Agents territoriaux : Que va changer la réforme de la PSC en prévoyance ?
Dans le cadre de la réforme de la protection sociale complémentaire des agents territoriaux, un projet de décret précise le panier de garanties santé et prévoyance et la prise en charge minimale obligatoire des collectivités territoriales. En prévoyance, le caractère facultatif de la couverture fait débat.
La dernière version du projet de décret fixe le socle de garanties et les montants nets de participation des employeurs pour la protection sociale complémentaire des agents territoriaux. Le texte (voir document ci-dessous) précise que les dispositions en prévoyance entreront en vigueur le 1er janvier 2025 et les dispositions en santé, le 1er janvier 2026.
A la différence des autres versants de la fonction publique, dans la territoriale les employeurs publiques devront financer au moins 20% du montant de référence en prévoyance. Ce montant est fixé à 35 euros. L’employeur public doit donc au minima financer 7 euros par mois et par agent sur les risques décès, incapacité et invalidité.
En santé, le montant de référence est de 30 euros et le taux de participation employeur, d’au moins 50%. La participation mensuelle par agent en santé est donc de 15 euros, au minima. Ces montants socles ne sont pas figés dans le marbre et pourraient même être revus à la hausse avant l’entrée en vigueur de la réforme.
Ambigüité sur l'invalidité
Dans la rédaction du projet de décret, il persiste une certaine ambigüité concernant le risque d’invalidité, dont la prise en charge devra être précisée ultérieurement par circulaire. Aujourd’hui, en cas d’invalidité, l’organisme assureur vient en complément de l’indemnisation de la CNRACL (Caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales). Les organismes complémentaires militent pour que la rente invalidité versée par l’assureur soit calculée en fonction de celle de la CNRACL. Or, le projet de décret pourrait laisser penser que quel que soit le taux de prise en charge de la CNRACL, l’assureur viendrait en complément, jusqu’à 90% du traitement net de référence de l'agent. Cette interprétation du texte serait très coûteuse pour les organismes complémentaires.
Ce décret, considéré comme « simple », est actuellement examiné par le Comité national d’évaluation des normes (CNEN). En revanche, la révision du décret de 2011 s’annonce beaucoup plus complexe. Elle doit encadrer les modalités de participation des employeurs (labellisations, conventions de participation, la mise en place des contrats collectifs obligatoires par accord collectif, avenir des centres de gestion). Ce décret doit être pris en Conseil d’État début 2023.
Qu’est-ce qui va changer ?
Le niveau de couverture des contrats prévoyance prévu dans le projet de décret est supérieur à celui dont bénéficient aujourd’hui un bon nombre d’agents territoriaux. Cela devrait donc entraîner une hausse du prix des couvertures. Pour les assureurs, le risque de démutualisation est évident car certains agents pourraient décider de ne pas se couvrir. En revanche, le niveau de participation minimale des employeurs publics prévu par le projet de décret est plus faible que celui qu’offrent un bon nombre de collectivités aujourd'hui.
L'adhésion facultative en l'absence d'accord collectif
Selon des observateurs, un bon nombre de collectivités, surtout celles avec peu de moyens, n’opteront pas forcément pour un contrat collectif à adhésion obligatoire. Des mécanismes individuels et facultatifs vont donc persister sur la fonction publique territoriale, après la réforme de la PSC. « Les organisations syndicales en prévoyance n’accepteront pas un contrat collectif à adhésion obligatoire en prévoyance que si elles n’obtiennent pas 50% de financement de l’employeur », anticipe un autre observateur.
Autre inquiétude majeure, la pérennité financière des régimes. Le risque prévoyance des agents territoriaux se dégrade depuis des années, notamment à cause de l’absentéisme qui progresse de 3 à 4% tous les ans. Les couvertures prévoyance vont continuer à se renchérir et les assureurs devront faire preuve de pédagogie pour obtenir des niveaux de participation employeur suffisants afin de rendre la couverture prévoyance abordable et attractive pour les agents.
« La prévoyance des agents territoriaux est un marché compliqué qui présente un risque très dégradé. Nous pensons que la réforme n’apporte pas pour l’heure d’incitations suffisantes pour bouleverser le marché. Beaucoup d’acteurs pensent qu’il y a des affaires à faire et risquent de se casser les dents », commente un opérateur historique.
Le risque s’est encore dégradé début 2022 à cause de la fin des autorisations spéciales d’absence (ASA) accordées aux agents à risque pendant la crise sanitaire. Pendant la durée de l’ASA, l’agent était exclu du régime prévoyance. Avec la fin de ce dispositif d’ASA fin 2021, un bon nombre d’agents ont basculé en arrêt de travail en janvier 2022 et les organismes complémentaires ont commencé à enregistrer une forte hausse d’ouvertures de droit dès le mois de mars.
Dans le cadre de la réforme, la balle est dans le camp des employeurs. Charge à eux de faire de la protection sociale complémentaire un sujet RH pour les prochaines années. Les grandes collectivités vont probablement conclure des accords afin de mettre en place des contrats collectifs à adhésion obligatoire, avec une prise en charge employeur supérieure au niveau socle.
Dans les petites collectivités territoriales, le rôle des centres de gestion sera déterminant pour infuser une culture de la protection sociale chez les employeurs. Ces derniers, en offrant une prise de participation à la hauteur des enjeux, devront convaincre les agents de l’importance de se couvrir pour faire face aux aléas de la vie.
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