Qui, des assureurs et des sociétés de services va dominer à moyen terme le marché de l’assurance santé ? Gestion du risque, actions de prévention, hyper-segmentation et big data… Face à l’incursion des sociétés de services et des acteurs de la nouvelle économie dans le monde de l’assurance santé, les jours des acteurs traditionnels sont-ils comptés ? C’était le thème d’un débat organisé mardi 27 septembre par le cabinet de conseil Eurogroup.
« IBM a beaucoup investi dans les données, y compris dans la santé. Avec Watson (ndlr : le programme informatique d'intelligence artificielle conçu par IBM), nous travaillons déjà avec les entreprises sur le sujet de l’absentéisme, en visant à reconnaître des comportements et ainsi réduire l’absentéisme de courte et longue durée », a ainsi expliqué Thibault Pironneau, directeur commercial en charge de la santé et de la protection sociale chez d’IBM.
« Il y a eu très peu de digitalisation jusqu’ici », a constaté en préambule Jean-Charles Samuelian, co-fondateur d’Alan, un assureur santé en devenir. Les choses devraient toutefois changer rapidement. Avec Alan, Jean-Charles Samuelian compte faire justement une nouvelle proposition à ses futurs clients, mais ne présentera davantage son projet qu’en fin d’année.
Pour autant, ces travaux d’analyse ne conduiront pas comme certains le craignent à une hyper segmentation, selon Sébastien Letelié, fondateur de la société Health Factory et leader pour l’Europe du mouvement Hacking Health. Selon lui, les acteurs du marché de l’assurance santé n’iront pas vers l’hyper-segmentation « à cause de la pression des medias ». En revanche, de grands changements sont à prévoir car les nouveaux entrants ont une approche radicalement différente des assureurs puisque « le risque, ce n’est pas leur problème ». « Le modèle économique qui va fonctionner vise à avoir le plus possible d’assurés, le moins malades possibles », explique-t-il.
Thibault Pironneau abonde dans son sens, et parie que les nouveaux acteurs vont proposer à l’assuré de partager ses données contre un service personnalisé, comme c’est déjà la cas en assurance auto avec le pay-as-you-drive.
Les acteurs traditionnels présents autour de la table ne s’opposaient pas à cette vue. Ainsi, Alexandrine de Valois, directrice du plan stratégique et du marketing chez Malakoff Médéric a-t-elle confirmé l’importance croissante des données, rappelant que le groupe avait commencé à analyser les nombreuses données dont il disposait, notamment pour comprendre les risques spécifiques aux branches et proposer des services de prévention adaptés aux risques observés. Ces analyses en sont encore à leurs débuts mais sur les trois dernières années, Malakoff-Médéric a pu observer que la sinistralité moyenne au sein de 65 entreprises et 35 000 salariés où des actions de prévention ont été mises en œuvre avait baissé tandis que sur le portefeuille global du groupe, cet indicateur s’était détérioré. « Le traitement des données devient un sujet permanent », estime Alexandrine de Valois.
Un long chemin reste toutefois à parcourir pour les acteurs traditionnels… toujours chez Malakoff Médéric une étude a ainsi montré que parmi les assurés sortant d’un séjour hospitalier, les individus qui faisaient appel aux prestations d’assistance avaient en général appris l’existence de services… par l’assistante sociale de l’hôpital, et pas par leur assureur. Cette prestation, destinée à faciliter le retour à domicile, et donc à gérer le risque, est pourtant systématiquement incluse dans les garanties santé. « Je crois à la segmentation des services, pas à celle du prix. Je vais utiliser la data pour proposer des services », a confirmé Jean-Charles Samulian.
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