Consultations psychologiques : Quel coût pour les complémentaires ?

mardi 13 avril 2021
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Albert Lautman, DG de la Mutualité Française, précise la mise en oeuvre du dispositif de remboursement des consultations psychologiques, dont le coût est estimé entre 140 et 180 millions d’euros en année pleine pour l’ensemble des organismes complémentaires. 

Albert Lautman, directeur général de la Mutualité Française, a précisé devant les journalistes de l’Association de journalistes de l’information sociale (AJIS), la mise en œuvre du remboursement des consultations psychologiques. En effet, la Mutualité Française, la Fédération française de l’assurance et le Centre technique des institutions de prévoyance ont annoncé un accord de place pour rembourser au 1er euro des consultations psychologiques, dans la limite de 4 séances à 60 euros chacune. Cette « mesure d’urgence » s’inscrit dans un contexte de crise sanitaire et est, pour l’heure, circonscrite à l’année 2021. « C’est une mesure simple et lisible. Nous sommes convaincus que le taux de recours est lié à la simplicité du dispositif, tant pour les médecins que pour les patients. On a voulu aller vite. Cela n’empêche pas de continuer à travailler avec l'Assurance Maladie sur des solutions pérennes, avec un cofinancement des complémentaires », indique Albert Lautman.

Augmenter le taux de recours

Actuellement, 25% des mutuelles proposent déjà un remboursement au premier euro des consultations psychologiques, selon Albert Lautman, souvent sous forme de forfait et après présentation de facture. Mais « les taux de recours sont assez faibles. On espère que cette mesure générale va permettre de débloquer un certain nombre d’expérimentations, indique le directeur général de la Mutualité Française. Nous avons évalué le coût pour l’ensemble des organismes complémentaires de 140 à 180 millions d’euros en année pleine. Cela revient de 4 à 7 euros par personne protégée. C’est un coût maîtrisé », précise le DG de la FNMF.

Un investissement rentable

« L’investissement est rentable pour les complémentaires. Des études montrent qu’investir un euro dans le soin psychologique permet d’économiser entre 1,5 et 1,9 euros dans d’autres domaines de santé », commente Frank Bellivier, délégué ministériel à la santé mentale et à la psychiatrie.

Le dispositif des complémentaires s’est inspiré d'une expérimentation menée par la Cnam depuis 2019 afin de prendre en charge des consultations psychologiques à 22 euros. L'expérimentation, menée actuellement dans un nombre limité de départements, s'adresse uniquement à des personnes présentant des troubles faibles à modérés. Au total, 250.000 séances ont été prises en charge au niveau national. En Haute-Garonne par exemple, 141.000 séances ont été remboursées et 600 psychologues sont inscrits au dispositif.

L'orientation du médecin

Pour bénéficier de la prise en charge de l'Assurance Maladie, il est nécessaire de disposer d'un adressage du médecin traitant. Cette condition est également imposée par les complémentaires et critiquée par les syndicats de médecins. Albert Lautman précise : « Il faudra une lettre d’orientation du médecin généraliste pour actionner le remboursement. En revanche, les mutuelles qui remboursaient déjà les consultations psy sans orientation du médecin généraliste dans le cadre de forfaits vont continuer à le faire. L’idée est d’apporter des solutions en montrant qu’il y a un lien entre santé mentale et santé tout court ».

Dispositif facultatif pour les ocam

Certains organismes comme Malakoff Humanis, Klésia ou Generali ont déjà annoncé la mise en œuvre du remboursement pour leurs assurés. FFA, CTIP et FNMF devraient publier dans quelques jours des recommandations à destination de leurs adhérents pour faciliter la mise en place du remboursement. Cependant, « s’agissant d’un accord de place, c’est une proposition. Notre souhait c’est que toutes les complémentaires y participent, mais c’est sur la base du volontariat de chaque organisme », précise Albert Lautman.

Psychologues vérifiés

Les fédérations sont actuellement en discussion avec les syndicats de psychologues et de médecins généralistes pour affiner les modalités de mise en œuvre. « Nous ne sommes pas favorables à la prescription médicale, mais nous souhaitons travailler en bonne intelligence avec les mutuelles. Nous avons notamment demandé de limiter le dispositif aux psychologues vérifiés. Il faudra donc renseigner le compte Adeli du professionnel pour pouvoir bénéficier d’une prise en charge », indique Patrice Bouchaïb, président du syndicat national des psychologues et psychothérapeutes (SNPP).

Par ailleurs, Albert Lautman a annoncé des travaux avec les psychologues « sur l’évaluation du dispositif. Nous souhaitons faire un bilan à la fin de l’année avec les psychologues et les médecins. Nous avons besoin des psychologues pour envisager sur la suite ».

« L’enjeu c’est de construire des parcours. La prescription ou l’adressage du médecin est donc nécessaire pour s’assurer que l’acte soit intégré dans un parcours de soins, indique pour sa part Frank Bellivier. L’offre détermine la demande. Nous sommes en France dans une culture qui stigmatisait les soins psychologiques. L’engagement des mutuelles, médecins, Cnam participe à la reconnaissance des soins psychologiques ».

Vers une pérennisation de la prise en charge ?

La question qui se pose est celle de la pérennisation des différentes expérimentations menées au niveau de la Cnam ou par les organismes complémentaires. « La participation des complémentaires déverrouille quelque chose. Malheureusement, 4 consultations ne sont pas suffisantes. Dans l’expérimentation de la Cnam, nous nous sommes rendu compte qu’il n’y avait pas de suite prévue, alors que la prolongation de la prise en charge psychologique dans la durée est essentielle pour les patients », indique Patrice Bouchaïb.

Le gouvernement prépare pour juin prochain des Assises sur la santé mentale qui devraient adresser différents aspects comme la prévention de la souffrance psychique, la santé mentale des jeunes ou encore l’offre des jeunes pour les personnes porteuses d’handicap psychique. « Il est possible que les travaux des assises, dans le sens d’une généralisation de la prise en charge, s’engagent dans le prochain PLFSS. Cela pourrait se traduire, au minimum, par un nombre plus important de microstructures d’exercice pluri-professionnel. Au maximum, par une généralisation de l’expérimentation de la Cnam », indique Frank Bellivier. Cependant, le délégué interministériel ne pense pas que « les conditions soient réunies », pour envisager un co-financement par l’assurance maladie et les complémentaires dans le prochain PLFSS car cela impliquerait de « conventionner les psychologues » et cela nécessite d’imaginer que « des garanties de formation soient fournies ».

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