La 4ème conférence annuelle de l’EIOPA à Francfort a été l’occasion d’expliquer la transition de l’institution de la fonction de régulateur à celle de superviseur.
Après 13 ans de gestation de Solvabilité 2, "good regulation is just a first step", a assené Gabriel Bernardino dès l’ouverture de la 4ème conférence de l’EIOPA, qui s’est tenue à Francfort le 19 novembre dans le cadre de la semaine de la finance. Et le gendarme européen des assureurs a profité d’une assistance nourrie pour faire passer de nombreux messages. Environ 300 participants s’y sont pressés, dont quelques oreilles françaises attentives, comme celles de Mireille Aubry, responsable du pilotage de solvabilité chez Covéa, d’Anne-Lise Bontemps-Chanel de l’ACPR, de Francis Frizon, médiateur de la FFSA, de Diane Ianucci, chargée des affaires européennes chez Macif, ou encore de Fabrice Lorillon, directeur du bureau de Bruxelles d’Axa.
Au 1er janvier 2016, Solvabilité 2 entrera en vigueur et l’EIOPA a donc une mission importante d’accompagnement à mener. "Le vrai challenge pour EIOPA est maintenant de s’assurer que Solvabilité 2 sera bien implémentée dans toute l’Europe", ajoute Gabriel Bernardino. Pour ce faire, l’organisation va publier plusieurs salves de "guidelines" et de standards techniques : une seconde consultation doit par exemple être lancée en décembre pour un deuxième "guideline" et des recommandations sur le sujet des taux d’intérêt sont prévues pour février 2015. Objectif : limiter les risques d’interprétations divergentes des 28 superviseurs nationaux impliqués et faire en sorte que les règles soient bien appliquées dès le départ par les compagnies. Un sondage dans l’assistance équipée de boîtiers a par ailleurs fait ressortir les plus gros challenges de l’implémentation : le reporting (pour 22%) et le pilier 1 ("capital requirement" pour 19% et "market consistent valuation" pour 20%). L’EIOPA renforcera en outre sa présence dans les collèges de superviseurs et a constitué un centre de compétences sur les modèles internes et une équipe de surveillance pour "challenger" les autorités nationales.
L'EIOPA en manque de moyens ?
Gabriel Bernardino sera donc bientôt amené à changer de costume, pour endosser celui de superviseur. Le premier obstacle est le manque de moyens de son institution, qu’il expose sans réserve : "pour atteindre tous ces objectifs, nous avons besoin de consolider notre indépendance opérationnelle et en particulier de trouver une solution de financement stable pour EIOPA, via une ligne de budget spécifique allouée par l’Union européenne, via l’industrie, ou les deux combinées". Sauf que superviser des entreprises en recevant un financement de leur part pourrait relever du conflit d’intérêt… Du côté de la Commission européenne, le budget alloué à EIOPA a été diminué et ses effectifs gelés. Gabriel Bernardino reste néanmoins droit dans ses bottes : "nous sommes en train de créer les conditions de bases et les étapes nécessaires à la construction d’une autorité de supervision crédible et respectée", affirme-t-il.
La coordination avec chacun des superviseurs nationaux pour éviter les conflits de compétences est un autre challenge à relever. Mark Wilson, PDG d’Aviva plc, a utilisé à ce sujet la métaphore footballistique : "Sur le terrain, un match avec un unique arbitre n’est pas possible. L’arbitre central représente le superviseur national, et l’arbitre de touche, qui lève le drapeau pour signaler un hors-jeu, c’est l’EIOPA." A ceci près qu’au foot, l’arbitre central peut déjuger ses assistants… Pour Gabriel Bernardino, "la question ne devrait même pas se poser. A chaque fois qu’EIOPA publiera un avis, il sera communiqué en toute transparence, et les responsables politiques européens et nationaux prendront leur décision". Sans oublier de mentionner que l’intérêt commun et européen passera avant les priorités nationales.
Ces messages ne manqueront pas d’être relayés à Paris lors de la conférence de la FFSA dédiée à Solvabilité 2 le 3 décembre, puis lors d’une conférence de l’ACPR le 18 décembre.
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