V. Brionne (Everest Insurance) : "L’Italie est notre cible à très court terme"

mardi 12 mars 2024
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INTERVIEW - Véronique Brionne, directrice Europe continentale pour Everest Insurance International, décline les ambitions de développement de l’assureur sur le Vieux Continent. Entre ouverture de nouveaux pays, appétits de souscription et structuration des équipes, la dirigeante fait un point complet sur sa feuille de route avec News Assurances Pro.

Quels pays et quelles activités adressez-vous aujourd’hui chez Everest Insurance Europe ?

Everest Insurance Europe est présent aujourd’hui dans quatre pays : aux Pays-Bas, où nous avons obtenu notre première licence en 2021, en France et en Allemagne ou nous avons un agrément depuis 2022, et en Espagne depuis 2023. Notre activité est donc très récente.

Nous ciblons dans ces pays les clients upper middle-market et les grands comptes, soit les entreprises qui réalisent 250M d’euros de chiffre d’affaires et au-delà. Sur ces segments de clientèle et sur l’ensemble de nos marchés, nous proposons une large gamme de produits P&C avec du dommages et de la RC générale, mais aussi du "med mal" ou du "life science" en fonction des marchés. Nous proposons également un large panel de produits lignes financières (PI, cyber, D&O, crime, etc).

Nous complétons ensuite ces offres par des lignes plus spécialisées comme l’aviation que nous venons juste de lancer, ou encore le marine en France et en Espagne qui débutera en avril. Enfin, nous sommes également positionnés en A&H (accident & health) avec des approches croisées entre nos équipes et nos pays.

Pourquoi le groupe Everest, connu initialement sur le marché comme un réassureur, s’est-il positionné sur l’assurance directe ces dernières années ?

Pour Everest Group, l’assurance n’est pas un moyen de diversification, mais une activité qui fait partie intégrante de l’ADN de l’entreprise. Depuis 2020, la volonté d’Everest d’accélérer à l’international explique les moyens mis par la compagnie pour se développer, particulièrement en Europe, et construire sur le long terme une proposition nous permettant d’être un assureur global de référence. Cela ne veut pas dire être le plus gros, mais celui qui "drive" le marché en termes de souscription, de produits et surtout de services.

Ce dernier point a été le principal déclencheur. Dans un marché où les prix ont été revus à la hausse ces dernières années, beaucoup d’acteurs historiques ont été occupés à redresser leurs portefeuilles, à gérer des bases de coûts et à chercher de l’efficacité opérationnelle. Résultat, la qualité de service s’est dégradée et le gap entre les besoins des entreprises et l’accompagnement des assureurs s’est creusé. Cette situation a donc laissé de la place pour de nouveaux entrants comme Everest.

J’ajoute que nous n’avons ni legacy technique - et donc pas de portefeuilles à redresser - ni legacy informatique, et que nous nous appuyons sur des recrutements et des expertises de grande qualité avec un groupe très solide financièrement : il n’y avait donc pas meilleur moment pour entrer sur le marché.

Quel sera le mode opératoire d’Everest pour prendre des parts de marché ?

Nous voulons garder une relation très étroite avec nos marchés locaux et avec nos clients. Pour ce faire, nous devons être réactifs et accessibles dans chacun de nos pays. Cela passe donc par des équipes de souscription qui ont une capacité et une liberté de souscription pour s’engager sur les risques dont ils ont la charge. Dans chaque bureau nous avons également une équipe responsable des opérations, et une équipe responsable de la gestion des sinistres, ce qui nous permet d’avoir une infrastructure complète au plus proche des besoins clients.

L’ensemble des tâches de middle-office et de back-office (gestion de contrats, process sinistres, finances, etc) est gérée et centralisée depuis notre "Everest Business Center" basé à Madrid. Cet "operating model" nous permet ainsi d’être très agiles mais également de nous développer sur le modeling des risques ou encore la gestion de la donnée.

Dans quels autres pays d’Europe Everest souhaite-t-il se développer à l’avenir ?

Compte-tenu des pays et des cibles de clientèles sur lesquels nous sommes actifs aujourd’hui, nous considérons que nous sommes déjà à 70% des marchés que nous pouvons adresser en Europe.

Pour autant, il nous manque dans notre feuille de route l’Italie, qui est notre cible à très court terme. Avec José Ramón Morales, le patron d’Everest en Espagne, nous avons donc élaboré et testé ces derniers mois une stratégie de business pour entrer sur le marché italien. Cela fonctionne au-delà de nos espérances et nous pensons donc que c’est le bon moment pour nous y installer. Ainsi, sous réserve de l’obtention des autorisations légales, nous devrions pouvoir ouvrir cette cinquième branche européenne dans l’année. Nous créerons alors une région sud qui regroupera l’Espagne et l’Italie, sous la responsabilité de José Ramón Morales.

Quelle est votre feuille de route à la tête des activités européennes d’Everest Insurance ?

La région Europe et ses quatre pays n’est établie opérationnellement que depuis l’an dernier. Nous avons bouclé 2023 en ayant plus que triplé notre portefeuille. Notre objectif 2024 est de doubler notre chiffre d’affaires sur la région et nous sommes à ce jour bien au-delà de nos objectifs.

Nous avons une approche stratégique à 5 ans afin de pouvoir planifier nos investissements et, à l’issue de ce plan, l’Europe est attendue comme la région qui croît la plus vite au sein du groupe.

J’ajoute que notre axe principal de développement ne repose pas sur des acquisitions mais sur de la croissance organique en nous concentrant sur la construction de nos outils, de notre approche et surtout de notre culture.

Quelle sera votre politique en termes d’apérition ?

D’un point de vue technique et dans un souci de bonne gestion du capital, on ne peut décemment pas arriver sur le marché des grands risques en prenant le lead sur des programmes dotés de plusieurs centaines de millions d’euros de capacités sans "buffer".

Notre stratégie d’entrée a donc été de prendre des parts de coassurance plus ou moins importantes suivant les clients. Progressivement, nous prenons du muscle et davantage d’expositions pour augmenter nos parts. Depuis 2024, nous avons désormais la capacité de leader des excess, tant sur le plan du déploiement du capital que des outils de gestion.

Même si nous n’avons pas encore les infrastructures à l’international, c’est un sujet sur lequel nous sommes en train de travailler fortement. C’est d’ailleurs pourquoi nous nous sommes installés sur ce marché européen : nous n’avons pas vocation à être un suiveur mais un acteur de lead sur les programmes internationaux.

Avec quels types de courtiers souhaitez-vous travailler ?

Nous sommes un nouvel entrant et si notre arrivée ne fait pas de différence sur les lignes surcapacitaires, sur les risques plus complexes, nous souhaitons amener aux courtiers une approche différenciante. Mécaniquement, du fait des clients que nous adressons, nous travaillons avec les champions internationaux et nationaux, avec les spécificités de chaque marché. Mais nous sommes aussi ouverts à tous ceux qui sont à l’écoute de notre façon de travailler.

Le groupe a recruté de nombreuses pointures du marché ces derniers mois. Pour quelle raison ?

Cela participe à la visibilité d’Everest sur le marché. Recruter des profils capés a permis de poser les fondations et les ambitions d’une compagnie qui s’appuie sur le savoir et sur l’expérience de grands professionnels dans leurs domaines de compétence. Cela participe surtout à la culture que l’on construit et que l’on souhaite développer au sein du groupe à long terme. Ainsi, les personnes que nous recrutons doivent absolument s’inscrire dans cette culture, et ce malgré un marché du recrutement complexe. Everest est avant tout une entreprise humaine, et cela se reflète dans tout ce que nous faisons. Nous nous attachons à créer un lieu de travail qui se nourrit de la diversité des idées, des expériences et des milieux.

Enfin, l’un des autres enjeux, c’est aussi d’avoir de l’impact, d'attirer des talents, et d'avoir dans nos équipes des figures du métier qui crédibilisent notre approche et nos velléités de croissance.

Quels "talents" vous manque-t-il aujourd’hui dans la constitution de vos équipes en Europe ?

De par notre développement, nos besoins évoluent. En lien avec notre stratégie, nous devons davantage organiser et rendre plus visible notre stratégie autour de nos clients.

C’est donc le moment de se doter d’une capacité spécifique pour structurer cette relation client. Pour ce faire, nous allons créer un nouveau rôle : une direction de l’engagement clients pour l’Europe qui sera confiée à Anne Charon. Après un formidable travail à la tête d’Everest France, son track record commercial correspond parfaitement à ce nouveau besoin. En parallèle, nous recherchons actuellement celui ou celle qui lui succédera à la tête de nos activités tricolores.

Ce nouveau poste est une étape importante dans notre développement et surtout la démonstration que notre modèle fonctionne.

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