Logo du partenaire
En partenariat avec FM
Partager

Farid Chedid : "Ascoma doit maintenant s’attaquer à l’Afrique anglophone et lusophone"

mercredi 12 janvier 2022
Image de Farid Chedid : "Ascoma doit maintenant s’attaquer à l’Afrique anglophone et lusophone"

INTERVIEW - Farid Chedid, PDG de Chedid Capital, revient pour News Assurances Pro sur l’acquisition d’Ascoma et ses ambitions en Afrique. Le dirigeant fait également le point sur les projets de son groupe et ses perspectives de développement dans le reste du monde.

Pourquoi le groupe Chedid Capital a-t-il jeté son dévolu sur l’Afrique avec l’acquisition d’Ascoma ?

L’Afrique est une zone extrêmement enrichissante, avec des spécificités propres à chaque pays. Malgré certaines difficultés économiques ou politiques, nous sommes très optimistes sur le potentiel de développement de ce continent que nous aimons. Ce qui est également très intéressant, c’est que l’Afrique est organisée par zones régionales et géographiques, comme la zone CIMA et ses 13 pays. C’est un avantage énorme, notamment en terme de réglementation ou d’union monétaire. Enfin, la population y est très jeune, près de 60% de moins de 15 ans en moyenne. Les perspectives de croissance y sont donc énormes et le rachat d’Ascoma permet ainsi à Chedid Capital de préparer l’avenir à un horizon de 10/15 ans.

Justement, au sortir de l’année 2021, quel bilan tirez-vous de cette opération ?

L’exercice 2021 s’est très bien déroulé pour Ascoma qui couvre aujourd’hui, avec ses 23 implantations, quasiment toute l’Afrique francophone, plus le Ghana. Cette diversification géographique permet de réduire la volatilité liée à certains pays encore très dépendants du prix du baril, de l’industrialisation, des matières premières ou des métaux rares…

Pour autant, nous estimons que le réseau Ascoma n’est pas complet. Pour être un réseau panafricain fort, nous devons maintenant nous attaquer à l’Afrique anglophone et lusophone. Notre prochaine étape est de savoir comment nous implanter dans des pays comme le Nigeria par exemple.

Comment comptez-vous vous étendre dans ces nouvelles zones ?

Les acquisitions ou les implantations sont à la fois faciles et difficiles suivant les marchés et les opportunités. Le groupe Chedid Capital s’est intéressé au marché africain dès 2014, sans pour autant réussir à concrétiser le rachat de certaines cibles, jusqu’à l’acquisition d’Ascoma. Nous avons une approche opportuniste - au sens opérationnel du terme – comme le montre la création de notre start-up au Qatar ou notre dernière acquisition aux Émirats Arabes Unis. Dès lors, si nous identifions des opérations intéressantes en Afrique, nous ferons des acquisitions, sinon nous resterons sur de la croissance organique ou des activités établies en « greenfield » sans problème.

Quel type de clientèle ciblez-vous sur le continent africain ?

Nos premières cibles sont les grands groupes internationaux établis en Afrique et les grands groupes panafricains ou locaux implantés dans chaque pays du continent. Nous n’avons pas pour objectif de faire de l’assurance de détail, sauf si nous trouvons des solutions intéressantes pour pouvoir la distribuer.

Sur ce point, nous réfléchissons à des projets de distribution digitale de nos solutions - notamment via la signature électronique - en fonction du pouvoir d’achat et de réglementation de certains pays dans lesquels nous sommes présents.

Comment y choisissez-vous vos partenaires porteurs de risques ?

Nous travaillons avec trois catégories d’acteurs. D’abord, nos principaux assureurs comme les groupes panafricains à l'image de Sanlam, Activa ou Sunu ou autres. Nous travaillons ensuite avec des groupes internationaux comme Axa ou Allianz, puis avec des porteurs de risques locaux.

Nous sommes extrêmement minutieux quant au choix de nos compagnies partenaires. Au-delà de leur capacité financière à payer les sinistres, nous voulons surtout qu’elles aient la volonté de payer ces sinistres. Nous voulons des assureurs qui s’engagent et qui ne tergiversent pas au moment de l’indemnisation.

Comment vous situez-vous par rapport à vos concurrents sur le continent ?

Nous sommes le premier réseau panafricain, non pas seulement par le nombre de pays dans lequel nous sommes implantés, mais surtout par le nombre de nos filiales intégrées. Certains de nos concurrents ne sont qu’actionnaires minoritaires et sans contrôle des courtiers installés dans les pays qu’ils revendiquent.

De plus, nous avons une force de management de près de 700 personnes présentes sur le continent pour nos clients. Certains de nos concurrents ont le mérite d’avoir créé rapidement un réseau, mais ils ne sont pas en mesure aujourd’hui de se comparer à nous.

Je rappelle que nous sommes également un relai important sur le continent pour de grands courtiers internationaux avec qui nous avons de très bonnes relations, parfois historiques, comme avec Marsh ou Aon, sans que nous ne soyons dépendants de ces apporteurs d’affaires.

Que pensez-vous du durcissement de la règlementation sur la réassurance en zone CIMA ces dernières années ?

L’évolution de la réglementation en zone CIMA aide au développement des réassureurs régionaux, ce qui est une bonne chose car il y a d’excellents opérateurs africains. Nous souhaitons épauler ces réassureurs, mais également les assureurs.

Le rachat d’Ascoma a d’ailleurs permis d’apporter à Chedid Capital un volume d’affaires substantiel en courtage d’assurance, qui pèse aujourd’hui près de 55% de l’activité, contre 45% pour le courtage de réassurance, activité historique qui a permis de faire connaître le groupe.

Y a-t-il des segments sur lesquels vous souhaitez vous développer ?

Nous sommes aujourd’hui présents sur toutes les branches d’activités dommages possibles (transports, construction, énergies offshore, mines, etc) sur le continent. Nous souhaitons plutôt renforcer nos expertises sur ces secteurs et nous faisons les investissements en ce sens. Pour mieux former nos équipes, nous avons pour projet de lancer prochainement un institut pour la gestion des risques ainsi qu’une académie de formation afin d’élever au plus haut notre niveau d’expertise. Concernant la santé collective, nous avons aujourd’hui un savoir-faire sans équivalent sur le continent avec une portefeuille de 600.000 assurés et plusieurs milliers de prestataires.

Quels sont aujourd’hui les autres régions du monde où souhaite s’implanter Chedid Capital ?

Nous sommes déjà très présents au Moyen-Orient, en Asie du Sud, dans l’Est de la Méditerranée et en Afrique du Nord, notamment en courtage de réassurance. Nous regarderons ainsi les opportunités en dehors de ces zones, plutôt sur les marchés en croissance qui ne sont pas encore consolidés.

Concernant le Maghreb, nous avons par exemple des activités sur le marché marocain avec un bureau Chedid Re à Casablanca et de très bonnes relations avec les acteurs locaux. Les marchés tunisiens et algériens sont aussi très demandeurs en courtage de réassurance et Ascoma avait historiquement des partenariats avec certains acteurs locaux. Nous y consolidons donc nos relations, sans pour autant avoir la volonté d’y faire des acquisitions.

Nous avons également regardé de très près le marché turc ces dernières années. La zone y connait un développement économique très fort et un secteur de l’assurance puissant. Toutefois, comme nous sommes un groupe étranger, chaque acquisition en livre turque doit être convertie ensuite en dollars, monnaie en permanence dévaluée. Sans oublier qu’en pareille situation, la valeur des actifs baisse et par conséquent les sommes assurées aussi avec des moindres commissions pour les acteurs du marché. Tant que la situation monétaire ne s’améliorera pas, ce pays restera compliqué.

Chedid Capital pourrait-il faire entrer un fonds d’investissement à son tour de table à l’avenir ?

Nous sommes ouverts à l’entrée d’un fonds, mais c’est une question de timing. Nous avons financé seuls l’acquisition d’Ascoma et nous avons la taille suffisante pour assurer notre développement pour les prochaines années. Même si nous avons été approchés ces derniers mois par des acteurs qui souhaitaient co-investir, aucune structure n’a manifesté sa volonté d’entrer au capital du groupe.

Nous avons eu un fonds d’investissement du Moyen-Orient parmi nos actionnaires entre 2008 et 2015 et j’en garde un très bon souvenir, mais actuellement, je ne suis pas pressé. Chedid Capital n’est pas un simple investisseur : quand nous rachetons un acteur, nous aimons pouvoir décider.

Contenus suggérés