Confinement : Un an de malaise pour les assureurs
Il y a un an, la France entrait en confinement généralisé. Le début d'une période de tourments pour le secteur de l'assurance
Le 16 mars 2020, le chef de l'État s'adressait aux Français pour annoncer le confinement du pays. Dès le lendemain, l'ensemble de la population passe en télétravail. Le secteur de l'assurance n'échappe pas à la règle. Et hormis quelques services comme le courrier, tous les salariés passent en travail à distance, non sans quelques difficultés de mise en place opérationnelle. En urgence, des centaines de PC portables sont commandés pour permettre aux collaborateurs de travailler depuis leur domicile. « Comme nous passions tous par les mêmes plateformes d'achat, nous avons rapidement fait face à une pénurie. Je me rappelle que nous avons fait le tour des Darty et des Fnac pour nous approvisionner », se remémore un dirigeant.
Sur les réseaux sociaux, les messages rassurants se multiplient et plus particulièrement en provenance des distributeurs. Agéa et Planète CSCA affirment que la continuité de service est assurée bien que les cabinets et les agences soient contraintes de rester portes closes. Les premières heures sont donc dévolues à l'adaptation à ce contexte inédit de mise sous cloche du pays. Du côté des experts d'assurance, le tout à distance devient également la norme. « Avec la visio-expertise, l’activité devrait pouvoir se poursuivre quasi-normalement », déclarait alors Christophe Arrebolle, PDG de Stelliant dans nos colonnes.
Mais il ne faudra pas attendre longtemps avant que les premières polémiques se fassent jour. Dès le 18 mars, Bertrand de Surmont, président de Planète CSCA appuie sur le sujet de la perte d'exploitation. « La question de la perte d’exploitation sans dommages de nombreux clients va très vite se poser. Nous sommes conscients des importants montants engagés et des positions des assureurs sur ce point, mais nous ne pouvons pas concevoir que rien ne soit fait. Si la garantie de l’État ne semble pouvoir jouer en pareil cas, pourquoi ne pas envisager la création d’un fonds de secours ou d’un système d’indemnisation, même partiel ? D’autant que ce sujet de la PE sans dommage est sous-jacent depuis plusieurs mois, entre épisodes des gilets jaunes et grèves prolongées », souligne-t-il.
Les assureurs non-vie sous le feu des critiques
Les représentants des industries de l'hôtellerie montent d'ailleurs rapidement au créneau. Toujours le 18 mars, l'UMIH s'interroge : « L’attitude des assurances dans cette crise nous interroge beaucoup. Où sont-elles ? Pas auprès de leurs assurés ». Dès le lendemain, la FFA annonce plusieurs mesures de soutien aux TPE. Les assureurs s'engagent ainsi à maintenir les garanties des contrats en cas de retard de paiement. Le 23 mars les assureurs annoncent qu'ils abonderont à hauteur de 200M d'euros le fonds de solidarité mis en place par le gouvernement. Ils seront suivis de 200 millions supplémentaires le 10 avril. Au total, les gestes de solidarité consentis par les assureurs dépasseront les 3Mds d'euros. Mais rien n'y fait. Les saillies de parlementaires, les sorties médiatiques de restaurateurs, les assignations devant les tribunaux ou les injonctions des pouvoirs publics à faire plus ont mis à mal l'image de l'assurance quand bien même l'ACPR affirme que 92% des contrats sur le marché ne couvrent pas les pertes d'exploitation sans dommages.
A cette crise d'image s'ajoutent des dissensions au sein même de la FFA entre les bancassureurs et les autres familles. La prime mutualiste annoncée par les ACM suscitent alors une vive polémique au sein de la fédération. Certains membres allant jusqu'à réclamer la tête du bancassureur.
Enfin, les travaux sur le régime catex, qui auraient pu permettre à l'assurance de redorer son image, n'aboutiront pas. Après 4 réunions avec le Trésor et plusieurs versions du projet porté par la FFA, Bruno Le Maire, ministre de l'Economie, des Finances et de la Relance tue l'initiative dans l'oeuf reportant les débats sine die.
Au tour des complémentaires
Dans ce tohu bohu, les assureurs santé passent, au début de la crise, sous les radars des critiques. Mais c'était sans compter sur le gouvernement. Le 3 septembre, ce dernier, à la recherche de recettes pour combler le déficit abyssal de la Sécurité sociale qui s'annonce, convoque les représentants des complémentaires. Il leur fait part de son intention de leur imposer une contribution d'1,5Md d'euros. Les pouvoirs publics estiment en effet que les organismes complémentaires ont réalisé des économies sur les dépenses de santé durant la crise. Sans surprise, FNMF, CTIP ou encore Fnim sont vent debout contre ce qui sera rebaptisé Taxe Covid. Mais en vain. Le projet de contribution est voté dans le cadre du PLFSS 2021. Il prévoit le versement d'1Md d'euros au titre de 2020 et au moins 500M au titre de 2021. Ces derniers jours, le gouvernement a d'ailleurs brandi la menace d'une hausse de cette contribution pour 2021.
Un an après le premier confinement, les assureurs se positionnent désormais comme acteurs de la relance. Ils doivent ainsi concourir, en tant qu'investisseurs, aux prêts participatifs lancés par le gouvernement. Mais plusieurs détails restent encore à régler avant de prendre leur plein part dans ce dispositif destiné à investir dans les PME et ETI en quasi fonds propres. Du côté des résultats publiés à ce jour, le mot clé répété à l'envi est celui de résilience. La crise aura ainsi largement détérioré l'image du secteur, mais sur le plan prudentiel, les fondamentaux ont demeuré.
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