Le travail en plein bouleversement : un défi collectif
A l’approche des épreuves du baccalauréat, me vient une idée en tête… Il serait intéressant de faire plancher les élèves, en philosophie, sur la place et le sens du travail dans nos vies. A l’heure où le monde du travail est en pleine transformation et où chaque génération a, sur ce sujet, une définition et des interrogations qui lui sont propres, les copies de ces bacheliers post-Covid seraient sûrement dignes d’être conservées sur le plan sociologique !
Elles intéresseraient aussi beaucoup nos adhérents au CTIP, les institutions de prévoyance qui couvrent en santé et prévoyance 13 millions de salariés à travers 2 millions d’entreprises. En raison de leur activité dédiée au contrat collectif et de leur gouvernance paritaire, elles se trouvent en prise directe avec les réalités économiques et les préoccupations des salariés et des entreprises.Ce thème du travail en plein bouleversement les touche directement. Aussi, au CTIP, avons-nous récemment organisé un événement dédié à ce sujet. Nous avons notamment fait intervenir trois experts de ces mutations. Je livre ici, en quelques flashs, les idées qu’ils ont partagées avec nous.
Aujourd’hui, 17 % des Français considèrent la place du travail comme « très importante », contre 61 % il y a une vingtaine d’années, nous a appris Romain Bendavid, Directeur de l’Expertise Corporate & Work Expérience à l’Ifop. « Il ne s’agit pas d’un rejet du travail mais d’une prise de distance avec l’emploi », a -t-il souligné. « Aujourd’hui, on veut un travail qui soit utile pour soi et pour la société. La crise sanitaire a mis en avant les premières et deuxièmes lignes, les métiers réellement utiles au quotidien. Les Français veulent faire bouger les lignes de l’entreprise que ce soit sur l’inclusion, la démocratie sociale, le made in France ou encore l’utilité sociale de l’entreprise ».
De son côté, Laetitia Vitaud, auteure et conférencière sur le futur du travail et de la consommation, a mis l’accent sur le fait que le salariat, même s’il restait dominant, traversait lui aussi de profondes transformations. « On assiste à une fragmentation contractuelle avec une progression de la multi-activité et du portage salarial, une abolition de la frontière entre salariés et indépendants, estime-t-elle. Plus profondément, les emplois de production diminuent et laissent place à des emplois dans "l’entretien" ou le "care". Or, l’imaginaire collectif reste marqué par la production et manque de repère pour valoriser ces nouveaux métiers. »
Enfin, Hervé Chapron, membre du CRAPS et ancien Directeur Général Adjoint de Pôle emploi, est venu tirer la sonnette d’alarme. « Face aux mutations du travail et à la multiplication des statuts, prenons garde à la montée de l’inégalité des chances, a-t-il déclaré. Le dialogue social de branche et d’entreprise doit se saisir de ce sujet », notamment pour apporter des réponses aux populations les plus fragiles.
C’est ce que font les institutions de prévoyance : elles ont par exemple identifié depuis longtemps le défi sociétal posé par le nombre grandissant des salariés aidants ou encore celui du retour à l’emploi de salariés qui ont traversé une longue maladie, et elles proposent en retour des dispositifs adaptés. Nul doute que, dans ce contexte d’un monde du travail en mutation accélérée, leur expertise va les aider à développer d’autres solutions au bénéfice des entreprises et des salariés.
Par Marie-Laure Dreyfuss, Déléguée générale du CTIPÀ voir aussi
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