Climat : Les assureurs face au défi des politiques de transition

mercredi 22 mai 2024
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Le siège de l'ACPR à Paris.

L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) a publié son deuxième stress test climatique exclusivement dédié aux assureurs. Selon les conclusions, des efforts restent à faire pour lutter contre les conséquences anticipées des risques extrêmes sur leur sinistralité et leurs actifs financiers.

Chose promise, chose due. L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) a publié ce 22 mai les résultats de son deuxième stress test climatique exclusivement dédié aux assureurs. L’objectif était d’évaluer la capacité de résistance des professionnels du secteur sur les années à venir à travers trois scénarios, un de court terme, et deux de long terme.

Mené entre 2022 et 2024, ce test fait suite à un exercice pilote mené en 2020 qui avait réuni 15 groupes d’assurance, représentant environ 75% du total du bilan des assureurs. Cette fois, 22 entités ont participé à sa réalisation représentant 90% du total de bilan des assureurs français.

Dans le scénario de court terme à l’horizon 2027, le superviseur a testé les effets de deux années marquées par deux épisodes de sécheresse et des vagues de chaleur intenses en 2023 et 2024. Début 2025, l’ACPR a mis en scène une « tempête convective sévère localisée causant des précipitations intenses et une rupture de barrage hydraulique en remblai », a décrit Laurent Clerc, directeur d’étude et d’analyse des risques de l’ACPR lors d’une visioconférence.

Des politiques de transition incontournables

« Cette suite d’épisodes extrêmes renforce la conviction des marchés que la mise en œuvre de politiques de transition devient inéluctable », conclut l’ACPR. Avant d’ajouter que « cette prise de conscience se traduit par un ajustement brutal des marchés et des pertes de valeurs des actifs financiers, en particulier les actifs "bruns" et l’immobilier, dans une logique d’actifs échoués (stranded assets). Ce choc financier intègre en outre des mécanismes de contagion, conformes à ceux observés lors des épisodes précédents de tensions financières, affectant l’intégralité du portefeuille des assureurs jusqu’en 2027. L’effet combiné de ces chocs physiques et de transition impacte négativement la solvabilité des organismes ».

Sous ce scénario, le ratio SCR des assureurs passerait ainsi en moyenne de 230% à fin 2022 à 170% fin 2027. Mais pour Laurent Clerc, « le scénario de court terme est relativement absorbable par les assureurs français qui disposent de réserves suffisantes pour absorber les chocs ».

Du côté des scénarios long terme, le gendarme de l’assurance a imaginé un schéma avec une transition climatique ordonnée, c’est-à-dire en cohérence avec les accords de Paris, et un autre avec une transition désordonnée, soit retardée. Deux hypothèses qui ont pour cible un réchauffement contenu en dessous de 2°C à l’horizon 2050. « L’analyse des résultats montre une aggravation de 105% de la sinistralité totale dans le scénario adverse de transition désordonnée à l’horizon 2050 par rapport à l’année 2022, et une sur- sinistralité de 42 % par rapport au scénario de référence », indique le rapport de l’ACPR.

Un recours limité aux actions de gestion

Les résultats ont également souligné de fortes disparités géographiques en fonction des différents types d’aléas (sécheresse, submersion et inondation).

« Dans le cadre de cet exercice, les assureurs ont cependant eu un recours assez limité à des actions de gestion (telles que par exemple des réallocations géographiques voire l’arrêt des politiques dans les zones les plus exposées, ou un changement de structure de leur bilan) pour atténuer les impacts des scénarios adverses », déplore par ailleurs le superviseur. Il s’agirait alors pour Nathalie Aufauvre, secrétaire générale de l’ACPR de « réfléchir aux stratégies à mener pour vraiment prendre en compte la transition climatique et l’intégrer dans la feuille de route des entreprises ».

Des efforts attendus

Les assureurs ont encore du pain sur la planche. « Ils doivent donc poursuivre leurs efforts non seulement pour respecter les engagements pris en 2019 en faveur de la lutte contre le changement climatique et l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050, mais également pour engager des mesures de gestion de leurs actifs et passifs permettant de faire face aux conséquences anticipées des risques extrêmes – engendrés par le changement climatique, ndlr – sur leur sinistralité et sur leurs actifs financiers », a conclu l’ACPR.

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