PLFSS 2024 : Rejet du texte en commission, et après ?
Vendredi 20 octobre, la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a rejeté le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024. La rapporteure Stéphanie Rist ne cache pas sa déception. Interrogée sur les pistes d'économie, la députée se dit prête à revoir le financement de la prévention avec les complémentaires.
Invitée par l’Association de journalistes de l’information sociale (AJIS), Stéphanie Rist, rapporteure générale du projet de loi, déclare : « Je suis la première rapporteure à ne pas avoir un PLFSS adoptée en commission. Ce n’est pas une fierté, évidemment et c’est dommage car le travail en commission a été assez constructif avec des débats intéressants et des amendements adoptés sur le texte. En général, quand il y a des amendements de l’opposition adoptés, les oppositions s’abstiennent sur le texte pour permettre de reprendre les amendements au nom de la commission en séance, commente la députée du Loiret. Je regrette cette situation caricaturale qui a été du fait d’une politique politicienne ».
Avec ce rejet inédit, les membres de la commission ont souhaité envoyer un signal d'opposition fort. Ce signal, Stéphanie Rist l’interprète comme une volonté des oppositions, « malgré des débats approfondis et malgré des amendements adoptés, d’aller plus vite vers le 49.3. Je le regrette aussi parce qu’en tant que rapporteure, j’ai envie qu’on ait un débat en séance ».
Le risque d'une motion de rejet
Que va-t-il se passer maintenant ? La version initiale du texte sera maintenant discutée en séance publique à l’hémicycle à compter de mardi 24 octobre à 17h. Le gouvernement tout comme les députés de l’opposition vont devoir déposer à nouveau leurs amendements.
Stéphanie Rist s’est engagée à soutenir en séance publique quelques amendements de l'opposition sur lesquels elle avait donné un avis favorable en commission. Il s’agit des amendements du groupe socialiste sur le renforcement de la lutte contre la fraude, des amendements de précision portés par les écologistes sur la gratuité des préservatifs et des amendements sur les produits pharmaceutiques dérivés du plasma portés par LR. La députée va également soutenir l'amendement qui introduit une prise en charge forfaitaire de la dialyse et la radiothérapie.
Le débat à l’Assemblée risque d’être écourté par une motion de rejet, qui pourrait être votée par LR, selon les informations de Stéphanie Rist. Le projet de loi partirait alors dans sa version initiale au Sénat pour être examiné en première lecture.
Forte opposition sur l'ondam
Les projections budgétaires du texte ont rassemblé toutes les oppositions. L’ondam de 3,2% pour l’année 2024 a été vivement critiqué par les députés de tous bords ainsi que par l'Unocam. « C’est le premier projet de budget après la crise sanitaire qui s’oriente vers une maîtrise des dépenses de santé », déclare Stéphanie Rist.
Après ce désaveu, Stéphanie Rist anticipe des discussions difficiles dans les prochaines années. La députée de la majorité souhaite « engager des discussions dès janvier prochain sur le prochain PLFSS ». Elle évoque « notre maîtrise de notre déficit et de notre dette qui risquent d’entraîner des projets de budget plus difficiles encore dans les années qui viennent. Nous devons avoir une discussion pour aller chercher des économies et des dépenses qui ne sont pas efficaces. On voit bien que dans la loi de programmation des finances publiques, on retourne à des ondam assez bas. Nous avons un débat de société à avoir sur comment on maintient notre protection sociale dans la durée. Juste sur l’ondam, on a augmenté de 54 milliards le budget entre 2019 et aujourd’hui, sur un budget de 254Mds d’euros. Si on regarde la trajectoire de la Sécurité sociale à horizon 2030 ou 2032, se pose la question du financement ».
Parmi les pistes d’économie à explorer dans les prochaines années, Stéphanie Rist souhaite avoir un débat sur les restes à charge ou encore sur la prévention. La députée met sur la table l’idée d’exclure les dépenses de prévention du champ de l’Ondam et de travailler davantage avec les organismes complémentaires dans ce domaine.
Remettre à plat le financement de la prévention
« Je crois qu’il y a un débat à ouvrir sur la prévention. Sur ce PLFSS, les trois mesures de prévention (les rendez-vous de prévention aux âges clés de la vie, la distribution de préservatifs pour les jeunes ainsi que la vaccination contre le papillomavirus, représentent 150M d’euros de dépenses. Nous avons intérêt à sortir le financement de la prévention de l’ondam, soutient la députée devant les journalistes de l’Ajis. Beaucoup de complémentaires font beaucoup de travail en matière de prévention dont souvent des mesures répétitives. Pour la même cible, on va avoir trois actions de prévention par trois acteurs différents. Nous aurions intérêt à mettre à plat le sujet de la prévention, financièrement et notamment sur la discussion avec les complémentaires », précise-t-elle.
La députée a également commenté les transferts de charges sur les soins dentaires de l’assurance maladie obligatoire vers les complémentaires. « Ces transferts de charges sur les soins dentaires, qui sont des économies pour la Sécurité sociale, sans pénaliser fortement les citoyens, doivent être discutés avec les complémentaires, mais cela doit se faire dans un cadre plus large que ce simple transfert de tuyaux de passer de 70 à 60%. Je pense qu’il faudrait un projet, une politique qui soit discutée avec les complémentaires et qui porteraient notamment la prévention ».
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