Le 12 novembre, le tribunal de commerce de Paris a renvoyé 6 dossiers opposant des restaurateurs à Axa vers des juridictions en région sur demande de l'assureur. L'avocat des établissements réagit.
Depuis plusieurs semaines, Axa navigue en pleine tempête judiciaire. En cause l'épineux dossier des pertes d'exploitation. Plusieurs décisions ont d'ailleurs été rendues sur ce point, dont une le 17 septembre par le tribunal de commerce de Paris. Ce dernier avait condamné l'assureur à verser une provision à 5 restaurateurs, dont 3 étaient basés à Paris et 2 en province. Rappelons que le contrat en cause est distribué par les agents et les courtiers partenaires de l’assureur prévoyant la prise en charge des pertes d’exploitation en cas de fermeture administrative de l’établissement couvert. Une clause d’exclusion venait limiter la garantie si plus d’1 établissement était concerné par cette fermeture. Le tribunal a estimé que la clause d’exclusion était insuffisamment limitée.
Le 12 novembre, 6 nouveaux restaurateurs avaient rendez-vous avec le tribunal de commerce de Paris. Mais il a décidé de relocaliser les affaires dans les juridictions où sont installés les établissements. « Axa a soulevé l'incompétence territoriale du tribunal de commerce de Paris. Pourtant ce dernier est compétent car Axa France IARD, dont le siège est à Nanterre, possède des établissements au cœur de la capitale », pointe Guillaume Aksil, avocat des restaurateurs concernés et dirigeant de Lincoln Avocats Conseil.
Ce sera donc aux tribunaux de Salon-de-Provence, de Bourg-en-Bresse, de Vannes, de Mont-de-Marsan et de Saint-Etienne de se prononcer sur ces affaires. « Axa fait tout pour gagner du temps et nous, nous perdons 3 mois », regrette Maître Aksil. Dans les faits, le tribunal de commerce de Paris croule sous les dossiers. « Il est vrai que les juges sont débordés. Lors d'une audience de procédure, le 28 octobre dernier, ils devaient traiter plus de 100 assignations », illustre Guillaume Aksil.
Le groupe d'assurance aurait par ailleurs demandé que les décisions soient rendues en audience collégiale et non plus par un seul juge. « C'est une demande de droit, mais cela va compliquer l'organisation des audiences », selon l'avocat.
Mais pour les restaurateurs, ces délais compliquent leur quotidien « Mes clients sont, pour la plupart, dans des situations financières complexes à cause de la crise économique générée par la Covid-19. Devoir attendre encore un peu plus les indemnisations auxquelles ils ont droit contribue à fragiliser leur situation économique », estime le dirigeant de Lincoln Avocats Conseils.
La 2e vague... de procédures ?
Reste que les décisions rendues par les tribunaux en province sont plutôt favorables à Axa France. Toulouse (le 18 août), Bourg-en-Bresse (le 24 août), Bordeaux (le 12 octobre), Lyon (le 4 novembre) et plus récemment Toulon (le 12 novembre) ont donné raison à l'assureur. Ils estiment que le contrat standard ne couvre pas les pertes d’exploitation des restaurants consécutives aux mesures généralisées prises par le gouvernement dans le cadre de la lutte contre l’épidémie de Covid-19.
"Nous comprenons la détresse et l’inquiétude dans laquelle sont plongés nombre de nos assurés commerçants et notamment restaurateurs. Le rôle des assureurs est d’agir pour que ce qui n’était pas possible hier et aujourd’hui, le soit demain. C’est la raison pour laquelle nous poursuivons, avec le gouvernement, notre action en vue de la mise en place effective du régime public-privé pour assurer les risques sanitaires exceptionnels à venir", déclare Jacques de Peretti, PDG d'Axa France, après que le tribunal de Toulouse a donné raison à l'assureur.
Axa pourrait toutefois faire face à de nouvelles procédures en raison du reconfinement décrété par le gouvernement le 30 octobre dernier. « Les mêmes causes produisent les mêmes conséquences », rappelle Maître Aksil. Il réfléchirait d'ailleurs à mettre à jour les demandes d'indemnisation pour prendre en compte les effets de ce confinement pour les dossiers renvoyés ou en attente de jugement. Pour les ceux qui ont déjà fait l'objet d'une décision, les discussions sont en cours avec ses clients.
Rappelons que dans toutes les procédures déjà jugées, Axa ou les restaurateurs ont fait appel des décisions.
À voir aussi
Assurance vie : BNP Paribas Cardif rachète Neuflize Vie
Cercle RSE : Retour sur la troisième réunion (2023-2024)
Axa France : L’inquiétante et inexorable progression des arrêts longs
Guillaume Borie : "Malgré les chocs, le monde reste assurable"