est en outre nécessaire pour eux de garder une relation directe avec leurs clients particuliers.

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