Emeutes : Dans une situation délicate, Smacl lance son redressement
Le bilan des émeutes de juin et juillet est particulièrement lourd pour Smacl Assurances. La mutuelle lance des premières mesures « pour passer l'exercice 2023 ».
Au lendemain des émeutes survenues entre les 27 juin et 3 juillet, Patrick Blanchard, directeur général de Smacl ne masquait pas son inquiétude sur l'impact des sinistres pour la mutuelle d'assurance. A l'époque, le dirigeant évoquait une facture de 100M d'euros. En ce début de mois de septembre, le bilan se précise un peu plus pour la mutuelle spécialisée dans les collectivités locales.
65M d'euros de sinistre
« Sur les 536 communes touchées par ces évènements, 75% sont sociétaires de Smacl, indique Patrick Blanchard. A ce jour nous avons reçu 329 déclarations de sinistres, dont 86% ont fait l'objet d'un premier rapport d'expertise. Bien évidemment, il reste toujours possible pour les sociétaires qui ne l'ont pas encore fait de déclarer leur sinistre. Nous ne fermons pas les délais ». À cela s'ajoutent 276 déclarations en automobile pour un montant de l'ordre d'1,5M d'euros.
Le bilan financier des émeutes pour Smacl a été revu à la baisse. Il s'élève désormais à 65M d'euros bruts de réassurance et nets de franchise. Soit un coût moyen de 210.000 euros par commune, avec toutefois de fortes disparités. La ville de La Verrière, qui compte un peu plus de 6.000 habitants, concentre 7M d'euros de sinistres. Brest suit avec 3M d'euros de sinistres. Preuve que ce ne sont pas nécessairement les plus grandes agglomérations qui furent les plus impactées.
Reste que malgré une facture révisée par rapport aux premières estimations, la situation de la Smacl, déjà recapitalisée à hauteur de 140M d'euros en 2022, reste précaire. « Cette charge de sinistre vient s'ajouter aux 20M d'euros de déficit que nous avions anticipés pour 2023 », relève Patrick Blanchard. Surtout, elle fait plonger le ratio de solvabilité de Smacl sous les 100%. « C'est pourquoi, nous travaillons avec l'ACPR pour mettre en place des mesures visant à revenir à notre seuil d'appétence de 130% », poursuit e dirigeant.
Pas de menace sur l'emploi
Mercredi, les conseils d'administration de Smacl Assurances et Maif se réunissaient pour valider le projet de redressement. Pour parer au plus urgent, Smacl Assurances va émettre une dette subordonnée aux conditions de marché de 56M d'euros. Elle sera souscrite par sa maison-mère, à savoir le groupe Maif. « Cela nous ramènera à 110% », précise Patrick Blanchard. Plusieurs mesures complémentaires sont également sur la table. En premier lieu, une augmentation de capital. Elle devrait se situer entre 45M d'euros et 65M d'euros. Soit le montant de la facture des émeutes pour Smacl. Autrement dit, Maif remet au pot pour recapitaliser sa filiale.
Si d'aventure ces mesures ne suffisaient pas, une nouvelle émission de dettes subordonnées pourrait intervenir plus tard. La direction de Smacl affirme par ailleurs que l'emploi n'est pas menacé au sein de la mutuelle. « La pérennité de l'emploi fait partie de notre ADN », affirme Patrick Blanchard. La retour à la rentabilité pour Smacl Assurances s'annonce dès lors plus long que prévu. La direction visait 2024, mais au regard de la situation, cette perspective s'éloigne. En revanche, l'objectif d'y parvenir dans le cadre du plan stratégique qui prendra fin en 2026 est maintenu.
Et demain ?
Smacl s'engage par ailleurs dans un recours contre l'Etat. Une circulaire ministérielle du 7 juillet dernier ouvrait la voie à la mise en cause de l'Etat pour les dégâts survenus lors de la première nuit d'échauffourées. Smacl compte bien faire jouer la responsabilité de l'Etat, même si cette première nuit ne concentre « que » 10% du coût des sinistres. Elle devrait par ailleurs s'autoriser à rechercher cette même responsabilité pour les jours qui ont suivi.
Enfin, sur le plus long terme, Smacl s'attend par ailleurs à un durcissement des conditions de réassurance. Cela impliquera de revoir les contrats des collectivités locales. De travailler sur les niveau de franchise et les limites des garanties. « Nous n'aurons pas le choix, juge Patrick Blanchard. En l'état actuel du marché, les collectivités locales vont devoir en prendre plus à leur charge ».
C'est pourquoi le dirigeant appelle de ses vœux à revoir la couverture des collectivités territoriales. Le modèle public/privé mis en place dans le cadre de la réforme de l'assurance agricole fait partie des pistes sur la table des discussions avec le gouvernement.
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