Taux bas : L'inquiétude monte chez assureurs et réassureurs

jeudi 5 septembre 2019
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INFOGRAPHIE - Depuis le 16 juillet, les taux de l'OAT à 10 ans naviguent en territoire négatif. Une situation qui inquiète assureurs et réassureurs, à plus forte raison si elle devait perdurer.

Ce week-en s'ouvrent les 63e Rendez-vous de Septembre à Monte-Carlo. Le passage destructeur de Dorian sur les Bahamas devrait alimenter les conversations. Mais à l'heure où les premières discussions tarifaires vont démarrer, le sujet des taux bas sera un argument de poids côté réassureurs pour renégocier avec les cédantes. « On met souvent les cat' nat' en avant pendant les Rendez-vous de Septembre, mais cette année, des hausses tarifaires en RC auto et en RC générale seront clairement sur la table, prévient un réassureur. Il faut bien comprendre qu'aujourd'hui, à sinistre équivalent, la charge de provisionnement est beaucoup plus élevée dans ce contexte de taux négatif ».

Depuis le 16 juillet, l'OAT française à 10 ans a plongé en territoire négatif pour ne plus en sortir. A l'heure où nous écrivons ces lignes, son rendement frôle les -0,40%. Même constat pour les bons du Trésor qui flirtent avec les -0,70% (voir graphique ci-dessous).

« Les assureurs auto vont devoir répercuter cette hausse de la charge de provisionnement sur leurs tarifs et donc sur leurs clients », estime le dirigeant d'un réassureur, faisant valoir l'effet ruissellement tarifaire de la réassurance jusqu'au particulier. Ce ne sera pas le cas de Maaf qui a d'ores et déjà annoncé un gel des cotisations, voire une baisse pour certains modèles d'automobile. Les autres grands acteurs de ce segment de marché ne sont pas encore positionnés.

Retour à la réalité technique de l'assurance

Face à des rendements financiers voués à s'éroder, assureurs et réassureurs vont devoir revenir à la réalité technique de leur portefeuille. « Alors que les taux d’intérêt sont en train de baisser et qu’ils espèrent améliorer le rendement net des investissements, les réassureurs doivent se concentrer davantage sur une souscription rigoureuse », préviennent les analystes de S&P Global Ratings. Au mois de mars dernier, l'agence de notation évoquait également une pression sur le rendement des actifs des assureurs.

« Nous ne nous attendions pas à des OAT qui perdent 40, voire 100 points de base pour certains pays », pointait Charles Relecom, PDG de Swiss Life France lors de la présentation des résultats semestriels de l'assureur. Le sujet est en effet plus prégnant pour les assureurs vie. A l'instar de Swiss Life France, qui a refusé de placer quelque 250M d'euros destinés à être placés sur des fonds euros par ses clients, certains n'hésitent pas à stopper les versements sur les supports en euros. « Nous avons refusé près d'un milliard d'euros », illustre le directeur patrimonial d'un assureur vie.

Tensions sur le corporate

Pourtant la collecte en assurance vie se porte bien depuis le début de l'année. Les Français ont versé quelque 87,1Mds d'euros sur leurs contrats entre janvier et juillet, dont 66,6Mds d'euros sur les fonds euros. Les placements en unités de compte, nettement moins gourmands en fonds propres et pour lesquels le risque est porté par le client, peinent à dépasser les 24% des cotisations versées aux assureurs. Les soubresauts des marchés financiers ne sont pas étrangers à cet attentisme des assurés.

« Nous bénéficions toujours du stock d'obligations à rendement positif et nous poursuivons la diversification de nos placements sur l'immobilier et ou les corporate », poursuit le directeur patrimonial. Mais là aussi, les marchés sont tendus. En août, près de la moitié des obligations d'entreprise cotées en euros sur la plateforme Tradeweb, soit 1.680Mds d'euros, offraient des rendements négatifs. « Les assureurs vie vont devoir réagir sur la rémunération de leurs contrats en euros. Après une stabilité sur les taux moyens servis par le marché, on peut tout à fait envisager une baisse de 0,40 point de base lors des prochaines annonces. Il est difficile de rémunérer quand soi-même on ne l’est pas », estime Cyrille Chartier-Kastler, président de Facts & Figures. Réponse dans quelques semaines avec les premières annonces de taux de rendement en assurance vie.

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