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Cercle Lab : Retour sur la 2ème réunion du club RH (saison 2020-21)

mardi 22 décembre 2020
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Au club RH du Cercle Lab, Frédéric Pauthier, DRH de la MGEN, et Thierry Tisserand, représentant CFDT de la branche de l’assurance, ont présenté leur vision sur l’avenir des espaces de travail dans un monde post-covid, en présence de Bénédicte Crété-Dambricourt, DRH du Groupe Groupama et marraine du club RH cette année.

Le club RH du Cercle Lab s’est réuni le 18 décembre pour aborder la question de l’évolution des espaces de travail dans les prochaines années. En effet, la crise sanitaire et le confinement ont bouleversé l’organisation des entreprises. L’unité de temps, lieu et action vole en éclats lorsque les salariés travaillent en mobilité et le bureau doit s’adapter aux nouvelles organisations.

Frédéric Pauthier, DRH de la MGEN, a partagé son projet de réaménagement du siège de la MGEN, square Max Hymans, à Paris. « Nous avons revu le projet, au regard de la crise sanitaire et des nouvelles organisations du travail, avec les outils collaboratifs et à distance. Nous avons fait évoluer notre projet initial, nommé Chrysalide. Les travaux commenceront en janvier 2021 et dureront 18 mois, indique Frédéric Pauthier. Le siège doit représenter l’identité de l’entreprise et du savoir-faire managérial. Les espaces de travail de demain seront des espaces hybrides. Le salarié doit être en capacité de travailler, au bureau, mais aussi à la maison, dans des tiers lieux, dans sa résidence secondaire…».

Interrogé sur l'utilisation des espaces, Frédéric Pauthier partage : « Quand on viendra au bureau, ce sera pour se voir, pour travailler ensemble. Le bureau sera un lieu de l’organisation des temps collectifs. Nous avons retravaillé notre projet avec ce regard. Les espaces de travail seront le cœur et l’animation de la communauté professionnelle, au service de la création de lien et de l’engagement. Nous avons tous rencontré des difficultés en cette période de télétravail à 100% pour conserver le lien et maintenir l’engagement dans la durée. Nous futurs locaux vont servir à créer du lien ».

S'adapter au travail hybride

Il convient d'améliorer l'organisation lorsque la moitié de l'équipe est à distance et l'autre moitié sur place. « Le travail hybride va être un peu la norme dans les prochaines années, avec une mixité des lieux de travail importante. Le manager va devoir continuer à se réinventer sur la façon de travailler, avec des équipes présentes et des équipes à distance. L’humain va prendre une place différente. On se verra sans doute moins physiquement mais on se verra mieux. C’est un défi pour les équipes managériales et les équipes RH qui sont chargées d’animer la vie en entreprise ». Gilles Emmanuel Bernard, président du Cercle LAB, considère que « suite au confinement, on redécouvre que les temps en présentiel sont rares et qu’il faut les optimiser ».

Autre conséquence de la crise, l'évolution des priorités de temps et d’organisation. « Par exemple, aujourd’hui, les réunions sont plus courtes. Dans la gestion des projets, une seule personne représente le service, là où avant il y avait trois personnes du même service. On a pris l’habitude de ne pas surconsommer du temps, d’optimiser et de prioriser », selon Frédéric Pauthier.

Optimiser le temps

Bénédicte Crété-Dambricourt, DRH de Groupama considère que « Avec le distanciel, nous faisons des réunions plus courtes, mais on en fait plus. Comme toute la chaîne hiérarchique n’est pas présente à la réunion, il y a de nouveaux modes de partage de l’information, des collaborateurs qui informent leur manager ou leurs collègues. Le collaborateur est donc responsabilisé, il est impliqué dans la réunion, avec des effets collatéraux positifs. Cela participe à l’autonomie et à la responsabilisation du collaborateur ».

Place aux activités collectives

Pour chaque activité, la question se pose. S’agit-il d’une activité collective ou individuelle ? L’espace de travail va s’adapter. « Dans les prochaines années, les entreprises vont devoir adapter leurs espaces de travail afin d’accueillir beaucoup plus d’activités collectives », pense Frédéric Pauthier.

La MGEN a également passé de 450 collaborateurs en télétravail en mars à 4.500 aujourd’hui. « Nous avons gagné du temps sur l’avenir, nous avons accéléré certaines transformations informatiques. Nous allons passer à 5.500 personnes en capacité de télétravailler fin décembre. Ce sont des transformations d’espace, de temps, de priorité qui visent à remettre l’humain au cœur de l’organisation ».  L’accord de télétravail de la MGEN prévoit au maximum 90 jours de télétravail par an, avec au moins deux jours de présence sur le lieu de travail.

Sommes-nous plus productifs en télétravail ?

Sommes-nous plus productifs en télétravail ? Pas pour tout, selon les participants présents au club RH. « Nous sommes plus productifs pour les travaux de fond, qui demandent de l’attention, du calme, etc. Par contre, le télétravail présente des limites pour le travail collectif », indique Frédéric Pauthier.

Selon Bénédicte Crété-Dambricourt, le télétravail intégral n’est pas une solution pérenne. « Quand l’activité des flux entrants baisse de 60%, les collaborateurs peuvent être en télétravail, mais l’autonomie dans le poste de certains d’entre eux est perfectible. Nous avons constaté des qualités de service qui avaient baissé pendant le premier confinement, des délivrés de projets SI qui n’étaient pas au rendez-vous par exemple. Ce constat, partagé avec les partenaires sociaux, fait que nous n’avons pas eu de difficultés à demander à certaines activités de revenir deux à trois jours par semaine sur site, parce qu’il y avait une donnée économique qui a été entendue ».

Un accélérateur des nouvelles organisations

Les DRH ont une vision prospective de l’organisation du travail. Pour Frédéric Pauthier, « cette crise est un vrai accélérateur dans la mise en œuvre des technologies pour permettre ces évolutions. C’est aussi un véritable choc culturel. Nous avons signé un accord sur le télétravail après le premier confinement. La vision des partenaires sociaux a beaucoup évolué sur ces sujets. Cela a facilité le consensus, notamment chez les plus réticents au télétravail. Cette crise a également révélé quelques marges de progression en matière de systèmes d’information. Nous avions certainement du retard et cette crise nous a permis finalement de gagner du temps ».

L'appropriation des outils collaboratifs

Au-delà des aspects mobiliers, l’aspect digital est central : sur ce point on est plutôt dans une gestion dématérialisée des outils et pas encore tout à fait dans l’appropriation de leur volet collaboratif par les équipes. Il convient d’améliorer cet aspect, en matière de maitrise des outils de partage d’information, de gestion de projet : c’est un point qui nécessite d’être accompagné afin de structurer son organisation.

Le risque pour les collaborateurs est de tomber dans une hyperconnexion ou hypersollicitation, par une multitude de canaux : mail, sms, Teams, WhatsApp et autres. « Quand vous êtes en mobilité au sein d’un même groupe, le fait que ces outils et méthodes de gestion de projet se ressemblent constitue un atout », indique Bénédicte Crété Dambricourt.

Flex-office ou pas ?

Pour ses futurs locaux, la MGEN n’a pas fait le choix du flex-office, mais du flex-ready, c’est-à-dire, que l’entreprise peut passer en flex-office quand elle le souhaite. Le futur siège accueillera les fonctions informatiques qui sont aujourd’hui au Kremlin-Bicètre. Les équipes métier et informatiques vont donc être amenés à travailler ensemble physiquement.  « Nous n’allons pas retrouver l’étage de la DRH, l’étage de l’informatique…Nous sommes en train de travailler sur le Macrozoning, afin de metrre beaucoup plus de transversalité et d’agilité pour rendre un service plus efficace pour tout le monde », explique Frédéric Pauthier.

Chez Groupama, là où il est expérimenté, le flex-office se fait par équipes. « Les collaborateurs connaissent la personne qui va venir s’assoir sur le bureau d’à côté. Le salarié reste dans un même environnement, avec ses repères, et le manager a les équipes à proximité. Le bureau est ainsi conçu pour accueillir davantage que pour héberger », partage Bénédicte Crété-Dambricourt.

Comment éviter le vide ?

Parmi les enseignements de cette période, une réflexion est à mener sur le dimensionnement des espaces de travail au regard de l’essor du télétravail afin d’éviter des retours sur des sites peu occupés. « Il y a un enjeu sur la convivialité », pointe Bénédicte Crété-Dambricourt.

Les mythes sur le télétravail

Le deuxième confinement a permis de démentir certains mythes sur le télétravail. En juin, beaucoup de collaborateurs ne voulaient pas revenir sur site . Aujourd’hui, une bonne partie des salariés souhaitent revenir au bureau, retrouver les collègues, leur vie sociale professionnelle. « Nous devons être attentifs à ne pas trop normer la vie de l’entreprise. Le manager ne peut pas passer son temps à planifier qui est là, quelle animation prévoir. Les modèles changent, les espaces et les outils sont plus collaboratifs, on vient au bureau dans des temps et des espaces dédiés, mais il faut aussi laisser sa place à la spontanéité si on ne veut pas perdre en convivialité », selon Bénédicte Crété-Dambricourt.

Plus d’autonomie pour le collaborateur

Frédéric Pauthier confirme : « Je pense qu’il faut faire confiance aux équipes et les laisser expérimenter des organisations du travail. J’ai la chance de bénéficier de 18 mois de travaux. Ils trouveront eux-mêmes de nouvelles organisations. Je crois plus à une efficacité d’équipe qu’à une règle imposée. Je suis convaincu que dans la nouvelle organisation, nous aurons des personnes qui occuperont le même poste toute la journée, 5 jours sur 5 et d’autres personnes qui ne seront présentes que deux ou trois jours par semaine et qui n’auront pas de difficulté à partager leur bureau avec d’autres », indique Frédéric Pauthier.

L'importance de la qualité des relations interpersonnelles

Pour Norbert Girard, secrétaire général de l'OEMA, « il faut revenir à un sport d’équipe, revenir à un travail collectif, véritablement collaboratif, et sortir des approches individualisantes. Le flex office d’équipe permet de maintenir le lien à l’intérieur d’une communauté, sachant qu’une communauté n'est pas forcément composée de personnes qui font toutes le même métier. Avec la révolution servicielle, il est important de ré-allouer de l’autonomie aux individus pour qu’ils puissent aboutir au résultat attendu. Cela passe par la qualité des relations interpersonnelles. L’engagement, qui se gagne sans pouvoir s'imposer, est gage de performance économique ».

Les risques d'un télétravail trop étendu

Thierry Tisserand, secrétaire Général Adjoint de la fédération CFDT des Banques et Assurances (FBA CFDT), considère que le télétravail 5 jours sur 5 n’est pas tenable. Il dénonce des situations de burn-out, de bore-out et des salariés en grande dépression. Certaines entreprises ont mis en place des lignes d’écoute téléphonique pour accompagner les salariés en souffrance. La majorité d’entreprises de l’assurance a mis en place des accords qui prévoient entre 2 et 3 jours de télétravail par semaine. Il cite l’entreprise Boursorama, qui veut imposer le télétravail à 90% à 800 salariés. Les OS ont demandé que ce soit un accord expérimental sur une durée d’un an. « Nous nous interrogeons sur les conditions de travail pour les salariés, le risque d’isolement, le maintien du lien collectif.... A la CFDT, nous n’avons jamais été des acharnés du télétravail. Nous avons toujours vu les dangers que cette nouvelle forme d’organisation. Les salariés se sont bien adaptés au télétravail pendant le premier et le deuxième confinement, non sans difficulté. Y compris pour les organisations syndicales qui ont eu du mal à communiquer avec les salariés », indique-t-il. « La vision du télétravail n’est pas toujours positive chez les salariés. Beaucoup de salariés souhaitent revenir voir leurs collègues, déjeuner ensemble à midi. Les salariés ont pris conscience de la dimension sociale du travail, surtout après ce deuxième confinement », indique Thierry Tisserand.

Carole Stiegler, d’Orange Business Services, a témoigné sur l’échec des quelques autorisations accordées à certains collaborateurs pour venir travailler sur site pendant le confinement. L’isolement est encore plus fort dans un bureau complètement déserté que chez soi.

« Nous avons fait un bond de plusieurs années dans l’adaptation des organisations au télétravail. Nous pensons que les solutions mises en place dans les entreprises sont assez équilibrées. Cela dit, les organisations syndicales, nous considérons qu’il faudra qu’on pose plus de diagnostics, car nous n’avons pas assez de recul. Nous sommes en train de négocier un accord de télétravail au niveau de la branche et nous aimerions qu’il rappelle quelques fondamentaux comme le droit à la déconnexion », soutien Thierry Tisserand.

Risque d'hyper-connexion

Une représentante du club RH partage ses difficultés afin de faire respecter le droit à la déconnexion dans son entreprise. Elle envisage de déconnecter les systèmes d'information entre 20h et 6h du matin. Cette solution radicale n'a pas rencontré beaucoup d'adhésion parmi les autres participants du club RH, qui défendent la liberté des salariés d'organiser leur temps de travail.

Certains collaborateurs regrettent même les temps de trajet, considérés comme des sas de décompression. Ce temps dédié permet selon certains collaborateurs de créer une transition entre la vie personnelle et professionnelle, d’avoir des repères, de cadencer la journée. Cela conforte Groupama dans son choix de proposer un équilibre avec 2 jours de télétravail maximum par semaine.

Des réunions de 50 minutes

Frédéric Pauthier insiste sur l’importance « des temps intermédiaires, qui nous permettent de passer d’une salle à l’autre, avec des couloirs, où on va croiser des gens, échanger un mot… ce sont des rites de passage, des sas de préparation… ». Certains collaborateurs de la MGEN ont donc décidé de faire des réunions de 50 minutes, afin d’avoir un temps de pause entre deux réunions, lire un journal, se faire un café. « Je pense qu’il y a des rites nouveaux à trouver dans le cadre du travail à distance. J’ai demandé à la DSI de travailler sur la possibilité d’organiser des réunions de 50 minutes via les outils d'agenda », annonce Frédéric Pauthier.

Les entreprises sont très vigilantes sur l’hyper-connexion. 75% des collaborateurs de Groupama déclarent se ménager des temps de pause, selon une étude récente. Les entreprises partagent des conseils d’organisation d’une journée de télétravail auprès des collaborateurs afin de rappeler les règles, les temps de pause obligatoires...

Des activités annexes

Les DRH ne pensent pas que la période est propice à l’investissement de son temps personnel pour une finalité professionnelle comme entretenir ses réseaux, assister à des webinaires, se former… « Nous avons stoppé ces réflexions. Nous sommes encore en période de crise, il faut aller à l’essentiel. Delphine Dupuis, DRH du groupe Vyv a créé des moments de respiration pour offrir de nouvelles clés de lecture aux collaborateurs. Pendant une heure tous les 15 jours, un philosophe fait une conférence en visio-conférence. Je pense que ce genre d’initiatives auront tout leur intérêt dans 18 mois ou 2 ans. Aujourd’hui, nous sommes tournés vers faire le travail pour que l’entreprise tourne », déclare Frédéric Pauthier. Groupama a organisé pour ses dirigeants une formation sur le leadership de la voix, avec Cyril Delhay, spécialiste de l’art oratoire.

Gaëlle Le Gloanec, DRH de Planète CSCA, confirme une évolution des pratiques et des prises de conscience sur le télétravail entre le premier et le deuxième confinement. Elle affirme que dans la branche du courtage, les salariés ont profité de cette période pour se former professionnellement.

Des enquêtes sur le moral des collaborateurs

Karine Usubelli, DRH d’Entoria, a également misé sur la formation. Sur les temps de respiration, « j’encourage les membres du comité exécutif à participer aux événements du Cercle LAB qui peuvent être des moments de respiration et d’inspiration », affirme Karine Usubelli.

La DRH d’Entoria insiste sur l’impact de la communication : « Je ne me suis jamais sentie aussi proche des collaborateurs de l’entreprise. J’envoie d’un à deux mails par jour, des mails d’inspiration, sur les bonnes pratiques, sur les projets stratégiques de l’entreprise… Et j’organise régulièrement des enquêtes Pulse pour prendre le pouls de l’entreprise. 84% des salariés se sont déclarés engagés, avec 316 commentaires auxquels je peux répondre, de façon anonyme. Ce temps de mesure de nos actions est important ». Groupama réfléchit à inscrire dans la durée ces nouveaux modes de communication mis en place pendant le confinement, car l’impact économique sur les clients va se faire sentir dans les prochaines années et il convient de maintenir le moral et l'engagement des collaborateurs.

Les différents participants au Cercle LAB ont témoigné des effets positifs de la campagne d’appels téléphoniques réalisée pendant le premier confinement pour prendre des nouvelles des assurés. Cela a permis de rappeler le sens du métier d’assureur et de souder les équipes. "Le confinement a montré la capacité des collaborateurs à s’adapter. Ce qui fait que nos organisations sont résilientes est lié au sens notre métier de service", selon Frédéric Pauthier.

La prochaine réunion du club RH aura lieu le 4 février.

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