Conflit d'intérêt : Assureurs et sociétés de gestion, liaisons dangereuses ?
L’AMF soulève la question de la gestion des conflits d’intérêt entre assureurs et sociétés de gestion dans une étude publiée le 10 juin dernier. L’autorité constate une structure de groupe « très marquée » vis-à-vis de la diversification des portefeuilles des assureurs français.
L’Autorité des marchés financiers a publié, le 10 juin, une étude sur les fonds présents au bilan des assureurs français. Parmi les 4.923 fonds français présents au portefeuille des assureurs et des placements atteignant 2.666 Mds d’euros, le gendarme pointe du doigt la question de la gestion des conflits d’intérêt. En effet, le rapport montre un lien marqué entre les assureurs et les sociétés de gestion mettant en cause la diversification des portefeuilles. « Ce résultat apparaît peu surprenant, étant donné que certains grands groupes d’assurance ont créé spécifiquement des filiales de gestion d’actifs pour gérer les actifs du groupe », indique le rapport de l’AMF.
L’étude, basée sur un référentiel de tous les fonds présents dans la base de supervision des fonds du gendarme financier, comptabilise 1.617 Mds d’euros de fonds de droit français à l’actif net au 30 juin 2020. « Les fonds français retrouvés au portefeuille des assureurs totalisaient un actif net de 1.060 milliards d’euros, avec 477 milliards d’euros à leur actif », précise le rapport. Parmi les 477 Mds d’euros de placement dans des fonds français, 15 groupes d’assurances cumulaient 407 Mds d’euros investis. En détail, chacun des groupes détenaient plus de 7 Mds d’euros de parts de fonds français en portefeuille.
« Une extrême concentration des encours »
Selon le rapport, 12 des 15 groupes d’assurance détenteurs des 407 Mds d’euros de placement, investissent plus de 50% des OPC français en portefeuille dans des fonds gérés par des SGP affiliées au même groupe. Trois d’entre eux y consacrent plus de 90% de leurs OPC en portefeuille.
Le constat est identique du côté des sociétés de gestion. Toujours, selon le rapport, 15 SGP « gèrent pour le compte des assureurs français plus de 5 milliards d’euros de parts de fonds français ». L’équivalent de 371 Mds d’euros de fonds au portefeuille des assureurs. Parmi les 15 sociétés de gestion, 13 d’entre elles comptent plus de 50% de part des fonds gérés pour le compte d’un assureur.
« Un travail similaire peut être réalisé sur les seuls placements en UC. Les constats sont les mêmes. Les supports des UC proposés aux assurés sont essentiellement des fonds gérés par une SGP affiliée au groupe. Réciproquement, les gérants s’occupent presque exclusivement des UC de sociétés d’assurances appartenant au même groupe. Toutefois ce lien très fort entre les assureurs et leur société de gestion pose la question de la gestion des conflits d'intérêt », indique l’AMF dans son rapport.
Le gendarme financier montre dans son étude la difficulté d'apporter une réponse quantitative précise au sujet de la distribution des fonds français via l'assurance vie. « La part que représentent les investisseurs institutionnels au passif reste difficilement mesurable. La connaissance du passif des fonds demeure très lacunaire, tant pour le régulateur que pour les gérants eux-mêmes », précise l'autorité dans son étude. Néanmoins, « l’identification de ces fonds significativement utilisés par les assureurs permettra dans des études à venir d’analyser dans quelle mesure le schéma particulier de distribution via les UC joue sur certains paramètres », conclut l'AMF.
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