Finance islamique : Noorassur aura 15 agences d'ici la fin de l'année
Suite à l'interdiction de la mairie de Nice d'afficher l'enseigne d'une agence " Noorassur finance islamique ", le courtier spécialisé dans la vente de produits takaful conformes à la finance islamique a présenté un recours au tribunal administratif. Interview avec Sonia Mariji, sa fondatrice.
Comment avez-vous reçu la décision de la mairie de Nice d'interdire l'affichage de votre enseigne "Noorassur.com finance islamique", à Nice ?
C'était très violent. Dans les autres 8 villes où nous sommes présents, que ce soit à Chelles, à Nantes, à Limoges ou à Tours, nous n'avons rencontré aucun problème. Je le redis depuis le début : la finance islamique n'a aucun lien avec le terrorisme. La ville de Nice nous a prédit des représailles et des agressions si on ouvrait cette agence... Pour moi c'est très grave. Un représentant de l'Etat ne peut pas se permettre de faire ce genre d'amalgame. Nous avons présenté un recours au tribunal administratif de Nice et nous attendons la décision de justice le 27 juin. Je compte porter mon combat jusqu'au conseil d'Etat s'il le faut.
Que faites-vous chez Noorassur pour ne pas être associés à l'islam fondamentaliste ?
Le but de Noorassur n'est pas de faire de la finance islamique de manière communautaire mais de façon affinitaire. Par exemple, nous avons fait le choix d'installer nos franchises dans le centre ville pour ne pas se ghétoïser. Nous faisons preuve d'ouverture et de transparence, car nous n'avons rien à cacher. Nous allons continuer à oeuvrer à la réconciliation nationale.
Qui sont vos clients ?
Nos clients sont de nationalité française ou bien sont des résidents fiscaux français, et l'argent est placé sur des fonds en France. Le métier de conseiller financier est très réglementé et nous sommes soumis au contrôle de l'Orias et de l'ACPR.
Pourquoi avez-vous décidé de créer Noorassur.com ?
J'ai travaillé 10 ans dans le cabinet de gestion de patrimoine CFCI, en Rhône-Alpes, avant de créer Noorassur d'abord sur Internet et depuis 2015 en distribution physique via un réseau de franchises. Après la crise de 2008, qui était pour moi une crise de cupidité, je ne me retrouvais pas dans ce que je faisais. Cette crise a provoqué chez moi une vraie prise de conscience. J'avais envie de continuer à faire mon métier, mais autrement. La finance islamique a été une vraie révélation. On n'a pas besoin d'être musulman pour se reconnaître dans ses valeurs et adhérer à ses principes.
Quels sont les principaux critères pour qu'un produit soit conforme à la finance islamique ?
Nous avons 3 interdictions et deux obligations. D'abord, les taux d'intérêts sont proscrits. Ensuite, nous avons interdiction d’investir dans des placements excessivement incertains ou hasardeux. Enfin, les placements réputés impurs ou illicites sont bannis, à savoir, l'armement, la pornographie, l'alcool ou les drogues. Nous nous imposons également de partager les pertes et les profits entre tous les investisseurs et nous investissons dans l'économie tangible et réelle.
Quels produits distribuez-vous ?
La finance islamique représente 2.000Mds d'euros dans le monde. En France nous n'en sommes qu'aux balbutiements. Je suis convaincue que la finance islamique représente une opportunité d'emploi car chaque franchise Noorassur est génératrice d'emploi. Nous sommes leaders sur le marché de l'assurance vie takaful. Nous distribuons le contrat salam de Swiss Life. Nous avons environ 800 clients et environ 8M d'euros collectés. Nous distribuons également de l'assurance santé individuelle et collective en partenariat avec Mutualp et nous allons lancer un troisième produit en fin de l'année.
Quels sont vos objectifs de développement ?
Aujourd'hui, il existe 8 franchises Noorassur en France. D'ici la fin de l'année, le réseau devrait presque doubler et compter 15 agences. Mon objectif est d'avoir un réseau de 50 agences sur toute la France en 2018.
Avez-vous des difficultés à trouver des entrepreneurs motivés ?
Je reçois entre 6 et 7 demandes d'ouverture de franchise par jour. Je fais un entretien téléphoniques et physique avec chaque candidat. Ensuite, la personne va en immersion dans une de nos agences. Je veux que les gens qui ouvrent une agence Noorassur épousent nos valeurs de fraternité et d'ouverture. Pendant la première année, nous accompagnons nos franchisés avec une formation continue, nous les conseillons dans le recrutement de leurs équipes, dans le but de les faire monter en compétence. L'ouverture d'une franchise représente un investissement de 30.000 euros, dont 15.000 pour l'installation et 15.000 pour le droit d'entrée.
Quels sont les freins à un développement de la finance islamique en France ?
Il y a encore une certaine frilosité des assureurs institutionnels à se lancer sur ce marché parce que les clients sont déjà bancarisés. Mais des grandes banques comme BNP Paribas, Crédit agricole ou Société générale distribuent des produits conformes à la finance islamique dans d'autres pays que la France. Le Royaume-Uni est également un marché plus mature. Je pense qu'en France cela prendra plus de temps mais le marché va finir par se développer. L'exemple du halal dans l'agroalimentaire est très emblématique de ce que pourrait représenter la finance islamique dans quelques années.
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