Gouvernance : Vers une technicité accrue des administrateurs ?
Le pilier 2 de Solvabilité 2 vient renforcer le rôle des conseils d’administration des compagnies d’assurance. Une évolution qui n’est pas sans poser de nombreuses problématiques pour ses membres.
Outre la création de quatre fonctions clés et la nomination de dirigeants effectifs, le conseil d’administration (CA) voit ses prérogatives modifiées par le Pilier 2 de Solvabilité 2, consacré à la gouvernance. Ces évolutions résultent notamment de la transposition du texte en droit français et de l’adaptation du concept anglo-saxon d’AMSB (« Administration, management or supervisory body »).
« Dans le cadre de la transposition, le Trésor a réparti les rôles de l’AMSB entre conseil d’administration et dirigeants effectifs. Le conseil d’administration conserve beaucoup de prérogatives sous Solvabilité 2 : ses responsabilités sont renforcées et il est plus actif dans la supervision de l’entreprise », affirme Gildas Robert, directeur métier actuariat conseil chez Optimind Winter.
Gare à l’excès de technicité des administrateurs
« Cette gouvernance s’inscrit dans le cadre d’un environnement exigeant plus de transparence. Elle participe au renforcement de l’in- formation des conseils d’administration », précise Hubert Marck, directeur des affaires publiques et conformité d’Axa France Par exemple, pour les assureurs qui ont choisi le modèle interne, « il revient désormais au conseil d’administration d’adresser le dossier d’approbation de ce modèle interne à l’ACPR, ce qui va demander aux conseils d’administration de se plonger dans des aspects beaucoup plus techniques », détaille Gildas Robert.
Une technicité plus affûtée, mise à l’épreuve à la fin de l’année 2016 : « Pour les assureurs les moins avancés, les CA de décembre vont devoir valider d’un coup toutes les politiques écrites. Cela représente beaucoup de documentation à produire et va forcément bousculer ses habitudes de fonctionnement au quotidien », expliquait Gildas Robert à la veille de l’entrée en vigueur de Solvabilité 2 « Toutes les politiques écrites doivent être validées par le conseil d’administration : politique de sous-traitance, de contrôle interne, de gestion du capital ou encore de conformité », indique Hubert Marck. Chez Axa France, des for- mations ont ainsi été diligentées pour les administrateurs, et plus particulièrement sur le sujet de Solvabilité 2.
Assurer la compétence du CA n’est pas si simple
« Mais gare à l’excès de technicité, prévient un observateur. Certes, le conseil d’administration doit être en mesure de comprendre les nouveaux enjeux liés à Solvabilité 2, mais il doit garder son rôle essentiel : celui de challenger la direction générale. Il doit donc garder une certaine forme de bon sens pour offrir un point de vue différent aux techniciens purs de l’assurance. »
Cela implique par ailleurs une nouvelle approche du conseil d’administration par la direction générale. Face à la financiarisation et la technicité accrue du secteur de l’assurance, les directions générales doivent faire preuve de pédagogie, et de clarté pour les administrateurs. Bien que cela ne soit pas explicitement indiqué dans la directive et la notice, cela implique de vulgariser les contenus qui lui sont présentés.
Les fonctions clés viennent en n en soutien du conseil d’administration. « Celui-ci doit entendre au moins une fois par an le responsable de chacune des quatre fonctions, ce qui permet d’assurer un contrôle de second niveau », note Gildas Robert. Les responsables du CA doivent par ailleurs satisfaire aux qualités d’honorabilité, de compétences et d’expérience (« fit and proper ») nécessaires à leur exercice. Problème : « Assurer la compétence du conseil d’administration n’est pas si simple pour les grandes structures qui renouvellent un tiers de leur conseil tous les ans », explique Dan Chelly, directeur métier risk management chez Optimind Winter.
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