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ANI : Comment les courtiers comptent se saisir de la complémentaire santé pour tous

vendredi 18 septembre 2015
Image de ANI : Comment les courtiers comptent se saisir de la complémentaire santé pour tous

L'ANI va pousser les courtiers à une course aux volumes. Mais à moins de 4 mois de son entrée en vigueur totale, les cartes sont loin d'être tirées.

Les courtiers entrent dans la dernière ligne droite de la conquête du marché de l'ANI, ou la généralisation de la complémentaire santé à tous les salariés. Cette dernière ligne droite est peut-être aussi la première, tant le marché tarde à se mettre en place avant la date limite du 1er janvier 2016 accordée aux entreprises pour s'équiper.

Un certain attentisme règne auprès des TPE-PME, cœur de cible de la réforme. « Les clients montrent de l'intérêt mais peu d'affaires sont encore réalisées. Nous nous préparons à des mois de fin d'année très chargés, ce qui pourrait durer jusqu'à la fin du premier trimestre de l'année prochaine », estime Françoise Louberssac, directeur général d'April Entreprise Prévoyance. « Ça ne bouge pas beaucoup alors que nous sommes prêts depuis 2 ans de notre côté », ajoute Jean-Philippe Ferrandis, directeur des assurances de personnes chez Verspieren. Comme on pouvait s'y attendre, pour la plupart des dirigeants d'entreprise, l'extension de la complémentaire santé d'entreprise apparaît comme une gageure lorsqu'elle n'est pas obscure.

Bosse de l'ANI

Or, il existe bien une bosse de l'ANI que représentent environ 600.000 entreprises qui doivent s'équiper d'une complémentaire santé soit 5 millions de salariés et 2,6 millions d’ayants droit. Sur ce nouveau marché, les courtiers ont leur carte à jouer. Et ce, dès maintenant. « Les courtiers doivent se mettre en campagne, les parts de marché se prennent aujourd'hui. Il y a du volume et désormais tous les outils de distribution et de gestion qui permettent d'aller vite, grâce notamment au digital. Ce marché n'est interdit à personne », prévient Alix Pradère, associée à OpusLine, cabinet de stratégie et management en santé et vieillissement.

Institutions de prévoyance, mutuelles, bancassureurs, agents veulent tous capter ce marché, avec parfois des stratégies tarifaires très agressives, pour satisfaire des patrons qui doivent se serrer la ceinture. « Nous ne savons pas ce que nous gagnerons au final, quels seront les résultats, mais si nous n'apportons pas à nos clients les solutions, ils risqueraient d'aller voir ailleurs, la concurrence est très forte », dit un courtier parisien spécialiste qui se déclare obligé d'être présent sur ce marché.

Les parts de marché se prennent dès maintenant sur l'assurance collective afin, demain, de pouvoir fidéliser et multi-équiper les clients. « Le marché est porteur. Nous essayons d'appliquer le principe de la saturation en équipant les entreprises que l'on connaît déjà », déclare Cyril Bayvet, associé du cabinet Bayvet & Basset. La campagne de l'ANI pourra se transformer en conquête plus pérenne en allant sur d'autres risques.

Force commerciale des courtiers

Dans cette course de vitesse, les courtiers de proximité ont de multiples atouts. « Ils bénéficient d'une vraie force de frappe commerciale, de réactivité et de proximité avec une clientèle qu'ils connaissent bien dans chaque ville et villages », pense Hervé Houdard, délégué général du courtier Siaci Saint Honoré. En outre, les courtiers peuvent apporter leur expertise « à des TPE-PME qui ne savent pas bien comment marche l'ANI, qui connaissent mal le sujet et ont besoin d'explication », souligne Joël Golder, associé du cabinet Golder & Partners.

Enfin, pour beaucoup, l'ANI se résume à une logique de coût d'acquisition et le courtage a l'avantage de les faire baisser. « L'ANI pose aux mutuelles des questions de modèles. En plus de réduire leur part de marché en individuel, l'ANI pousse certaines d'entre elles  à se tourner vers le courtage en complément de leur réseau de distribution traditionnel. Le recours au courtage suppose la mise en place de compétences et d'une organisation dont elles doivent prendre conscience » , indique Alix Pradère chez OpusLine. « Le coût du courtage pour apporter une affaire est très intéressant par rapport aux frais d'agence qu'ils impliqueraient pour le même résultat », explique un courtier travaillant avec une mutuelle.

Logique de coûts

Pour des courtiers gestionnaires, les courtiers partenaires sont essentiels pour la partie distribution des produits. « Je n’envoie aucun commercial sur place, cela coûterait trop cher. Pour une petite entreprise de 10 personnes, on peut compter sur une prime annuelle de 400 à 600 euros par salarié soit une prime totale de 4 à 6.000 euros. Avec une commission d’environ 10% (6% en gestion et 3-4% en apport et conseil), on peut donc espérer 400 à 600 euros. De plus les coûts de gestion sont comprimés et ne pourront être relevés », précise Jean-Philippe Ferrandis, directeur des assurances de personnes chez Verspieren. Tout comme les courtiers, les experts comptables et commissaires aux comptes qui connaissent bien les TPE/PME représentent des apporteurs d'affaires de choix pour les gros courtiers et courtiers gestionnaires.

En contrepartie de cet apport, les courtiers bénéficient des outils de gestion des courtiers gestionnaires. En effet, le principal défi de l'ANI reste la complexité de la gestion des produits qui mélangent de l'individuel et du collectif avec l'obligation de fournir à l'assuré un remboursement unique. « Nous sommes sur de gros projets de digitalisation pour la souscription et la gestion, auxquels s'ajoutent des équipes dédiées aux courtiers afin de les délester au maximum du suivi des dossiers », dit Françoise Louberssac chez d'April. Les investissements sont lourds. « Les dépenses informatiques se rapprochent de la masse salariale, et sont devenues le 2eme poste de dépenses », indique Jean-Philippe Ferrandis chez Verspieren.

Finalement, selon un expert, l'ANI rebat les cartes de la distribution et pourraient pousser le secteur à se restructurer laissant en place 20 à 30 acteurs restants voire 10 d'entre-eux capables d'avoir une force commerciale suffisante, une capacité à investir dans le digital, à moderniser son portefeuille, à accompagner les clients sur du conseil et d'autres risques... bref à aller plus loin que le remboursement des frais de santé.

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