La loi Sapin II aurait accentué la baisse des taux servis par les assureurs en 2016 sur le fonds euros selon les analystes. Année d’élections, 2017 sera une année d’incertitude et d’attentisme pour le marché de l’assurance vie. Une hausse graduelle des taux obligataires serait le meilleur scénario pour le marché de l’assurance vie.
Le marché de l’assurance vie suit la tendance à la baisse des années précédentes. Le taux moyen du fonds euros pour 2016 devrait finalement se situer entre 1,80% et 1,85%, en baisse de 0,45 point par rapport à 2015, selon les estimations de Cyrille Chartier-Kastler, président de Facts & Figures.
L’année 2016 a également été marquée par l’entrée en vigueur de la loi Sapin II qui aurait conduit à une "baisse de rendement supérieure de 0,10% à 0,15% à ce qu’elle aurait normalement être due », selon C. Chartier-Kastler. En effet, Sapin II introduit la possibilité pour les régulateurs de moduler les dotations et les prélèvements réalisés par les assureurs-vie sur leurs provisions pour participation aux bénéfices (PPB). « Avec la loi Sapin II, l‘ACPR a visiblement demandé aux assureurs de baisser significativement les taux servis à leurs épargnants sur les fonds euros en 2016. Comme les actifs financiers ont généré des rendements financiers très corrects, entre 2,80% et 4,00%, l’écart entre les taux servis et le rendement des fonds a permis de renforcer la provision pour participation aux bénéfices », pointe l’analyste.
Lotfi Elbarhdadi, directeur senior pour le marché assurance chez S&P Global Ratings, partage la même opinion : « Nous pensons que les taux de rendement comptables des assureurs n’ont pas chuté de façon aussi importante que les taux servis dans les fonds euros. Donc forcément, la différence entre les deux ils ont préféré la mettre majoritairement en provision pour participation aux bénéfices. Il y a donc une augmentation de la prudence par rapport aux années précédentes ». La provision pour participation aux bénéfices moyenne devrait dépasser 3% des encours, selon les observateurs.
Le bloquage des rachats mal perçu par les épargnants
Deuxième disposition de la loi Sapin II qui a perturbé le marché de l’assurance vie : la possibilité pour le régulateur de bloquer les rachats en cas de crise grave. Cette disposition figure de longue date dans le code monétaire et financier, mais à la suite de la loi Sapin II les arbitrages ou des demandes d’avance pourront également être bloquées. Des dispositions qui n’ont pas été bien perçues par les épargnants. Selon Marc-Philippe Juilliard, directeur european financial services de S&P Global Ratings : « La loi Sapin II a été voté fin 2016 et donc l’impact n’est pas mesurable à ce stade mais c’est quelque chose que nous allons suivre au cours de l’année 2017 pour voir si auprès d’une clientèle haut de gamme, elle peut avoir une influence négative sur la collecte et/ou sur les rachats ».
Le marché de l’assurance vie est en diminution de 8Mds€ en 2016. Ainsi, la collecte nette atteint les 16,8 Mds € en 2016 alors qu’en 2015 elle était de près de 25 Mds €. Cette réduction de la collecte nette peut répondre à plusieurs facteurs : « Nous avons une population d’assurés qui vieillit et donc une proportion de plus en plus importante d’assurés qui vont reprendre de l’argent sur leur police d’assurance vie, notamment pour compléter la retraite », considère M-P. Juilliard. Selon Cyrille Chartier-Kastler : " Il n’y a pas d’inquiétude à avoir par rapport à l’augmentation des rachats en 2016 car les rachats sont liés aux encours. Comme la masse des encours augmente, de façon mécanique les rachats augmentent. C’est tout à fait normal ".
La diversification a porté ses fruits
La part des fonds euros dans la collecte nette a considérablement diminué en 2016, passant de 11,3Mds € en 2015 à 2,7Mds € en 2016. Les stratégies des assureurs pour encourager les épargnants à transférer leur épargne vers les unités de compte ont porter leurs fruits, même si la part des UC dans la collecte brute n’a augmenté que très légèrement. « Une des grandes questions pour 2017 est de savoir si les assureurs parviendront à dépasser ce seuil psychologique de 20% d’unités de compte dans la collecte brute, ou au contraire, et alors on pourrait considérer que nous avons atteint un plafond », s’interroge Marc-Philippe Juilliard.
Hausse graduelle des taux
Depuis quelques mois, le taux obligataire de l’OAT 10 continuent leur progression à la hausse : il était de 0,093% en septembre 2016 et se situe aux alentours de 1,10 le 1er février 2017. S&P Global Ratings projette une hausse graduelle des taux obligataires d’entre 20 et 30 points de base en 2017. « Le meilleur scénario pour les assureurs c’est une hausse graduelle. En cas d’augmentation brutale des rachats, les assureurs pourraient se retrouver dans une situation où ils vendraient leurs obligations à perte. Cela pourrait avoir un effet négatif », conclut Lotfi Elbarhdadi.
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