News Assurances Pro ouvre son espace chronique à Eric Verhaeghe, ancien élève de l'ENA, passé par la FFSA et ancien président de l'APEC. Il a récemment fondé Parménide, "cabinet de l'innovation sociale".
En faisant polémique avec un rapport parlementaire étrangement occulté, le député Perruchot, inscrit au groupe Nouveau Centre, a eu le mérite de mettre le doigt sur un symptôme du mal français: l’inachèvement des réformes.
Car les observateurs attentifs de ces affaires se souviendront que la loi du 20 août 2008 sur la représentativité avait entamé des réformes sur le financement du syndicalisme, en imposant la certification et la publication des comptes des centrales syndicales. La mesure est entrée en vigueur en 2011. Certains l’avaient précédée dès 2010. Les comptes sont aujourd’hui publiés et permettent de mesurer la dépendance des organisations syndicales vis-à-vis des ressources autres que les cotisations de leurs membres. Notamment vis-à-vis de la sécurité sociale ou de l’opaque formation professionnelle. Ceci est aussi vrai pour certaines chambres patronales.
Le problème, c’est que cette réforme ne suffit pas. Elle laisse vacants des pans entiers de pratiques anciennes.
Elle est d’ailleurs très en-dessous de ce que préconisait la Position Commune sur la représentativité d’avril 2008, signée par la CGT et la CFDT. Celle-ci avait à l’époque appelé à imposer un plancher de cotisations dans les ressources globales. Elle proposait également une moralisation du système, en valorisant dans les comptes tous les prêts gratuits de main-d’oeuvre dont bénéficient les syndicats, notamment de la part des collectivités locales ou de l’Etat.
Il ne tenait à l’époque qu’à la représentation nationale de donner force de loi à ces dispositions qui intéressent directement la profession de l’assurance. Elles auraient permis de limiter considérablement les tentations qui doivent bien exister de-ci de-là. Elles auraient surtout facilité les réformes dont les entreprises ont besoin aujourd’hui. Une grande partie du coût du travail en France est dû à des structures paritaires qui sont vitales pour le financement de certains syndicats, autant salariaux que patronaux.
Malheureusement, la réforme est restée au milieu du gué. C’est le mal français. Deux pas en avant, un pas en arrière. Du coup, le paysage syndical est devenu biscornu. On réforme la représentativité, mais on n’est pas sûr d’aller jusqu’au bout. On rend les financements transparents, mais on leur conserve une part d’ombre.
L’étape suivante, idéalement, serait la constitution d’un fonds de financement du même type que celui des partis politiques, mais pour la vie syndicale de salariés. Ce fonds indemniserait, en tenant compte des résultats aux élections en entreprise, l’activité que les syndicats déploient pour faire autre chose que la représentation des salariés en entreprise. Pour gérer la sécurité sociale par exemple.
Un projet pour une réforme dans quelques années ? Qui sait... Tout pourrait venir à point, à qui sait attendre.
Eric Verhaeghe
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