Stratégie : Comment la MGEN anticipe la réforme de la PSC ?

vendredi 8 juillet 2022
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La MGEN se met en ordre de marche pour affronter la réforme de la PSC et aller au-delà de ses positions historiques sur le marché de la protection sociale complémentaire des fonctionnaires.

D’ici 2026, tous les fonctionnaires bénéficieront d’une complémentaire santé financée à 50% par leur employeur public. Dans le cadre de la réforme de la PSC, la MGEN place ses pions pour remporter la bataille de « l’ANI de la fonction publique », comme l’appelle Matthias Savignac, son président. La mutuelle de l’Éducation nationale s’apprête à faire évoluer son modèle après 75 ans d’histoire. Passer d’un contrat individuel et facultatif à un contrat collectif et obligatoire aura des répercussions importantes sur la souscription, la gestion, les systèmes d’information, les compétences ou encore la gouvernance de la mutuelle. Pour porter toutes ces évolutions, la MGEN se dote d’un nouveau plan stratégique à horizon 2025, validé par le conseil d'administration le 17 juin dernier.

« Nous sommes confiants parce que l’on a anticipé cette réforme et que l’on connaît très bien nos adhérents. Sera-t-on capables de devenir des assureurs collectifs ? Oui, sans hésitation », répond Fabrice Heyriès, directeur général de la MGEN, qui collecte aujourd’hui 100M d’euros de cotisations sur des contrats collectifs de structures de l’Économie Sociale et Solidaire.

Des ambitions au-delà de l’Éducation nationale

« Nous allons passer de 2 millions d’adhérents à un client unique si on remporte uniquement l’appel d’offres de l’Éducation nationale », s’inquiète Fabrice Hayriès qui souligne le fort lien de dépendance de la mutuelle avec un seul ministère. Afin de se diversifier, la MGEN veut maintenir ses positions dans les ministères de l’Éducation nationale et de la Transition écologique où il est déjà référencée et essayer de conquérir d'autres ministères.

Interrogés sur les ambitions de la MGEN pour couvrir les agents du ministère de l’Économie et des finances, les dirigeants de la MGEN n’ont pas précisé si la mutuelle serait candidate à l’appel d’offres. Pour rappel, Mgéfi, mutuelle référencée à Bercy, a voté sa sortie du groupe Vyv, et pourrait donc demain se retrouver en concurrence avec la MGEN sur plusieurs ministères.

Objectif, la fonction publique hospitalière

La MGEN souhaite également se développer sur la fonction publique hospitalière, en partenariat avec Relyens. Présent sur ce marché depuis 2019, la MGEN revendique aujourd’hui 8.000 adhérents, dans un contexte de crise sanitaire qui a fortement perturbé les hôpitaux. « Nous sommes dans une logique de recherche de partenariats avec d’autres mutuelles de la fonction publique, indépendamment de l’appartenance à un groupe, afin d’être plus légitime dans le cadre des appels d’offre à venir. L’idée n’est pas d’y aller seul et contre tous », a déclaré Matthias Savignac.

Faire évoluer la gouvernance

Si la MGEN réussit son pari de diversifier son portefeuille, elle est consciente de la nécessité de faire évoluer sa gouvernance. Elle se dit prête à ouvrir son assemblée générale à des agents hospitaliers ou issus d’autres ministères.

Le MGEN se montre plus circonspecte à propos des équilibres économiques de la réforme. « Il est probable que la réforme tire les tarifs vers le bas. Cela nous impose de mener des programmes de réduction de coûts », selon Fabrice Heyriès. Le directeur général n’a pas souhaité se fixer un objectif cible de réduction des frais, qui aujourd’hui avoisinent 19% des cotisations perçues.

Selon son modèle actuel, les primes des actifs servent à financer les prestations des retraités. Les transferts entre actifs et retraités sont de l’ordre de 40 millions d’euros par an pour la MGEN. Un retraité de l'Éducation nationale paie donc sa complémentaire santé deux fois moins cher qu'un salarié du privé, selon la mutuelle. Malgré les mécanismes de solidarité négociés dans le cadre de l'accord interministériel, « La réforme risque donc de  détricoter les logiques de solidarités du modèle MGEN », selon Fabrice Heyriès.

4 tranches de cotisation pour les retraités

Afin d’anticiper les évolutions sur la tarification des retraités, l’assemblée générale de la MGEN a voté le 8 juillet la mise en place dès 2023 de 4 nouvelles tranches de cotisation pour les retraités (moins de 70 ans, 70-75 ans, 75-80 ans, plus de 80 ans) avec une indexation tarifaire différente par tranche d'âge et une modulation par formule. Ces tranches remplaceront le système actuel composé de deux tranches. « Nous mettons en place ces nouvelles tranches d’âge afin de nous donner la possibilité de piloter plus finement les tarifs dans l’avenir », précise Fabrice Heyriès.

Un nouvel outil de gestion

Concernant les systèmes d’information, la MGEN va progressivement changer d’outil de gestion. A l’issue d’un appel d’offres, la mutuelle a retenu 2 solutions de Cegedim Insurance Solutions : le progiciel Actif’Infinite et la solution de gestion Easy Collectif. La mutuelle abandonnera donc progressivement son outil propriétaire Orion au bénéfice des solutions de Cegedim. Côté tiers payant, en revanche, la MGEN a décidé de changer l’outil de Cegedim par celui de Viamedis.

Quid de la prévoyance ?

Parmi les interrogations de la réforme, la couverture prévoyance des agents de la fonction publique d’Etat reste en suspens. S’agira-t-elle d’une couverture collective et obligatoire ou bien individuelle et facultative ? L’employeur publique participera-t-il financièrement à cette couverture ? Sera-t-elle couplée au contrat santé ? « L’euro ne pourra pas servir à la fois l’augmentation du pouvoir d’achat et l’augmentation de la protection des agents. L’Etat devra donc faire des arbitrages entre le risque statutaire et le risque prévoyance », considère Matthias Savignac.

La couverture des fonctionnaires expatriés reste un autre sujet non résolu par l’accord interministériel du 26 janvier 2022, comme le soulignent les dirigeants de la MGEN. Le niveau de couverture socle en santé ne s’adapte pas aux spécificités de cette population résidant à l’étranger.

Quid de l’action sociale ?

La MGEN consacre aujourd’hui 3% de ses cotisations à l’action sociale. Derrière cette appellation générique, il y a de nombreux projets de solidarité, comme par exemple le versement de rentes d'orphelins ou encore des prestations d’handicap. L’accord interministériel prévoit, en revanche, une affectation minimale de 0,5% des cotisations sur ce type d'actions. Pour la MGEN, cela impliquerait de passer d'un budget d’action sociale de 70M d’euros à 10M d’euros, selon Fabrice Heyrièrs, qui milite pour aller au-delà de cette dotation socle dans le cadre de la négociation entre les partenaires sociaux et les différents ministères.

A fond sur la santé mentale

La MGEN a décidé de pérenniser le dispositif de place sur le remboursement consultations de psychologue en 2022. La mutuelle a remboursé à ses adhérents jusqu’à 4 consultations de psychologue au premier euro, dans la limite de 60 euros par consultation. En 2021, la mutuelle a consacré 15 millions d’euros au dispositif, en plus des 5 millions d’euros sur des prestations de santé mentale que la mutuelle avait déjà. 80.000 adhérents ont bénéficié de ces remboursements, pour une moyenne de 3,75 consultations par adhérent et un prix moyen de 52 euros la séance. 40% des bénéficiaires de ces consultations avaient moins de 30 ans. En 2022, la MGEN a prévu de passer de 20 à 25 millions d’euros sur les dispositifs d’accompagnement sur la santé mentale. Ses dirigeants s'interrogent sur l'avenir du dispositif dans le cadre de la réforme de la PSC. « Ces chiffres nous aident à valoriser le dispositif auprès des partenaires sociaux et du ministère. Si on montre que la population est en demande de cet accompagnement sur la santé mentale, on espère que ce type de prestation puisse être incluse dans l’appel d’offre. L’Etat aura son rôle à jouer sur le contenu de l’appel d’offre », explique Matthias Savignac.

Suite à la fin de la MFP

Sur le plan fédéral, l’assemblée générale de la Mutualité fonction publique doit se réunir le 12 juillet prochain pour décider d’un éventuel rapprochement avec la Fédération nationale de la Mutualité Française. « La MFP rassemble beaucoup de mutuelles de fonctionnaires mais n’est pas représentative de tous les versants de la fonction publique, notamment l’hospitalier. Ce n’était pas cohérent d’avoir un pôle fonction publique au sein de la FNMF, en plus de la MFP. Notre volonté est de créer un seul pôle qui rassemble toutes les mutuelles de la fonction publique », explique Matthias Savignac. Mis à part la représentativité, il reste la question du conventionnement hospitalier. « Nous avons envie de poursuivre le conventionnement, mais la FNMF ne peut pas le porter. Nous allons étudier ensemble comment on s’organise, parmi les acteurs qui pourraient prendre le relais de la MFP, comme la MGEN », explique Matthias Savignac.

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