Résiliation infra-annuelle : Des imprécisions sur le calcul du ratio P/C

jeudi 25 juin 2020
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Les organismes complémentaires devront communiquer à partir du 1er septembre leur P/C et leur niveau de frais de gestion, mais l’arrêté d’application contient quelques imprécisions.

Dans le cadre de la loi du 4 juillet 2019 sur la résiliation infra-annuelle, les organismes complémentaires ont de nouvelles obligations de communication sur leurs contrats responsables. A partir du 1er septembre, elles devront communiquer à leurs adhérents leur ratio de prestations/cotisations ainsi que le détail sur leurs frais de gestion. Ces informations devront figurer de manière lisible, claire et intelligible sur tout document remis à l’adhérent avant la souscription, ainsi que pendant la vie du contrat, sur l’avis d’échéance annuelle. La sanction sur ces nouvelles obligations est le caractère responsable du contrat.

L’arrêté du 6 mai qui indique les modalités de communication relatives aux frais de gestion, paru au Journal Officiel du 5 juin  contient quelques imprécisions, selon le cabinet Actélior. Les organismes complémentaires attendent davantage d'explications. Une circulaire de la Sécurité sociale pourrait apporter des réponses.

Quel niveau de granularité ?

« Sur le calcul du ratio prestations / cotisations, le principe général est clair. Il convient de prendre en charge tous les frais de soins. Ce qui n’est pas clair, c’est le niveau de segmentation. Faut-il calculer cet indicateur au niveau de la branche, en intégrant l’ensemble de l’activité santé de l’assureur, ou bien séparer les contrats individuels et collectifs ?, s’interroge David Echevin, directeur général d’Actélior. Il y a des différences significatives entre les prix et la rentabilité du marché individuel et collectif. Le marché collectif est historiquement plus tendu, avec des niveaux de P/C plus élevés que le marché individuel ». Par exemple, un assureur présentant un P/C global de 80%, aurait un P/C de 71,4% en individuel et un P/C de 100,0% en collectif, illustre le cabinet dans une publication récente.

Un critère de choix pour les assurés ?

La publication des indicateurs au niveau micro pose problème aux assureurs. « La gestion d’une entreprise est constituée du pilotage du mix de ses activités. Par exemple, dans la relation avec un courtier, l’assureur peut accepter d’avoir certains portefeuilles déficitaires et d’autres portefeuilles rentables. La publication du P/C inciterait les assurés des contrats les plus rentables à changer d’assureur, interdisant ainsi l’assureur d’accepter un déficit sur les activités les moins rentables, explique David Echevin. Certaines activités peuvent être plus régulièrement déficitaires ou tendues, comme les contrats des grandes entreprises ou de la fonction publique. Un assureur mutualiste pourrait par exemple accepter de couvrir à perte des grands groupes automobiles en santé et en parallèle assurer la flotte auto, avec deux activités qui se compensent ».

Quelle assiette de prestations retenir ?

Par ailleurs, l’arrêté ne précise pas quelles prestations retenir pour le calcul du P/C. Faut-il intégrer dans l’assiette les prestations payées et provisionnées ? Faut-il uniquement intégrer les prestations et les cotisations des contrats responsables, étant donné que cette obligation de communication ne s’applique qu’aux contrats responsables ?

Si l'on retient dans l’assiette les prestations payées et provisionnées, alors « la distinction entre produit responsable et produit non responsable n’est plus possible, et nous devons retenir l’ensemble des produits », indique Actélior.

Le cabinet d’actuariat fournit deux exemples différents. En intégrant les provisions, le ratio global P/C serait de 86,7%, celui sur les contrat collectifs de 106,0% et celui des contrats individuels, de 79,5%. Sans les provisions, et en intégrant uniquement les prestations payées des contrats responsables, le ratio P/C global descendrait à 80,0%, celui des contrats collectifs à 100,0% et celui des contrats individuels à 71,4%. Les écarts entre les deux visions proviennent de la distinction responsable/non responsable et des prestations provisionnées.

Uniquement des frais de gestion des contrats responsables ?

Concernant les frais de gestion, aujourd’hui les assureurs ne distinguent pas entre contrats responsables ou non responsables. Le taux est calculé aujourd’hui sur l’ensemble du portefeuille. « Calculer les frais de gestion uniquement sur les contrats responsables demanderait un travail technique important, ce qui représente des frais supplémentaires et donc une hausse des coûts de gestion que le texte vise à réduire », commente David Echevin.

Comment le marché se prépare ?

« Le calcul de ces indicateurs représente un travail hors sol. C’est un travail comptable qui ne ne nécessite pas de modifier les systèmes de gestion. La communication se fait cumulativement sur tout bulletin de souscription, document annexé au contrat, tout devis ou proposition remis avant la souscription. Je ne suis pas inquiet sur la capacité du marché à être prêt pour fin 2020 », poursuit David Echevin.

« Je ne suis pas certain que le P/C soit utile aux consommateurs, car leur choix se porte surtout sur le prix et la qualité de service. Nous pourrions également imaginer en second niveau des indicateurs tels que la responsabilité sociale de l’entreprise », considère l’actuaire.

Des informations précieuses pour la concurrence

Ces informations sont en revanche précieuses pour la concurrence. « Les acteurs présentant un ratio P/C plus faible seront des cibles. Cela risque d'aligner tous les acteurs sur le même prix », signale David Echevin. La publication de ces éléments peut tendre le marché et le pousser vers une vision plus micro-économique que macro-économique.

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