Élections législatives : Ces patrons de l’assurance qui prennent position
Quelques patrons de l’assurance ont pris des positions politiques dans le cadre des élections législatives. Faut-il sortir de sa réserve ?
Le deuxième tour des élections législatives du 7 juillet ouvrira une séquence parlementaire qui s’annonce pleine d’incertitudes.
Faut-il prendre position, en tant qu’organisme assureur contre l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir ? La Mutualité Française, comme elle l’avait fait avant le deuxième tour de l’élection présidentielle de 2022, n’a pas dérogé à la tradition. La FNMF a appelé à la mobilisation avant le premier tour des élections législatives. Pendant l'entre-deux tours, le bureau de la fédération mutualiste a mis moins de 40 minutes pour rédiger une déclaration qui a mis tout le monde d’accord. La FNMF appelle à nouveau à faire barrage à l’extrême droite.
Rester dans la réserve
Les autres familles d’organismes complémentaires, en revanche, se sont abstenues de prendre position. Marie-Laure Dreyfuss, déléguée générale du Centre technique des institutions de prévoyance (CTIP), a botté en touche lorsqu’elle a été interrogée sur le sujet en conférence de presse. Même son de cloche pour Florence Lustman, présidente de France Assureurs. Elle est restée mutique sur le sujet face aux journalistes réunis par la fédération assurantielle lors de son traditionnel cocktail d’été.
La prudence est de mise, encore plus pendant ce scrutin, car le risque de voir arriver un représentant du Rassemblement national à Matignon est plus élevé que par le passé. « La fédération mutualiste est constituée d’élus issus de la société civile. France Assureurs, en revanche, est une fédération professionnelle qui réunit des dirigeants avec une fonction opérationnelle », indique un observateur du secteur. « C’est délicat pour un employeur de prendre une position politique, car avec 33% de votes pour le Rassemblement National, il y a forcément des salariés de l’entreprise qui ont voté pour ce parti », commente un autre dirigeant du secteur.
Parmi les assurés, il y a également des électeurs de tous bords. Cela pousse les patrons de l’assurance à la réserve. Prudent, Thomas Buberl, CEO d’Axa, n’a pas souhaité donner de consigne particulière, face aux journalistes de l’Anja, au lendemain du premier tour des élections.
Appeler à faire barrage au RN
Les prises de position politiques de patrons sont dès lors rarissimes. Adrien Couret, directeur général d’Aéma Groupe, a été l'un des premiers patrons à manifester son opposition au parti de Jordan Bardella. Le message publié il y a trois semaines a suscité beaucoup de réactions. Dans les commentaires au post LinkedIn, certains ont salué « le courage » du dirigeant mutualiste. D’autres ont en revanche critiqué « une prise de position politique sur un réseau professionnel ».
Après cette réaction à chaud, Adrien Couret s’est abstenu de partager d'autres messages politiques. Aucune référence au RN non plus lors de son passage sur Radio Classique pendant l’entre-deux tours le 25 juin.
Pascal Demurger, directeur général du groupe Maif et co-président d’Impact France, a également manifesté son désaccord avec la politique du RN dans La Tribune. « Le danger le plus immédiat est l'arrivée possible du RN au pouvoir. Son programme économique est en effet très inquiétant et pourrait exposer la France au chaos », a déclaré le patron de La Maif le 28 juin.
Contre tout type d'extrême
Dans le secteur de la gestion d’actifs, Philippe Zaouati, directeur général de Mirova, a démissionné du conseil d’administration d’Impact France suite à l’appel du mouvement dédié à l’économie sociale et solidaire à voter contre le rassemblement national. Il reprochait à la direction de prendre position contre le RN, sans condamner en même temps La France Insoumise, comme l’a fait le Medef.
En off, un autre acteur de l’économie sociale et solidaire désapprouve cette prise de position. « Je ne comprends pas pourquoi Impact France appelle à faire barrage à l’extrême droite et pas à l’extrême gauche », pointe le dirigeant mutualiste.
Message implicite
De son côté, Matthias Savignac, président de la MGEN, a été plus nuancé et moins explicite dans un post LinkedIn le 3 juillet. « Nous sommes 4 millions d’adhérents, 10.000 salariés et près de 3.000 militants. Parce que nous respectons la démocratie et la liberté de vote de chaque citoyenne et citoyen, il ne nous viendrait pas à l’esprit de donner quelque leçon que ce soit », écrit de le président mutualiste, avant de rappeler tous les engagements de la MGEN pour « la liberté, l’égalité et la fraternité ».
D’autres dirigeants comme Eric Maumy, président et CEO du groupe April, se positionnent à la fois contre l’extrême droite et l'extrême gauche.
Même message de Pierre-Alain de Malleray, patron du courtier Santiane. Dans une tribune collective publiée aux Échos, l’énarque appelle à « défendre le modèle français face au risque d’un prochain gouvernement issu d’un parti extrémiste ». En préambule, les signataires indiquent qu’ils s’expriment « à titre personnel », sans engager leurs entreprises.
Alors, faut-il prendre position ou s’abstenir quand on dirige une entreprise d'assurance ? Les experts en communication recommandent aux grandes entreprises de s'abstenir de toute position partisane ou au moins de nuancer les propos, car une partie des électeurs/clients ne va pas forcément partager la vision politique du dirigeant.
Face à la situation politique inédite que traverse le pays, ces prises de position sont donc « courageuses ». Les patrons qui osent porter sur la place publique leurs convictions politiques ne sont pas à l’abri de « quelques résiliations » de sociétaires qui, manifestement, ne partagent pas les mêmes valeurs.
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