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7 interrogations à propos de l’I.A. dans l’Assurance

mercredi 3 janvier 2018
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En résonnance au Colloque Prospective du CercleLab le 27 novembre dernier sur le thème de l’Intelligence Artificielle et l’Assurance, Michel REVEST, ex-Directeur Recherches & Innovation de Covéa nous livre sa vision de l’impact de l’I.A. sur notre secteur.
  1. L’I.A. n’est un phénomène spontané, elle doit être mise en perspective.
Il s’agit d’une étape finale dans l’évolution des civilisations : depuis toujours les Sociétés ont utilisé leur environnement pour concrétiser, développer leur intelligence (pierre, os, bois, terre, papier de toutes les espèces), ainsi que pour créer les outils ou les supports leur permettant de transmettre leur savoir. L’intelligence immatérielle a existé dès l’origine, c’est l’oral. L’intelligence immatérielle d’aujourd’hui rend « solide » (mêmes caractéristiques, en fait supérieures, que la matière) le numérique dont le développement est tel qu’il devient une intelligence.  La boucle est bouclée  entre l’immatériel de l’oral des origines et le contemporain : L’I.A. est l’héritière de tout ce que s’est passé…
  1. L’I.A. n’est qu’un outil.
L’homme ne fait que satisfaire ses besoins en utilisant son intelligence sous différentes formes, en créant les outils avec son environnement, l’I.A. étant la dernière de ces formes. Elle ne remplace pas l’homme ; l’aidera (cf. les différentes formes d’I.A.). L’I.A. absolue, celle du transhumanisme, est un fantasme.
  1. L’I.A. n’est pas une opportunité, un simple levier pour améliorer la gestion des assureurs, leurs ratios financiers.
Les assureurs n’ont pas le choix : il faut modifier en profondeur leurs structures et organisation. L’I.A. leur sera nécessaire pour s’adapter au monde actuel et futur ; sans I.A., pas d’assurance demain (absence de maîtrise des risques actuels et à venir), pas de capacité à répondre aux besoins des clients avec les produits adaptés (transversalité /services) ; pas de relations efficaces assureur-assuré. (donc de « marketing). Finalement, ce sera pour les assureurs l’incapacité à s’adapter au monde qui vient, à la nouvelle Société (nouveaux comportements, nouvelles tendances).
  1. Les risques pour les assureurs qui resteraient à l’écart de l’I.A.?
D’ici à 5 ans le marché connaîtra l’émergence de nouveaux assureurs, nouveaux distributeurs, nouveaux intégrateurs de prestations avec l’assurance intégrée.
  1. Le cœur de métier : I.A. et le Risque.
L’Intelligence Artificielle aura un impact majeur sur le cœur de métier de l’assurance : celui des risques. En effet, l’I.A. rend possible l’assurance de risques qui ne sont pas couverts actuellement. Elle constitue une ressource pour analyser, évaluer, chiffrer, valoriser les risques nouveaux et émergents, complexes de la société de demain (et déjà d’aujourd’hui). Ce sera l’enjeu le plus important pour les assureurs, pour la protection de leur fonds de commerce, le maintien de leur chaîne de valeur, la préservation de leurs activités. Les risques représentent 38 % du PIB dont 10 % pour les assureurs (toutes catégories confondues…). Compte tenu de l’encadrement de certains risques (Catnat, terrorisme, décennale, santé, rôle du BCT,...) ils ne contrôlent de façon entièrement libre que 7 % des risques de la Société. L’assurance pèse près 10 % du PIB, dont moins de 4 % pour les risques (6 % pour l’épargne). Un tiers de ces risques sont sous contrôle au moins en partie, sous les contraintes de la réglementation des pouvoirs publics. Seuls donc 7 % des risques en France sont gérés librement, sont à la main des assureurs. Un secteur de 150.000 personnes salariées, davantage en comprenant les intermédiaires ( 50.000), de plus de 200 milliards de primes et cotisations, de 2.400 milliards d’€ de masse financière gérée, peut-il s’en satisfaire ? L’obligation d’alléger le poids des dépenses sociales, celle de la maîtrise des soins de santé et du coût du vieillissement, de la dépendance, les risques climatiques et informatiques, ceux de la biotechnologie et nanotechnologie ( les nouvelles frontières de la vie), l’environnement, la nouvelle industrie (4.0), les nouvelles mobilités et nouveaux habitats avec la domotique connectée , les nouveaux matériaux, imposent une nouvelle approche des risques car le savoir faire assurantiel actuel est insuffisant ou inopérant. L’I.A. est la ressource qui apportera les réponses. C’est la chance des assureurs (l’outil), l’arme, pour investir le domaine du risque (personnes, biens) ; mieux que l’Etat qui n’est pas organisé pour cela ou les partenaires sociaux… Alors que les risques deviennent de plus en plus complexes, l’IA permettra de gérer ce que les assureurs ne savent gérer aujourd’hui. Et ce, alors que les risques à venir (santé, vieillissement, informatique bion-nano technologies, industrie 4.0) sont les principaux défis de nos Sociétés de demain.
  1. Question centrale : l’I.A., outil qui donnera aux assureurs les armes pour gérer les risques émergents complexes qui sont sa matière assurable de demain?
La perte de matière assurable, l’impact négatif qu’aurait l’I.A. sur l’assurance est une fausse idée, à moins que les assureurs ne sachent ou ne se donnent les moyens de l’intégrer dans leur stratégie et leur gestion. La logique du traitement des risques change ; ce n’est plus la répartition des pertes au moindre coût sans ou avec une faible valeur ajoutée, mais une logique de prévention, préservation, maintien des personnes, des biens et des entreprises. Les assureurs ne pourront limiter leur rôle à celui de la répartition des pertes au plus faible coût possible ; ils ne pourraient justifier leurs marges actuelles. L’I.A. doit leur permettre d’apporter plus de valeur ajoutée à leurs prestations, notamment avec l’individualisation. La valeur apportée au client devra être redéfinie. Une assurance nouvelle post-I.A. est à repenser. Une logique de services pour la satisfaction de besoins, personnalisée, actualisée et interactive devra être mise en place. Les assureurs devront repenser, reformuler leur chaîne de valeur (quelle part pour le conseil, la vente, la gestion, le SAV sinistre, les services annexes et connexes, la prévention, la préservation, les informations et conseils, les prestations d’assistance...) à partir notamment des ressources de l’I.A. avec des solutions personnalisées, réactives, flexibles actualisées, etc. Tout dépend des assureurs eux-mêmes, mais seule l’I.A. leur en donnera les moyens.
  1. L’ I.A. fin de l’assurance traditionnelle ?
Des solutions de répartition de pertes hors du carcan assurantiel et de sa réglementation (Solvency2, DDA,…) et de son coût émergent dans le monde, pays développés ou non. Pour les sinistres de faible montant les solutions de mutualisation hors dispositifs d’assurance sont plus adaptées, moins coûteuses. Grâce à l’Intelligence Artificielle, elles se développeront de plus en plus. Les verrous actuels sauteront-ils, d’une façon ou d’une autre ? L’I.A. des solutions alternatives devra être suivie, traitée et intégrée dans les stratégies des assureurs. Elle donnera aux assureurs, s’ils savent en saisir l’opportunité,   la capacité à résister aux formes de concurrence à venir : celle qui viendra les concurrencer directement sur leurs produits avec des nouveaux compétiteurs, celle qui captera l’essentiel de leurs marges (conception, distribution, gestion) avec de nouveaux distributeurs prestataires en assurance ou avec des services intégrant l’assurance, ou encore les concurrencer sur de nouvelles façons de mutualiser qui seraient des solutions alternatives au marché de l’assurance. A ce titre, l’I.A. devrait être incorporée à l’ADN des entreprises d’assurance. Michel REVEST, Membre du Comité Scientifique du CercleLab  

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