Dépendance : Les assureurs appellent à la prudence
Dans la perspective de la future loi sur la dépendance, le Cabinet Optimind organisait mardi un débat sur l’assurance dépendance. Un produit qui demeure particulièrement compliqué à commercialiser.
En réunissant AG2R La Mondiale Matmut, pionnier de l’assurance dépendance individuelle il y plus de trente ans, Crédit Agricole Assurances, sur le segment depuis vingt ans, CNP Assurances, réassureur de certaines mutuelles de la fonction publique proposant une garantie dépendance annuelle en inclusion de la couverture santé, et Scor, la table-ronde donnait la parole à des acteurs bénéficiant d’une grande antériorité sur le sujet.
Les constats de ces acteurs sont assez unanimes, et très peu encourageants pour ceux qui voudraient se lancer : « L’assurance dépendance est un produit complexe, pas facile à vendre », explique Nicolas Heinrich, head of experience analysis french market chez Scor, rappelant que plusieurs générations de contrats se sont succédées, variant à la fois les garanties et les grilles d’évaluation, mais révélant à chaque fois des faiblesses.
Après la vente, mal aisée, de ce produit complexe et peu enthousiasmant qui nécessite plusieurs rendez-vous, peut survenir le sinistre, des dizaines d’années plus tard. Là encore, l’assureur va devoir faire œuvre de pédagogie. Car l’état de dépendance, partiel ou total, se mesure avec des échelles variables selon les assureurs. Elles restent à la main de chacun, ce qui ne rend pas le travail d’explication facile. « Il y a décalage entre le niveau de dépendance perçu par les assurés et le niveau de dépendance estimé par l’assureur », confirme Thomas Reynaud, responsable d’études actuarielles chez Crédit Agricole Assurances.
« Il peut y avoir une appréciation différente d’un médecin à l’autre, et pour un même médecin, d’un jour sur l’autre », ajoute Christine Abalin Castela, médecin conseil chez Scor. Pour autant, les assureurs présents à la tribune qui ont élaboré leurs méthodes d’évaluation "maison" disent leur réticence à l'idée d'opter pour un référentiel commun comme la grille AGGIR, utilisée pour l'octroi de l'APA.
Les difficultés à mesurer l’état de dépendance se traduisent par une relation commerciale parfois houleuse avec le client. Mais ces difficultés se répercutent aussi sur poids du risque dépendance, qui est à la fois long, lourd, et mal connu, et dont le coût est renchéri par la baisse des taux d’intérêt.
Il ne faut pas non plus négliger la complexité du suivi du risque, qui nécessite de prendre en compte de multiples variables : la mortalité des assurés autonomes, la date d’entrée en dépendance, la mortalité des personnes dépendantes, mais aussi l’évolution des niveaux de dépendance et l’effet de l’utilisation des différentes grilles, ainsi que le sexe et l’ancienneté dans le contrat. Autant de constats qui ont poussé tous les intervenants, y compris le réassureur Scor à prôner la plus grande prudence aux assureurs qui souhaiteraient se lancer sur le marché à la faveur de la loi dépendance.
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