Absentéisme : Les idées reçues sur les effets du télétravail

lundi 28 novembre 2022
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Non, les télétravailleurs ne sont pas moins en arrêt maladie. Une note de la Fondation Jean Jaurès et Diot-Siaci déconstruit l’idée reçue selon laquelle le télétravail provoquerait une diminution de l’absentéisme.

Après le pic de 2020, le taux d’absentéisme de 2021 dépasse celui de 2019. Il atteint 4,94%, en augmentation de 0,16 point, selon l’Observatoire Diot-Siaci de l’absentéisme. En revanche, les tendances sont différentes selon le statut professionnel. Ainsi, le taux d’absentéisme baisse chez les cadres (2,20% en 2021 contre 2,45% en 2019) et les professions intermédiaires. Tandis que chez les ouvriers, il augmente de 1,41 point et atteint 8,39%.

Des effets contre-intuitifs

Intuitivement, l’on pourrait penser que le télétravail préserverait les salariés des arrêts de travail. Il n’en est rien, selon une note de la Fondation Jean Jaurès et Diot-Siaci. 35% des personnes ayant recours au télétravail ont été absentes au moins un jour en 2021, contre 32% pour l’ensemble des salariés. Encore plus inquiétant, plus un salarié fait du télétravail, plus il est absent. Le pourcentage de salariés en arrêt passe de 27% pour les collaborateurs qui sont en télétravail moins de deux jours par semaine à 36% pour ceux qui y ont recours deux à trois jours. Il atteint 47% chez ceux qui sont à distance quatre ou cinq jours par semaine.

Le télétravail s’est largement diffusé après la crise Covid. 35% des salariés y ont recours aujourd’hui, contre 20% en mars 2020. Les salariés sont globalement satisfaits de ce nouveau mode de travail, qui favorise leur autonomie et équilibre de vie. En revanche, leur niveau de stress a augmenté. 48% des salariés se disent stressés dans le cadre de leur travail. Ce pourcentage atteint 53% chez les télétravailleurs et 57% chez ceux qui y ont recours quatre ou cinq jours par semaine.

Les tensions managériales peuvent s'accentuer. 47% des télétravailleurs interrogés affirment avoir reçu une pression de la part de leur entourage professionnel pour réduire le télétravail et revenir sur site. Cette proportion bondit à 59% chez ceux qui ont été en arrêt en 2021.

La fatigue liée au temps de trajet

Le temps de trajet a également un lien direct avec l’absentéisme. Il est en effet générateur de fatigue et de stress. La durée de l’absentéisme, 6,6 jours en moyenne, est plus élevée chez les salariés ayant un long trajet. Le nombre de jours d’absence par an passe de 5,2 jours pour ceux qui ont 15 minutes de trajet à 7,8 jours pour ceux qui ont plus d’une heure de transport. Les salariés habitant loin de leur lieu de travail sont plus nombreux (36%) à évoquer une chute de motivation, contre 28% en moyenne.

Autre conséquence de la crise Covid, les frontières entre la vie personnelle et professionnelle sont plus poreuses. Les entreprises ont donc une carte à jouer pour améliorer la santé et le bien-être des collaborateurs au-delà du cadre professionnel. 71% des salariés se disent intéressés par un accompagnement de leur employeur sur la santé physique ou psychologique. Un chiffre en augmentation de 5 points par rapport à 2021. Les jeunes sont davantage intéressés, selon l’étude de Diot-Siaci.

Actions de prévention déconnectées des attentes

Concernant le type d’action de prévention, les salariés attendent des actions de prévention sur les troubles musculosquelettiques et les risques psychosociaux. Or, 80% des grandes entreprises proposent une ligne d’écoute psychologique, service qui semble moins plébiscité par les salariés.

L’étude sur l’absentéisme de Diot-Siaci révèle une augmentation de l’absentéisme chez les jeunes de moins de 35 ans, tandis que les autres tranches d’âge demeurent stables. Parmi les secteurs d’activité, le commerce atteint 18% de taux d’absentéisme. L’épidémie a également des conséquences sur le long terme. Ainsi, les aides-soignantes sont plus absentes qu’avant la crise.

La note de la Fondation Jean Jaurès évoque les facteurs temporel et financier comme les deux principaux freins à l’efficacité de la prévention santé. Seulement 54% des responsables RH interrogés affirment que les actions de prévention santé menées dans l’entreprise ont contribué à réduire l’absentéisme. Ce ressenti est en baisse de six points sur un an.

Les auteurs de l’étude, Romain Bendavid, directeur de l’expertise corporate & work experience à l’Ifop, et Sabeiha Bouchakour, directrice QVT-prévention-absentéisme de Diot-Siaci, expliquent ces résultats en raison de la durée des actions, qui sont souvent ponctuelles et en réaction à un fait générateur. Ils évoquent la nécessité de sortir d’une logique curative car le retour sur investissement se mesure sur le long terme. Les effets des actions ne sont visibles que des années plus tard. Les auteurs invitent les RH qui hésiteraient à reconduire les actions de prévention à prendre en considération le coût de la non-prévention. Et ils donnent l’exemple de la branche du BTP qui a réussi à faire baisser la sinistralité grâce à sa persévérance.

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