Brigitte Bouquot : "Les entreprises doivent prendre en main leur gestion des risques"
INTERVIEW - L'Amrae fait partie du groupe de travail visant à mettre en place un régime pour couvrir les risques de pertes économiques. Brigitte Bouquot, présidente de l'association des risk managers fait le point sur les discussions et ses attentes vis-à-vis du futur dispositif.
L'Amrae fait partie du groupe de travail visant à mettre en place un régime destiné à couvrir les pertes économiques. Quels sont les enjeux de ce futur régime ?
Brigitte Bouquot : L'enjeu est celui des pertes économiques. Mais ce n'est pas un dommage comme les autres. Il est extrêmement difficile à mutualiser selon la loi des grands nombres. C'est pourquoi dans les discussions au sein du groupe de travail, nous mettons l'accent sur l'importance cruciale du risk management. Le futur dispositif ne pourra pas faire l'économie de la gestion des risques au sein des entreprises, car nous sommes confrontés à un risque systémique.
Cela signifie-t-il qu'il faut pousser à l'auto-assurance des entreprises ?
Brigitte Bouquot : Les entreprises sont de plus en plus confrontées à des scénarios plus globaux comme la supply chain, le risque cyber et désormais le risque de pandémie ou sanitaire avec des fermetures administratives. Or la réponse assurantielle à ces sinistres sans dommages n'est pas encore aboutie. A l'Amrae, nous sommes persuadés que c'est le moment d'inciter les chefs d'entreprises à investir pour renforcer la résilience de leurs entreprises. Cela pourrait prendre la forme de crédit d'impôt résilience ou d’incitations fiscales pour renforcer les fonds propres, ou de sécuriser l'implantation de captives en France ou en Europe. Il faut dégonfler la matière assurable, car les sommes en jeu sont considérables.
Les grandes entreprises sont acculturées au risk management. Mais comment pousser les TPE et les PME à piloter leurs risques ?
Brigitte Bouquot : Il est vrai que les grandes entreprises ont l'habitude d'analyser leurs risques au regard de leurs fonds propres. Pour les plus petites structures, le risk management semble plus complexe à mettre en place, alors qu’il s’agit des bons réflexes de la part du dirigeant. Une première piste pourrait être d'inciter à la diversification de leurs activités. Une autre voie à explorer serait de développer une culture du risque par filière. Certaines, comme la filière spatiale l'ont déjà mis en place. Il faut aller plus loin.
Faut-il s'inspirer du régime Cat' Nat' ou du Gareat pour créer le futur régime ?
Brigitte Bouquot : Je suis convaincue qu'il faut mettre en place un système beaucoup plus innovant qu'une simple réplication de tel ou tel système déjà existant. Toute la question est de savoir si nous parlons d'un sujet d'assurance standard ou finalement de financement d'un risque. A l'Amrae nous sommes plus dans une logique où il faut s'appuyer sur le bilan des entreprises. La solution n'est pas purement assurantielle.
Sur le volet assurance, il faudra tout de même que les réassureurs apportent le capital pour la couverture des pertes économiques. N'y a-t-il pas un risque qu'ils se montrent frileux comme ils le furent sur le terrorisme au lendemain des attentats du 11 septembre 2001 ?
Brigitte Bouquot : C'est un risque effectivement. Et c'est pour cela qu'il est impératif que les entreprises prennent en main leur gestion des risques. Le leadership doit être du côté des dirigeants d'entreprises et non des assureurs. Si le risque est clarifié, les réassureurs apporteront les capitaux.
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