Eric Chenut : "Il faut allouer plus de moyens pour refonder le système de santé"

vendredi 2 septembre 2022
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Les représentants des organismes complémentaires seront reçus le 19 septembre par Bruno Le Maire pour aborder les difficultés de pouvoir d’achat des Français. A la veille du Congrès de la Mutualité, Eric Chenut, président de la FNMF, demande une réforme profonde du système de santé.

A la différence d’autres fédérations mutualistes comme la Fnim, la Mutualité Française se montre réservée sur l’évolution des tarifs pour 2023. Eric Chenut, son président, affirme que cela dépendra de l’ondam et des éventuels transferts de charges entre l’assurance maladie obligatoire et les complémentaires.

Cela dépendra également des éventuelles pressions de Bercy. Les représentants des organismes complémentaires sont convoqués le 19 septembre prochain par Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique. A l’ordre du jour, les efforts que les acteurs de l’assurance peuvent faire pour améliorer le pouvoir d’achat des Français.

En attendant Macron

Alors que le gouvernement lance le Conseil national de la refondation (CNR) le 8 septembre prochain, Eric Chenut espère que le président de la République sera présent au Congrès de la Mutualité qui aura lieu à Marseille du 7 au 9 septembre. « J’ai l’assurance de l’Élysée qu’il y aura une expression importante de haut niveau, mais je ne sais pas encore sous quelle forme », annonce Éric Chenut.

L’assemblée générale de la FNMF se réunit le 6 septembre pour voter la raison d’être du mouvement mutualiste et le rapprochement avec Mutualité Fonction Publique.

Reçu par l’Association de journalistes de l’information sociale (AJIS), le président de la FNMF a énuméré les enjeux auxquels fait face le système de santé et notamment l’attractivité des métiers du soin. Il a insisté sur « la nécessité de refonder le système de santé » et d’y « allouer plus de recettes » afin de pouvoir faire face aux enjeux de santé : extension de la permanence des soins, télémédecine, vieillissement de la population…

Dans le cadre du futur Conseil national de la refondation, Eric Chenut a déclaré : « Nous avons besoin de requestionner le sens et le périmètre du système de santé. Il convient de déterminer un cadre juste de la répartition, l’articulation entre cotisations sociales et fiscales, entre revenus et patrimoine et questionner le partage de la valeur entre capital et travail ». Face à l’augmentation des besoins de protection sociale, plusieurs choix sont sur table : « On ne peut pas étendre le périmètre des protections, par exemple dans le domaine de la dépendance, en créant une cinquième branche dotée de 2,5Mds d’euros alors qu’il faudrait 10Mds d’euros, selon le rapport Libault ».

"L'assiette n'est pas juste"

Concernant le pouvoir d’achat, l’éventualité d’une augmentation des taxes des organismes complémentaires fait réagir le président de la FNMF. « Notre secteur a vu niveau de taxation multiplié par 8 en 20 ans. L’assiette, à savoir la cotisation de la complémentaire santé, n’est pas juste, et induit une ''déconstruction'' des solidarités générationnelles. Un retraité a une cotisation plus importante et donc il paie plus de taxes », dénonce Eric Chenut.

Numérique en santé

Parmi les pistes pour redonner des moyens au système de santé, Eric Chenut n’exclut pas le transfert de charges entre l’AMO et l’AMC, comme cela a été fait dans le passé. Il demande également aux pouvoirs publics un cadre cohérent, notamment en matière de santé numérique : « Si on veut prendre le virage préventif, nous avons besoin de gérer le risque, d’aller vers les assurés sociaux pour leur apporter plus de dépistage, de vaccination, des dispositifs de prévention. Il faut que les mutuelles puissent utiliser le numérique en santé. Or, la réglementation est trop restrictive ».

Eric Chenut a également demandé à l’État « un choc de simplification » réglementaire afin de « sortir de la régulation comptable du système de santé ». Par exemple, il a cité la réforme sur la résiliation infra-annuelle en santé comme un mauvais exemple de régulation car elle mobilise beaucoup de ressources alors qu'elle ne représente qu'entre 1 et 4% des résiliations en santé.

Pas de baisse des PLV en audioprothèse

A propos du rapport sur la Cour des Comptes sur le 100% santé, Eric Chenut ne s’est pas montré favorable à baisser les prix limites de vente sur les aides auditives de classe 2. « Aller tout de suite vers la régulation comptable ne nous semble pas la solution la plus pertinente. Nous pensons que le 100% santé est une bonne réforme parce qu’elle a permis de réduire le renoncement aux soins, même si on pourrait faire mieux sur la montée en charge. La mobilisation des professionnels n’est pas la même en optique, dentaire ou audioprothèse. Les audioprothésistes jouent le jeu, il est donc pertinent de continuer à travailler avec eux. Sur le champ de l’optique, nous ne sommes pas au rendez-vous. Par ailleurs, le volet prévention du 100% santé n’est pas activé. Nous attendons de la puissance publique qu’elle soit plus proactive envers les professionnels qui, sous le couvert d’un conseil dévoyé, privent une partie des assurés sociaux de se soigner mieux à moindre coût », déclare Eric Chenut.

Extension du périmètre du 100% santé

Le président des mutuelles a également commenté qu’en dentaire, la majorité des bénéficiaires du 100% santé, sont des personnes qui étaient déjà appareillées. « Le nombre de nouveaux patients équipés d'une prothèse n’est pas très élevé. Nous avons donc du travail pour aller chercher le public qui en a besoin et lui faire connaître la réforme », poursuit le président de la FNMF.

A propos du projet d’extension du périmètre du 100% santé à l’orthodontie, Eric Chenut, comme la Cour des Comptes, demande de mener des études d’impact sur le coût de cette mesure. « Assumons collectivement qu’il va falloir répartir ce coût, cela ne se fera pas sans impact budgétaire », notamment pour les contrats d’entrée de gamme.

Parmi les autres combats de la Mutualité Française, figure la qualification des actions de prévention et des réseaux de soins comme frais de gestion. « Cela devrait relever des prestations en nature », réclame Eric Chenut.

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