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Assurance emprunteur : « La loi Lemoine a raté les classes moyennes »

vendredi 26 avril 2024
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Interview publiée dans 8 titres de Presse Quotidienne Régionale le 23 avril

Depuis septembre 2022, la loi Lemoine permet aux emprunteurs de résilier leur contrat d’assurance à tout moment et donc de faire jouer la concurrence. Eric Maumy, président du courtier grossiste en assurances, April et porte-parole de l’Association pour la promotion de la concurrence en assurance des emprunteurs (Apcade) – à l’origine de cette loi – milite dorénavant pour sa juste application. Dans son viseur, les mauvaises pratiques de certaines banques.

Il y a un an, vous appeliez les banques à mieux respecter la loi Lemoine. Qu’en est-il aujourd’hui ?

« Depuis l’entrée en vigueur de la loi Lemoine, sur les sept millions d’emprunteurs français, on estime que 800 000 d’entre eux ont fait jouer la concurrence en matière d’assurance. Ce sont donc plus de cinq millions d’emprunteurs qui sont encore assurés auprès de leurs organismes bancaires. Cela représente une part de marché de plus de 85% des crédits assurés par les banques. Si la loi Lemoine a permis à des dizaines de milliers de français de faire des gains substantiels de pouvoir d’achat, on parle de 50% d’économies en moyenne en passant par un acteur alternatif aux banques, elle a raté la population des classes moyennes. Plus de 60% en effet des Français qui ont fait jouer la concurrence sont des cadres (CSP+). Une trop large majorité des Français est moins informée sur ce droit de changer d’assurance emprunteur à tout moment et dispose de moins de marge de manœuvre face aux établissements bancaires. C’est la raison pour laquelle nous avons souhaité lancer un observatoire de la concurrence, afin de nous assurer que la loi soit bien appliquée, pour l’ensemble des emprunteurs.

Mais comment être certain que les assureurs dits alternatifs offrent le même niveau de protection et que finalement l’assuré n’y perde pas ?

« Avant même le vote de la loi Lemoine, un autre texte législatif (la loi Lagarde – votée en juillet 2010 – qui donnait la possibilité de choisir une autre assurance que celle de la banque, mais pas de résilier le contrat à tout moment, NDLR) imposait déjà aux assureurs alternatifs comme aux banquiers d’indiquer aux emprunteurs et en toute transparence leurs garanties et protections. C’est donc très bien encadré par la loi. Et sur un plan purement commercial, si les assureurs alternatifs n’avaient pas proposé des garanties suffisantes à leurs clients, ils ne se seraient pas développés sur un marché dynamique ».

Pourquoi dans ce cas, les assurances que vous proposez sont-elles souvent moins chères que dans les banques ?

« L’association de protection des consommateurs « UFC Que choisir » avait révélé que les marges pour les organismes bancaires sur les assurances emprunteurs était de l’ordre de 70 %. Le taux de sinistralité, autrement dit de non-paiement des crédits est en effet assez faible. Un chiffre que les banques elles-mêmes n’avaient pas contesté. La loi Lemoine permet d’ouvrir le champ de la concurrence, en faisant baisser les prix sur ce marché. C’est une excellente nouvelle pour le pouvoir d’achat des Français.

Si seulement 15 % des emprunteurs font aujourd’hui encore jouer la concurrence sur leur assurance, ce serait donc uniquement de la faute des banques, selon vous ?

« Je ne dis pas cela. Mais force est de constater que malgré la loi, les banques conservent une position ultra dominante. Des pratiques dilatoires chez certains bancassureurs sont encore trop nombreuses, ce dont témoigne le respect très imparfait des délais légaux obligatoires en matière de substitution qui peut décourager les emprunteurs. Le délai de 11 jours n’est tenu que dans une minorité des cas (18% en 2023) et ces pratiques se concentrent sur les profils les moins aisés qui ont pourtant le plus à gagner à faire jouer la concurrence. 

La BCE doit annoncer la baisse de ses taux au mois de juin. Une décision que vous attendiez ?

« Nous sommes effectivement en train de gagner la bataille contre l’inflation. Et même si la baisse prévue des taux est assez réduite, c’est un signal fort pour le marché de l’immobilier. Mais il faut aussi un retour de la confiance. Et cela dépend de l’économie en général. »
Propos recueillis par Boris Ivanoff