Marine Charbonnier (Axa XL) : "Notre système de captives inspire d’autres pays"
INTERVIEW – Pour News Assurances Pro, Marine Charbonnier, head of captives & facultative underwriting, APAC & Europe chez Axa XL, fait le point sur le marché français des captives de réassurance. À la veille de l’ouverture de l’European Captive Forum 2023, elle détaille quels sont les délais de mise en place et les profils d’entreprises éligibles et pourquoi le modèle tricolore intrigue d’autres pays européens.
Qu’à changé la publication du décret permettant de créer des captives de réassurance à la française ?
Pour créer une captive de réassurance, l’instruction d’un dossier par le régulateur prend a priori 6 mois minimum. Si l’on considère le nombre d’agréments depuis juin, le décret n’a pas encore eu d’impact notable; en revanche depuis, les marques d’intérêt pour le dispositif se sont nettement accélérées.
Parmi les récents véhicules ayant reçu leur agrément, on s’aperçoit que des industriels comme Seb ou Bonduelle ont initié leur démarche bien avant que le sujet des captives à la française ne (re)devienne concret sur le marché en juin dernier grâce au décret. Pour les dernières captives agréées (Lactalis, Naval Group ou Limagrain), elles avaient donc anticipé afin d’être efficientes rapidement.
Certaines captives sont encore en attente d’agrément, pourquoi ?
Les autorités de contrôle sont très exigeantes, d’où des délais d’obtention de l’agrément parfois long. La période d’attente d’agrément doit permettre de préparer, avec l’assureur et le courtier, la mise en place de la captive sur les programmes dans les meilleures conditions.
Là encore, il est question d’anticipation car c’est une analyse approfondie par l’ACPR, depuis l’actionnaire jusqu’à la souscription, en passant par la gouvernance propre à la captive, qui permet de valider la qualité du dossier et sa solvabilité sur la durée.
Qu’est-ce qui pousse ces entreprises à franchir le pas et comment les aidez-vous ?
Notre rôle est d’abord de les accompagner dans leurs premières réflexions. Nous n’avons pas un rôle de conseil à proprement parler mais pouvons faire part de nos retours d’expérience. Le client entre ensuite dans une phase d’étude de faisabilité où il doit présenter des chiffres concrets à sa direction financière. Le premier critère de décision est surtout celui de la prime.
S’il est décidé de monter une captive, vient ensuite la très importante phase de préparation. Déployer un programme international dans plusieurs pays en y intégrant une captive est complexe. Il faut en effet prendre en compte les spécificités réglementaires locales, tout en intégrant à la fois le risk management des filiales et les parties prenantes externes.
C’est un travail colossal qui n’est pas toujours réalisable dans les meilleures conditions en moins d’un mois. Par conséquent, pour les prochains agréments en attente et pour une mise en place de captives au 1er janvier 2024, les délais sont très, voire déjà, trop serrés. Si les agréments sont tardifs, il est toutefois possible de travailler sur des solutions alternatives pour décaler l’implication de la captive.
Quel est aujourd’hui le profil des entreprises françaises intéressées par une captive ?
Toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, s’intéressent et s’interrogent sur la pertinence de la mise en place d’une captive.
Aujourd’hui, nous constatons néanmoins un intérêt par des entreprises encore importantes avec des risques classiques et une implication sur de grands programmes internationaux. Une dizaine d’entreprises de notre portefeuille se montre aujourd’hui intéressée par la création d'une captive. Certaines en sont au début de leur réflexion, d’autres sont plus avancées.
D’autres pays sont-ils intéressés par la législation française sur les captives ?
Attirer des captives d’autres pays n’est a priori pas l’objectif de la loi française. En revanche, notre système semble inspirer d’autres pays européens, tels que l’Allemagne, l’Italie ou encore l’Espagne. En outre, rappelons qu’il existe déjà des captives on shore dans quelques pays limitrophes, dont la Suisse ou les pays nordiques.Quel est votre vision pour les prochains mois sur ce marché tricolore des captives ?
Nos clients et leurs conseils peuvent s’appuyer sur notre capacité d’écoute et de réaction pour un accompagnement sur des projets, globaux, cohérents et pérennes, qui apportent financement et transferts de risques dans les meilleures conditions. Aujourd’hui, les branches les plus pertinentes pour la création de captives sont le dommages, la RC, le cargo, le cyber - même si le risque n’est pas simple – ainsi que la construction. Certains groupes français s’interrogent sur la branche employee benefits (santé / prévoyance collective) avec nos collègues de Maxis. À ce jour, ce sont encore principalement les captives d’origine anglo-saxonne qui se positionnent significativement sur ce risque. Il y a également un sujet captive et ESG. Par exemple, sur le "S" d’ESG avec des solutions pour l’harmonisation des garanties santé, ou encore sur le "E" avec des solutions pour les risques climatiques et environnementaux.
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