Les assureurs-vie allemands sont pris entre les taux promis à leurs clients et les rendements en déclin des taux à long terme.
Fragilisé par les taux d'intérêts très bas en Europe, le secteur de l'assurance-vie en Allemagne peine de plus en plus à tenir ses promesses de rendements vis-à-vis des clients, incitant le gouvernement allemand à voler à son secours.
"Les faibles taux d'intérêts posent de grands défis aux sociétés d'assurance", estime le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, qui a dévoilé mercredi plusieurs mesures destinées à soutenir ces entreprises. Avec 93 millions de contrats pour 80,5M d'habitants et environ 800Mds d'euros d'encours, l'assurance-vie a longtemps été le produit financier préféré des Allemands pour leur retraite, synonyme de fiabilité et de rendements élevés.
Ce type de produits a toutefois nettement perdu de son attrait ces dernières années en raison notamment d'une dégradation progressive des rendements. En cause, le taux fixe de rémunération garanti par les produits d'assurance-vie aux souscripteurs.
Actuellement, les assureurs proposent un taux garantie de 1,75% valable jusqu'à la fin de leur contrat. Dans les années 90, ils vendaient des contrats au taux garanti de 4% et peinent désormais à faire fructifier l'argent de leurs clients à des taux aussi élevés, sauf à s'aventurer en terrain risqué.
Placement refuge par excellence, les bons de l'Etat allemand à dix ans ne rapportent guère plus de 1,4% à l'heure actuelle. Pour tenir leurs promesses, les assureurs sont contraints d'alimenter de coûteuses "réserves de taux" pour se prémunir d'une chute des taux. Leur montant avoisinait 13,5Mds d'euros en 2013, selon l'agence de notation spécialisée Assekurata.
"Et nous nous attendons à ce que les assureurs doivent rajouter de 8 à 10Mds d'euros supplémentaires dans ces réserves de taux cette année", souligne Lars Heermann, analyste chez Assekurata.
Un tiers des assureurs menacés
Pour ne rien arranger, les sociétés d'assurances doivent reverser depuis 2008 la moitié de leurs réserves d'évaluation ou "plus-values latentes" aux souscripteurs en fin de contrat, offrant ainsi aux clients la perspective de généreuses primes lors de leur départ. Selon la fédération du secteur, 300 millions d'euros ont été versés chaque mois aux assurés à ce titre en 2013.
Ces réserves, constituées lorsque la valeur d'une obligation acquise s'apprécie au fil du temps, représente un gain potentiel pour l'assureur mais restent fictives tant que la société concernée n'a pas revendu les titres qui y sont associés.
Autant de difficultés qui se conjuguent à la mise en œuvre des nouvelles règles de solvabilité (Solvency II) à partir de 2016, qui nécessitent également des efforts financiers de la part des assureurs.
Déjà, "dans un scénario de stress, marqué par un environnement prolongé de taux bas, plus d'un tiers des assureurs-vie allemands ne seraient pas en mesure de se conformer aux critères définis par les règles actuelles de solvabilité (Solvency I)", écrivait en novembre la banque centrale allemande, la Bundesbank.
Avec le projet de loi présenté mercredi, et dont le gouvernement espère qu'il sera adopté par le parlement avant la pause estivale, "nous nous assurons que les engagements pris pourront être remplis", souligne M. Schäuble. Dans le cadre de ce projet, le taux de rendement minimum garanti aux nouveaux souscripteurs d'assurance-vie sera abaissé à 1,25% au 1er janvier 2015.
En outre, "la distribution des réserves d'évaluation aux clients en fin de contrat sera limitée" afin de garantir les engagements des assureurs vis-à-vis des clients restants, précise le projet. En contrepartie, les autorités allemandes pourront s'opposer au versement de dividendes aux actionnaires d'un assureur, si celui-ci ne semble pas en mesure d'honorer les promesses faites à ses clients.
Les sociétés d'assurances devront en outre verser une part plus importante de leurs excédents de risques à leurs assurés, fixée à 90% contre 75% actuellement. L'assurance-vie ne semble toutefois pas au bout de ses peines alors que de nombreux analystes s'attendent à ce que la Banque centrale européenne (BCE), qui se réunit jeudi, annonce une nouvelle baisse de ses taux directeurs, déjà à leur plus bas niveau historique.
Francfort, 4 juin 2014 (AFP)
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