Interview : "Nous sommes en train de réécrire l’histoire de Verlingue à l’international"
INTERVIEW – Pour News Assurances Pro, Gilles Bénéplanc, directeur général du groupe Adelaïde et directeur général de Verlingue, et Benjamin Verlingue, directeur institutions financières et des filiales internationales de Verlingue font le point sur l'actualité du courtier. Entre premiers enseignements de l'exercices 2020 et dernières acquisitions, les deux dirigeants reviennent également sur l'ambition de développement du groupe à l'international.
Quel bilan chiffré pouvez-vous tirer de l’exercice 2020 ?
GB Le courtage reste une industrie résiliente et notre activité a continué à tenir bon durant la crise. Nous avons réalisé une très bonne campagne commerciale et même si nos comptes 2020 ne sont pas encore arrêtés, nous devrions enregistrer une progression de notre chiffre d’affaire de l’ordre de 3%, un peu en-deçà de nos objectifs. Notre marge a également progressé, notamment grâce à notre discipline de souscription et notre accompagnement des clients.
Comment la crise du Covid-19 vous a t-elle impactés (tant en termes de business qu’en termes d’organisation interne) ?
GB Cette violente crise, qui s’accompagne d’une baisse du PIB que le pays n’avait pas connu depuis la guerre, nous a impactés à plusieurs titres. D’abord, en termes d’organisation, nous avons dû mettre l’ensemble de nos salariés en télétravail en 48 heures, en veillant à ce que les systèmes et les équipes informatiques tiennent le coup. Nous avons également dû veiller à la santé de nos collaborateurs et adopter une attitude citoyenne face à la circulation du virus.
Il a également fallu continuer à faire fonctionner l’entreprise, notamment dans l’accompagnement de nos clients eux-mêmes impactés. Jusqu’alors, près de 20% des salariés de l’entreprise bénéficiaient déjà du télétravail. Cette situation nous a donc permis de simplifier et généraliser le fonctionnement de nos relations avec nos assurés pour faire du business.
BV Concernant nos activités à l’international, nous avons globalement mis en place les mêmes mesures. Si le Royaume-Uni a été confiné en dernier, l’économie britannique a pourtant été durement touchée, y compris en raison du Brexit. Cet impact plus rude a été perçu plus rapidement car les échéances des contrats anglais s’étalent sur toute l’année et non pas concentrés au 1er janvier. Cela nous a donc permis de mieux comprendre ce qui nous attendait pour les renouvellements tricolores. En Suisse, nous étions à un niveau de confinement intermédiaire et raisonnable, ce qui nous a permis d’accélérer le projet de rapprochement de nos trois entités dans le pays.
Quelle est votre position face à la vague d’avenants envoyée par les assureurs pour revoir leurs polices, notamment en cas de pandémie ?
GB Le moment est mal venu pour nos clients. En plus des hausses tarifaires que connait le marché depuis plusieurs mois déjà - et que la crise du Covid-19 a accéléré – il faut maintenant intégrer des changements de contrats et des modifications de garanties. C’est une situation difficile qui nous pousse à repenser les programmes et la portée des garanties de nos clients et nous oblige à être plus proches d’eux comme conseil de confiance.
Lors des appels d’offres, cela implique également des charges administratives importantes et ces nouvelles conditions s’appliquent sur plusieurs branches comme la PE sans dommage ou les silent covers cyber des contrats RC… Que les assureurs veuillent clarifier leurs contrats est respectable, mais cela bouleverse l’homogénéité des programmes de coassurance, les relations avec les réassureurs et nuit in fine à l’activité du marché.
J’ajoute que dans ce contexte, il est plus difficile de conquérir de nouveaux clients. Même si nous avons continué à faire de nouvelles affaires en mode hybride et purement distanciel, cela demeure néanmoins plus complexe dans un métier de contacts et de discussions.
Pouvez-vous revenir sur le rachat de Luso Atlantica au Portugal ? Quelles seront les synergies et les objectifs de cette acquisition ?
BV Nous sommes fiers d’avoir pu mener à bien cette opération, notamment en temps de Covid. Luso Atlantica est le 5ème courtier du marché portugais, spécialisé en risques d’entreprises. Nous avons avec ce cabinet des similitudes et un ADN commun et dans notre projet de devenir une entreprise à dimension européenne, l’Europe de l’ouest nous parait à ce titre une zone dynamique. De son côté, Luso Atlantica enregistre depuis plusieurs exercices une croissance organique de plus de 10% et cherchait un nouvel acteur pour accompagner son développement et trouver un nouveau souffle.
A plus large échelle, quelles sont vos ambitions chiffrées à l’international ?
BV Cette dernière acquisition est une nouvelle étape cohérente dans notre feuille de route. Nous n’achetons pas du chiffre d’affaires mais nous cherchons des opérations structurantes pour notre développement. Pour devenir un acteur de référence en Europe, nous avons d’autres étapes significatives à franchir et l’Allemagne et l’Italie peuvent être des zones intéressantes.
Verlingue a réalisé cinq acquisitions en cinq ans et nous allons encore accélérer sur de nouvelles zones géographiques et de nouveaux métiers. Entre qualité, positionnement et intérêts communs, nous sommes opportunistes et pragmatiques face aux occasions qui se présentent à nous. Aujourd’hui, nous sommes en train de réécrire l’histoire de Verlingue à l’international. Aujourd’hui 1/3 de notre chiffre d’affaires est réalisé à l’étranger. Dans un avenir proche, nous aimerions atteindre les 50% ce qui équivaut à doubler voire tripler notre taille à l’international.
Dans un marché du courtage qui ne cesse de se concentrer, quels sont vos atouts ?
GB La concentration du secteur s’opère autour de trois gros moteurs : les « méga brokers », les courtiers sous private equity et les groupes familiaux. Notre positionnement nous permet d’être un moteur libre avec une culture entrepreneuriale et une approche de long terme tout en bénéficiant d’une force de frappe financière significative. Cela nous permet surtout de ne pas avoir de freins administratifs, réglementaires ou de gouvernance.
Le groupe Adélaïde s’est toujours refusé à faire entrer un fonds à ses côtés ou au capital de l’un de ses courtiers. Toutefois, pour continuer à grandir, cette étape est-elle la prochaine marche à franchir ?
BV Notre modèle nous permet d’être agile et de prendre des décisions rapides. Nous n’avons pas changé notre politique concernant les fonds d’investissement. Notre développement passe par un actionnariat familial, aux côtés des directeurs de nos différentes filiales, ce qui engendre une union efficace, notamment dans ce contexte de concentration.
Quelle est votre politique en matière d’acquisition aujourd’hui ?
BV Notre ambition de devenir un grand courtier européen indépendant passe par la croissance organique mais aussi par les acquisitions. Nous avons une approche très proactive sur la question. En même temps que nous recevons de nombreuses sollicitations. Le track-record de nos opérations réussies ces dernières années témoigne d’une grande confiance dans le projet Verlingue.
Lors de l’arrivée de Gilles Bénéplanc chez Verlingue, l’une de ses missions était d’épauler Benjamin Verlingue dans sa montée en puissance au sein du groupe. Où en êtes-vous aujourd’hui tous les deux ? Quel est le calendrier pour la suite ?
BV Mes relations avec Gilles rendent la pratique du métier facile. Après avoir occupé plusieurs postes au sein des différentes entités du groupe, je travaille depuis près d’un an sur des grands comptes, avec deux responsabilités particulières que sont les institutions financières et le développement à l’international, soit 25% des activités d’Adelaïde.
GB Les relations avec Benjamin ont été depuis mon arrivée au sein du groupe simples et fluides. Outre les sujets quotidiens, nous travaillons aujourd’hui en équipe sur la refonte de notre futur plan stratégique du groupe à horizon 2024 et qui sera annoncé dans les prochaines semaines.
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