Indemnités journalières : Les professions libérales rejoignent la Sécu
Les professions libérales vont cotiser à la Sécurité sociale afin de pouvoir bénéficier d’indemnités journalières en cas de maladie, et cela dès les premiers jours de l'arrêt de travail. Quel impact pour les régimes de prévoyance privés ?
Le projet de loi de financement à la Sécurité sociale a été adopté en première lecture par l’assemblée nationale, avec un amendement qui prévoit la mise en place d’un dispositif d’indemnités journalières pour les professions libérales. Celles-ci étaient jusqu’à l’arrivée de la pandémie de Covid-19 réticentes à l’extension de la couverture collective.
En effet, pour faire face à des arrêts de courte durée, les professions libérales préféraient tabler sur l’auto-assurance moins couteuse et plus responsabilisante. Force est de constater d’ailleurs que les professions libérales affichaient un taux d’arrêt de travail pour les maladies de courte durée inférieur à celui des salariés ou des fonctionnaires. Pour se couvrir contre les arrêts de longue durée, les professions libérales pouvaient souscrire des contrats prévoyance privés et facultatifs dits Madelin en complément de leur régime obligatoire.
La pandémie de Covid 19 a bouleversé ces tendances. La Sécurité sociale a mis en place des indemnités journalières exceptionnelles pour les professions libérales en cas de maladie ou de garde d’enfant. Les professions libérales, comme beaucoup de Français, se sont retrouvés face à l’impossibilité d’exercer leur métier, suite à la maladie ou bien suite à la dégradation du contexte économique.
« Avec l’apparition de ce nouveau risque, les professions libérales ont vu l’intérêt d’entrer dans un système de protection sociale. Elles devaient elles aussi se protéger contre les nouvelles formes 'd’arrêt de travail Covid', pour garde d’enfants par exemple, d’où la nécessité de créer un dispositif d'indemnités journalières unique en cas d'arrêt maladie commun et obligatoire pour l'ensemble des professionnels libéraux affiliés à la CNAVPL, pendant les 90 premiers jours. Alors que le rapport prestations / cotisations leur apparaissait trop défavorable avant l’arrivée de la pandémie, il semble aujourd’hui beaucoup plus équilibré. Sans compter que cette pandémie a fait prendre conscience à tous, qu’au-delà du risque de fréquence, la gravité du sinistre devait elle aussi aussi être prise en compte dans l’évaluation de l’utilité économique de l’assurance », selon Catherine Pigeon, actuaire d’Essentielles.
Quel impact pour les contrats prévoyance Madelin ?
Comment va-t-on adapter les contrats prévoyance privés ? « Les contrats TNS Madelin, prévoient une déductibilité fiscale des cotisations si l’adhérent est à jour de ses cotisations auprès des régimes obligatoires. Les assureurs devront donc continuer à vérifier que la personne est à jour de ses cotisations obligatoires et notamment auprès du régime de Sécurité sociale », indique Catherine Pigeon.
L’assureur doit par ailleurs contrôler le niveau d’assurance de ses clients. « Les contrats d’assurance prévoient que les prestations versées ne doivent pas dépasser le niveau de revenu du TNS. Ainsi par exemple, pour évaluer les prestations des contrats Madelin dits indemnitaires il y aura lieu, au moment du sinistre, d’intégrer l’ensemble des versements du régime obligatoire et donc dans le futur système, de déduire également les prestations de la sécurité sociale », complète Catherine Pigeon.
Beaucoup de contrats TNS relèvent de la catégorie des contrats dits « indemnitaires ». Le montant de la prestation est calculé en fonction du chiffre d’affaires de l’année précédente (ou de la moyenne des 2 ou 3 années précédentes). Pour calculer le montant de la prestation, l’assureur devra donc déduire l’indemnisation du régime obligatoire et de la Sécurité sociale. « Le prix des couvertures des régimes indemnitaires devrait donc baisser. Le coût des régimes forfaitaires devrait également baisser, par l’ajustement mécanique des couvertures à la baisse, entraînant ainsi un transfert de cotisations des contrats TNS Madelin vers la Sécu », selon Catherine Pigeon.
Faut-il craindre pour autant une contraction du marché de la prévoyance des professions libérales ? Même si l’on peut craindre une petite baisse des cotisations encaissées sur ce marché, la mise en place d’un système de protection sociale dans le contexte actuel de crise peut également provoquer une prise de conscience de la nécessité de se couvrir. Il est également probable que les acteurs appliquent des revalorisations tarifaires sur ce segment souvent déséquilibré, venant ainsi balayer l’économie potentielle pour les assurés. « Aujourd’hui, le taux de couverture des TNS en prévoyance Madelin ne dépasse pas 40%. Les assureurs ont donc encore plus de la moitié du marché à équiper, en mettant en avant le besoin de protection de la famille dans un contexte fiscal avantageux », considère Catherine Pigeon.
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