Covid-19 : Des arrêts de travail dérogatoires pour les cas contact
Nicolas Revel, directeur général de la Cnam, détaille le fonctionnement du mécanisme de Contact Tracing et explique que les personnes en contact avec des malades du Covid-19 peuvent bénéficier d’un arrêt de travail dérogatoire.
Depuis ce mercredi 13 mai, les médecins ayant diagnostiqué une personne atteinte de Covid-19 sont priés de le signaler à l’Assurance Maladie via un téléservice. Le décret d’application n° 2020-551 du 12 mai précise les deux traitements des données personnelles qui doivent permettre l'identification des chaînes de contamination du virus covid-19 et assurer le suivi et l'accompagnement des personnes.
Une brigade sanitaire composée de 6.500 agents de l’Assurance Maladie sera chargée de contacter le malade atteint de Covid-19 et, grâce à sa collaboration, d'appeler toutes les personnes avec lesquelles il a été en contact renforcé pendant les 48 heures précédant l’apparition des symptômes.
Les « cas contact » seront ensuite isolés et testés systématiquement. Nicolas Revel, directeur général de la Cnam, a précisé lors d’une rencontre en visioconférence avec l’AJIS (association de journalistes de l’information sociale), que le système dispose de « garanties juridiques fortes » puisque que les malades comme les cas contacts « ne sont pas contraints à rien » et « peuvent demander que leur nom soit supprimé du registre contact covid ».
Pour Nicolas Revel, l’efficacité du dispositif dépendra de la réactivité du patient qui ne doit pas tarder pas à aller voir son médecin, passer un test virologique dans les 24 heures afin d'obtenir le résultat 24 heures plus tard. Le dispositif est basé également sur l’accompagnement téléphonique des personnes qui sont sujettes à isolement.
Trois scénarios
Nicolas Revel a détaillé trois situations différentes de cas contact : La personne qui habite dans le même foyer que la personne malade doit rester isolée pour une durée qui dépassera le dernier jour où le malade est considéré comme encore contaminant. "En effet, la personne habitant dans le même foyer peut avoir contracté le virus le dernier jour où le malade était contaminant", explique Nicolas Revel. Dans ce cas là, le médecin qui a initié le processus peut prescrire un arrêt de travail dérogatoire pour toutes les personnes du domicile qui ne peuvent pas télétravailler.
Deuxième situation, les cas contact en dehors de la cellule familiale, s’ils présentent des symptômes, seront testés tout de suite et s'ils sont positifs, se feront prescrire un arrêt de travail en tant que malades.
Troisième situation. Les cas contact qui ne présentent pas de symptômes et qui n’habitent pas le même foyer, devront rester isolés jusqu’à la date de réalisation du test. Cette date n’est pas immédiate car il faut attendre sept jours après le contact avec le malade pour que le test soit efficace. Si le test est positif, la personne sera invitée à rester isolée. Si le résultat est négatif, l'isolement est maintenu sous une forme allégée, jusqu’à 14 jours après le contact. La personne pourra sortir mais avec masque impérativement. La personne asymptômatique qui ne peut pas télétravailler se verra prescrire un arrêt de travail de 14 jours. Le service médical de l’Assurance Maladie va lui délivrer directement l’arrêt de travail dérogatoire, sans nécessité de passer par un médecin.
Quel rôle pour l'assurance maladie complémentaire ?
L’Assurance maladie a été en première ligne de la crise du coronavirus. Elle prend en charge à 100% les actes de téléconsultation, les test, les masques, les aides compensatoires pour les médecins libéraux en baisse d’activité ou encore les primes à destination des professionnels du grand-âge. Nicolas Revel a été interrogé sur le rôle de l’assurance maladie complémentaire dans la prise en charge de l’épidémie. « Nous avons considéré que nous avions vocation à prendre en charge à 100% un certain nombre de choses. On verra ensuite derrière, dans le dialogue que nous avons avec les complémentaires, s’il y a lieu de se poser un certain nombre de questions, mais à ce jour je n’ai pas d’éléments précis à apporter », a répondu le directeur général de la Cnam.
L’Assurance Maladie a enregistré jusqu'à présent 300.000 demandes de professionnels de santé souhaitant une compensation financière pour baisse d’activité, pour un montant d’environ 300.000 ou 400.000 millions d’euros. Ce montant va évoluer fin mai, puisque les professionnels de santé pourront à nouveau envoyer une demande de compensation pour la baisse d’activité du mois de mai.
Décollage spectaculaire de la téléconsultation
L’Assurance Maladie a enregistré pendant le confinement environ un million d'actes de téléconsultation par semaine. 45.000 médecins se sont appropriés la pratique de la téléconsultation. Plus de 85% des téléconsultations se font entre des médecins et des patients qui se connaissent. « Le modèle était bon. L’Assurance maladie avait la conviction que la téléconsultation ne devait pas devenir le segment spécialisé de quelques médecins qui ne feraient que ça, dans la logique de plateformes industrielles, orientant ainsi les patients vers certains médecins spécialisés et pas vers leur médecin. J’ai toujours pensé que la téléconsultation était pertinente dans une relation thérapeutique où elle alterne le presentiel et le à distance. La téléconsultatin doit s’insérer comme un instrument dans la palette du médecin quand il doit consulter en urgence ou éviter un déplacement long pour des patients chroniques avec lesquels il a une relation dans la durée. Pour moi, la téléconsultation en urgence et en dépannage doit toujours être un élément secondaire », considère Nicolas Revel.
Quel avenir pour la téléconsultation à 100%?
« La téléconsultation sera remboursée à 100% au-delà du 31 mai », a dit Nicolas Revel. Concernant la date de fin de cette prise en charge à 100%, Nicolas Revel répond : « Je ne connais pas la date à laquelle les consignes de distanciation sociale seront complètement levées ».
La téléconsultation sera-t-elle prise en charge à 100% après la crise du Covid-19 ? « Si on devait considérer que la téléconsultation avait vocation à rester à 100%, il faudrait en justifier la raison. Cette raison était évidente pendant l’épidémie car nous avons demandé aux gens de rester chez eux. Or, la téléconsultation peut être complexe à opérer en termes de facturation parce que la carte vitale ne peut pas être lue par le médecin, l’avance de frais ne peut pas être faite facilement, et le tiers payant ne peut pas être facile à opérer puisque le médecin ne connaît pas toujours le patient et ne peut pas déclencher la part complémentaire. Cela avait donc beaucoup de sens de passer la téléconsultation à 100% pendant l'épidémie. En revanche, si on passait à 100% la téléconsultation par la suite, elle aurait une prise en charge plus importante qu’une consultation présentielle. Pourquoi une téléconsultation devrait être mieux remboursée qu’une consultation présentielle ? Je ne trouve pas cela complètement intuitif. Il faudrait trouver un raisonnement médical », s’interroge Nicolas Revel.
Nicolas Revel a également dit que les actes de téléconsultation ou télésoin pratiqués par les sages-femmes, des masseurs kinésithérapeutes, des orthophonistes, les pharmaciens « ont vocation à durer » après l’épidémie. Pour cela, après la crise du coronavirus, il faudra suivre la procédure classique : une évaluation de la HAS et un travail conventionnel pour fixer les tarifs et les conditions de réalisation.
Nicolas Revel a dit que des discussions interministérielles sont en cours en vue de reconnaître le covid-19 comme maladie professionnelle.
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