Pierre-Édouard Magnan : "Je souhaite être le président de l’expansion de la Fnim"

lundi 15 janvier 2024
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INTERVIEW - Pierre-Édouard Magnan, le nouveau président de la Fnim, détaille les priorités de sa feuille de route, entre expansion de la fédération et défense des petites mutuelles.

Vous avez été élu président de la Fnim en décembre. Quel est votre ambition ?

La Fnim regroupe aujourd’hui une trentaine de mutuelles. Je veux être le président de l’élargissement et de l’amplification de la Fnim. Je vais mener le combat autour du modèle mutualiste de proximité. Même dans un monde ultra-digitalisé, les personnes sont en demande d’humain et de proximité. Il faut que la Mutualité redevienne un acteur reconnu de l’économie sociale et solidaire. Nous avons gagné la bataille du mot « mutuelle » mais on a perdu celle du sens. Il faut que l’on fasse exister cette dimension de l’ESS.

Comment avez-vous connu et rejoint la Fnim ?

Je suis président de la mutuelle Union des travailleurs, une des plus anciennes mutuelles de France, basée à Dieppe. Aujourd’hui, l’UDT protège 10.000 personnes, est une structure autonome et affiche un résultat technique positif. Je suis entré dans l’environnement Fnim par l’UGM ACS. Puis, l’UDT a adhéré à la Fnim en septembre 2020 et je suis entré au conseil d’administration en septembre 2021. Je m’inscris dans la continuité du mandat de Philippe Mixe, qui était président d’une des plus grosses mutuelles de la fédération, alors que moi-même, je préside l’une des plus petites. Cela montre à quel point nous avons toutes et tous notre place dans la fédération.

Étiez-vous le seul candidat à la présidence de la Fnim ?

Je suis le seul à avoir déposé une candidature. Il aurait pu y avoir un deuxième candidat, mais finalement Hadrien Leroux, président de la Smerep, qui avait manifesté un intérêt pour la fonction, n’a pas déposé de candidature.

Quelles sont les ambitions de la Fnim sur la réforme de la PSC ?

Notre souhaitons nous positionner principalement sur la fonction publique territoriale et hospitalière. Nous constituons une petite équipe au sein de la fédération pour faire de la veille et organiser la réponse aux appels d’offres santé. Notre difficulté est d’avoir la capacité de répondre sur la prévoyance. Notre rêve c’était, en quelque sorte, de réinventer le Mutex d’origine dans l’environnement de la Fnim. Mais pour l’heure, nous n’avons pas suffisamment réuni de capacité financière. L’autre option est de trouver un partenaire positionné sur la prévoyance mais les mutuelles de la Fnim ne souhaitent pas travailler avec des assureurs à but lucratif.

Pensez-vous que cette réforme va permettre d’améliorer la couverture des agents de la fonction publique ?

La réforme de la PSC, comme la généralisation de la complémentaire santé à toutes les entreprises, contribue à démutualiser la société française. On isole les salariés qui cotisent le plus et qui sont le moins malades. Ce qui entraine une inflation des cotisations des retraités notamment, mais des jeunes et des chômeurs également. (Sans parler du fait que les gros contrats collectifs sont souvent déséquilibrés et compensés sur les cotisations des contrats individuels.) Je crains qu’avec la réforme de la PSC beaucoup d’acteurs choisissent de vendre à perte, comme ce fut le cas lors de l’ANI de 2016.

Que pensez-vous des augmentations de cotisation des contrats de complémentaire santé pour 2024 ? Partagez-vous les chiffres de la Mutualité Française qui estiment les revalorisations moyennes à 8,1% ?

L’augmentation des dépenses de santé s’explique aussi bien par le contexte d’inflation que par la réforme du 100% santé. En plus, les transferts de charges RO/RC contribuent aussi à l‘évolution des cotisations, n’en déplaise aux messieurs Fatôme, von Lennep et Rousseau. L’État a toujours adoré prélever de l’impôt déguisé par des intermédiaires. L’argent des mutuelles, c’est l’argent des adhérents. Il faudrait aussi rappeler que l’Etat prélève 14% sur le dos de adhérents mutualistes, TVA qui ne dit pas son nom. Sachant que nous ne récupérons pas cette TVA sur nos achats, ni sur les prestations payées. Et que nous payons l’IS (sur les produits financiers certes) et la taxe sur les salaires (qui touche les sociétés qui ne payent pas d’IS).

Certains acteurs appliquent des majorations de 10 à 15% car ils commencent à compenser des années de vente à perte, dans le collectif principalement. Il y a quelques jours, j’ai vu le cas d’un adhérent à qui l’on appliquait une augmentation de 17% sur sa cotisation 2024. Soit l’organisme veut faire résilier l’adhérent, soit l’organisme a fait de la vente à perte depuis des années. Ce système néfaste va atteindre des limites car il est l’apanage des gros acteurs qui peuvent financer la croissance de leur portefeuille en ponctionnant leurs réserves.

Pensez-vous que le contexte actuel va conduire à un engouement du secteur pour les contrats non-responsables ?

Nos mutuelles ont quasiment toutes conservé des offres antérieures à la réforme du 100% santé qui sont devenues non-responsables. Quantitativement, le contrat non-responsable reste marginal encore aujourd’hui, mais je pense que c’est une niche qui a vocation à grandir. Car les contrats non-responsables permettent d’être innovants.

Le 100% santé a un impact significatif sur les prestations. Un certain nombre d’adhérents qui se comportent en consommateurs, souscrivent des offres responsables, se font rembourser des soins, notamment dentaires, particulièrement onéreux, puis résilient et reprennent un contrat non-responsable pour une cotisation nettement plus faible.

Souhaitez-vous accompagner vos membres sur la lutte contre la fraude ?

Je suis pingre avec l’argent de nos adhérents ! Donc oui, et nous le faisons déjà. En 2020, les seules dépenses qui ont continué à progresser ce sont les dépenses dentaires. Nous militons pour le retour de l’entente préalable avec le régime obligatoire sur les soins dentaires. Par ailleurs, notamment avec l’outil d’un de nos adhérents, Assia, nous allons travailler sur le repérage des dépenses de santé consécutives à un accident (recours contre tiers) qui doivent être prises en charge par les assureurs, automobile entre autres, et qui sont aujourd’hui assumés par les mutuelles.

Quel regard portez-vous sur les prochaines évolutions règlementaires ?

Sur solvabilité 2, nous allons poursuivre notre action afin de relever les seuils d’assujettissement à la directive. Nous allons également nous mobiliser sur deux futures directives, Dora sur la résilience informatique et CSRD sur le reporting extra-financier, et qui vont toucher fortement les acteurs mutualistes. C’est le RGPD puissance 10 ! Ces nouvelles règlementations vont être dures à appliquer par nos mutuelles, alors qu’elles ne sécurisent en rien nos adhérents. C’est injuste d’appliquer les mêmes règles quelle que soit la taille et la capacité d’organisation de la mutuelle.

Allez-vous rencontrer Éric Chenut, le président de la Mutualité française ?

Oui, j’ai sollicité auprès de lui une rencontre, comme avec les responsables de France Assureurs et du CTIP. Comme Éric Chenut, j’ai été moi aussi engagé dans le secteur étudiant, et notamment lors de la création de la LMDE. Il y a des choses sur lesquelles je crois que nous ne pouvons pas être en désaccord. Nous souhaitons que la Fnim soit reconnue au même titre que les autres fédérations d’organismes complémentaires car, et d’autant plus dans la période que nous traversons, elle a pleinement sa place et son rôle.

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