Invalidité : Les nouvelles règles pénalisent les hauts salaires
Les nouvelles règles de cumul invalidité et salaire pénalisent les personnes qui gagnent plus de 4.582 euros de rémunération par mois, selon un exemple diffusé par le cabinet Actense.
Le décret du 23 février 2022 fixe de nouvelles règles de cumul de la pension d’invalidité avec les revenus d’activité. Ces règles sont entrées en vigueur le 1er décembre 2022 avec effet rétroactif au 1er avril de la même année.
La mesure est censée inciter les personnes en invalidité à reprendre une activité en leur permettant de cumuler leur pension de retraite avec les revenus de leur activité. Or, au-delà d’un certain seuil de rémunération, le montant de la pension diminue et peut même disparaître.
L’idée du gouvernement était d’assouplir la mise en œuvre du principe indemnitaire. « En effet, ce principe veut que le bénéficiaire d’une garantie d’assurance, ne reçoive pas une prestation supérieure à ce qu’il aurait touché s’il n’y avait pas eu de sinistre. Dans le cas d’espèce, cela signifie qu’un salarié invalide reprenant une activité, généralement à temps partiel, ne peut pas, en cumulant sa pension d’invalidité et son salaire, gagner davantage qu’avant la reconnaissance de son invalidité. Si tel est le cas, la pension d’invalidité est écrêtée pour respecter la norme, jusqu’à devenir nulle le cas échéant. On parle alors de ''suspension'' du versement de la pension d’invalidité : le droit perdure, mais le montant est nul », indique Franck Duclos, associé d’Actense.
[caption id="attachment_1535025" align="aligncenter" width="620"] Source : Actense[/caption]Les nouvelles règles censées favoriser la reprise d’activité pénalisent les pensionnés dont la rémunération dépasse le 125% du plafond de la Sécurité sociale, soit 4.285 euros bruts par mois. « Cela signifie qu’en deçà de ce montant, le salarié a un gain à la réforme et qu’au-delà, il perd. A partir de 7.140 €, soit 208,3% du PASS, la pension est suspendue », signale Franck Duclos.
Comment est-ce possible ? Explications par Franck Duclos : « Le décret prévoit une comparaison non plus avec le salaire antérieur, mais avec le Plafond Annuel de Sécurité Sociale (PASS) afin de limiter le gain en valeur absolue (montant) et non pas seulement en valeur relative (pourcentage du salaire de référence). Cependant, la rédaction est telle qu’aujourd’hui, dans les premiers décomptes envoyés aux assurés sociaux, les caisses de Sécurité sociale appliquent le principe indemnitaire en comparant le cumul ''pension + salaire résiduel'', non pas avec le salaire de référence, mais avec le PASS ».
Quelle garantie complémentaire ?
Au-delà de la baisse de pension de base pour les hauts salaires, Franck Duclos tire la sonnette d’alarme en ce qui concerne la garantie invalidité complémentaire. « Cette garantie est généralement définie comme une prestation différentielle entre un objectif cible (ex : 80% du salaire brut de référence) et après déduction de la pension de base. Deux interprétations sont alors possibles : soit considérer qu’il s’agit d’un transfert de charges entre la Sécurité sociale et les complémentaires : le coût de la suspension de droit est transféré à ces dernières (puisque le montant cible reste le même, le montant différentiel, c’est-à-dire net de la pension de base, s’accroît) ; soit considérer que, comme il n’y a plus de prestation au titre du régime de base, il ne peut plus y en avoir pour la complémentaire », selon l’actuaire qui penche plutôt pour la première interprétation.
[caption id="attachment_1535028" align="aligncenter" width="620"] Source : Actense.[/caption]Le graphique ci-dessus met en évidence une perte de revenu de près de 30% dans l’exemple proposé, pour les rémunération supérieure à 7.300 €. Franck Duclos appelle les organismes complémentaires à adopter une position de place sur le sujet. « La FNATH commence d’ailleurs à se saisir du sujet. Il paraît donc nécessaire que l’administration soit révise rapidement son texte, soit publie une circulaire interprétative qui revienne sur les modalités d’application de ce texte, de façon à ce qu’il redevienne favorable pour l’ensemble des salariés bénéficiaires d’une pension d’invalidité », pointe-t-il.
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