FGAO : Les pistes pour lutter contre la non-assurance chez les jeunes
INFOGRAPHIES - Le nombre de victimes blessées par un conducteur non assuré repart à la hausse en 2022, selon le Fonds de garantie des victimes (FGAO). La moitié des conducteurs impliquée a moins de 30 ans.
Le FGAO a publié son baromètre annuel sur la non-assurance routière et organisé un colloque pour tenter de trouver des solutions. En 2022, le fonds a indemnisé 8.443 personnes, blessées par un conducteur non assuré. Le nombre de victimes augmente de 3,5% par rapport à 2021, après deux années de recul liée à la crise sanitaire. Julien Rencki, directeur général du FGAO, craint une augmentation de la non-assurance dans le contexte d’inflation actuel compte tenu du budget restreint des ménages.
Le nombre de victimes indemnisées n’a pas encore retrouvé le niveau de 2019. Ce repli depuis deux ans peut s’expliquer dans un contexte de baisse de l’accidentalité corporelle ou encore en raison de la montée en puissance du Fichier des Véhicules Assurés (FVA). En revanche, le nombre de victimes décédées à la suite d’un accident de la circulation provoquée par un conducteur sans assurance a augmenté de 11,3% entre 2019 et 2022.
En 2022, le montant des indemnisations aux victimes de la non-assurance atteint près de 107M d’euros, en augmentation de 2,1% par rapport à 2021. La hausse des frais médicaux et des salaires dans la branche de l’aide à la personne expliquent cette évolution.
Augmentation des accidents impliquant un EDP
Environ 5% des véhicules impliqués dans un accident corporel n’étaient pas assurés (contre 4,74% en 2021), d’après les estimations de la Base de données annuelle des accidents de la circulation routière. A noter que 4,13% des véhicules impliqués dans un accident provoqué par un conducteur non-assuré sont des engins de déplacement personnel du type trottinette électrique. Soit le double de 2021. Moins de 30% des EDP sont assurés en France, malgré l’obligation d’assurance.
Par ailleurs, le FGAO a pris en charge 2.202 victimes de conducteurs ayant pris la fuite. Les délits de fuite ont augmenté de 34% pour atteindre les niveaux de 2019 (181.894).
Les jeunes surreprésentés
Le fléau de la non-assurance concerne particulièrement les jeunes et les personnes en situation de précarité. La moitié des auteurs a moins de 30 ans. Plus d’un quart est sans activité et 13,5% sont des étudiants.
Dans son baromètre, le FGAO a mené une étude qualitative avec Viavoice auprès des jeunes afin de tenter d’expliquer le phénomène. Elle révèle que les jeunes sont informés de l’obligation d’assurance mais ignorent son fonctionnement. Le coût de la couverture représente un obstacle majeur pour cette tranche d’âge qui juge la couverture auto et moto trop chère.
L'assurance, l'angle mort des aides à la mobilité
Le budget d’assurance d’un primo-conducteur est d’environ 1.000 euros par an, contre 500 euros pour un conducteur expérimenté. Une des pistes de travail pour faciliter l’accès des jeunes à l’assurance consisterait à limiter les surprimes que les assureurs appliquent aux jeunes conducteurs.
« Il faudrait réévaluer le mécanisme règlementaire de la surprime pour les conducteurs novices », plaide Julien Rencki. Le directeur du FGAO évoque également les aides à la mobilité dont bénéficient les jeunes. « Ces aides pour financer le permis de conduire ou l’achat du véhicule ne visent pas l’assurance, qui constitue un véritable angle mort des aides à la mobilité », déclare-t-il.
Martin Landais, sous-directeur des assurances à la Direction générale du Trésor, a rappelé l’engagement des assureurs en faveur du pouvoir d’achat consistant à contenir l’évolution des primes d’assurance auto en dessous de l’inflation. « En 2022, les primes auto ont augmenté de 1,6%. En 2023, l’augmentation des primes oscillera entre 2,5% et 5%, des évolutions importantes mais en-dessous de l’inflation », déclare Martin Landais.
L’éducation à l’assurance fait partie des axes de travail pour tenter de réduire la non-assurance. Dans cet objectif, le Fonds de garantie a signé un partenariat avec l’Union nationale de missions locales (UNML) afin de sensibiliser les jeunes sur les risques liés à la non-assurance.
Plusieurs pistes de travail ont été évoquées. Anne Lavaud, déléguée générale de l’Association prévention routière, propose de faire de la sensibilisation par des jeunes pour des jeunes.
Le FVA est opérationnel
Ces dernières années, les assureurs ont amélioré la fiabilité du Fichier des Véhicules Assurés (FVA), créé en 2015. Ce fichier regroupe les données de tous les assureurs et permet de vérifier si un véhicule est assuré. Julien Rencki considère que ce fichier présente « un potentiel pour intensifier le contrôle et la lutte contre la non-assurance, dans un contexte où le FGAO accumule 400M d’euros de déficit dans ses fonds propres ». Pour rappel, la moitié des sommes prélevées par les procès verbaux dressés pour non-assurance alimentent le budget du FGAO. « L’utilisation de ce fichier pour intensifier les contrôles peut être un levier de retour à l’équilibre sans lequel nous aurons besoin d’augmenter la contribution des assurés au fonds », déclare le directeur général.
« Le FVA est désormais fiable à 99,5% grâce à la mobilisation collective des assureurs et d’Agira. L’utilisation des radars et du fichier pour la vérification d’assurance fait du sens. Le gouvernement n’a pas pour l’heure arbitré sur une éventuelle utilisation de ce fichier pour renforcer les contrôles automatiques des véhicules ciblés par une infraction via un radar. Nous sommes prêts à déployer mais les conditions doivent être arbitrées », déclare Florence Guillaume, déléguée interministérielle à la Sécurité routière. Le fichier est désormais opérationnel pour une utilisation en bords de route par les forces de l’ordre. Elles vont davantage y avoir recours après la suppression de la carte verte annoncée par le gouvernement pour fin 2023.
Rendre visible l'obligation d'assurance
Si la date d’entrée en vigueur de cette suppression n’est pas encore connue, les assureurs s’inquiètent d’une invisibilisation de l’obligation d’assurance. En effet, en l’absence de vignette collée au pare-brise du véhicule, l’obligation d’assurance devient moins tangible. Le FGAO milite pour « qu’un marquage spécifique puisse figurer sur tous les véhicules soumis à une obligation d’assurance » et pour que les vendeurs de véhicules, y compris de trottinettes, soient obligées de délivrer une information sur l’obligation d’assurance.
Face aux difficultés budgétaires des jeunes, Ahmed El Khadiri, délégué de l’UNML, a interpellé les assureurs sur la place de la solidarité inter-générationnelle dans le modèle assurantiel. Il a également évoqué la possibilité de faire participer les employeurs au coût de l’assurance, sous le même modèle que les tickets restaurants.
Parmi les autres pistes évoquées, Patrick Degiovanni, DGA de Pacififa et président du FGAO, a exposé son idée de créer un « contrat auto solidaire », soumis à une condition de ressources, à l’image de la complémentaire santé solidaire (CSS). L’assureur indique que le secteur fait d’ores et déjà des efforts sur la prime des jeunes de moins de 20 ans. Ils présentent un taux d’accidentologie plus élevé que les conducteurs expérimentés. Et pourtant, leurs tarifs sont en-dessous de la prime d’équilibre, dans l’espoir que le jeune conducteur deviendra au fil des ans un bon risque et restera fidèle à son assureur.
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