L’assurance vase transformer sous l’effet de la révolution numérique. L’emploi va lui aussi être chambouler et nombre de métiers disparaître… Et l’actuaire ?
Aujourd‘hui, difficile en effet de parler emploi dans le secteur de l’assurance sans traiter des actuaires. Diplômés d’une dizaine d’école reconnues par l’association professionnelle, l’Institut des Actuaires (IA), créée en 1890, et qui compte près de 4.000 adhérents, ils sont aujourd’hui très prisés, et bien payés. Les jeunes actuaires trouvent très vite du travail, pour un salaire d'embauche autour de 40.000 euros, qui double en moyenne en dix ans de carrière. Avant de prédire l’avenir aux actuaires, il faut rappeler leur histoire récente et rappeler que les représentants de cette profession indispensable à l’assurance ont longtemps constitué des effectifs clairsemés dans les compagnies. Aujourd’hui, 28% des actuaires travaillent chez un des dix plus gros employeurs de la place – des assureurs, mais aussi dans le conseil, chez Addactis (Adding Actuaris). Mais l’association professionnelle répertorie au total 660 employeurs chez ses 4.000 membres.
« Jusqu’en 1969 et la création du CEA, une dizaine de personnes seulement entrait à l'Institut des actuaires chaque année. Le flux est alors passé à une trentaine de nouvelles adhésions tous les ans. Ensuite, au fil des reconnaissances par l’IA de nouvelles filières de formation, les effectifs annuels ont progressivement augmenté jusqu'à 150 environ au début des années 2000. Le dernier plateau atteint, avec 220 à 230 nouveaux actuaires chaque année, résulte non pas de la reconnaissance de nouvelles filières de formation, mais du relèvement des effectifs des promotions rendu nécessaire notamment par solvabilité 2 », explique Régis de La Roullière, président de l’Institut des Actuaires.
En cinquante ans, le rôle de l’actuaire a aussi changé. « Historiquement, les grands métiers pourvoyeurs en postes d'actuaires étaient la tarification et le provisionnement dans les assurances, et la gestion d’actifs. Aujourd’hui et depuis plusieurs années, les problématiques d'adossement actif/passif et de couverture de marge de solvabilité mobilisent des effectifs importants, ainsi que la mise au point de modèles », ajoute ce dernier. En moins dix ans, les effectifs des adhérents de l’IA ont ainsi doublé, passant de en 1.850 fin 2007 à en 2.396 fin 2016.
L’engouement des banques pour ces férus de chiffres, de probabilités et de modèles de prévision, qui a permis à certains d’entre eux de se faire courtiser par le secteur bancaire s’est en revanche tari. « La crise des subprimes a amené un retour de balancier et les jeunes diplômés sont à présent très majoritaires à travailler dans l’assurance. Le mouvement pourrait se ré-inverser dans le futur », estime Régis de La Roullière. Il ajoute : « à court moyen terme, le métier va beaucoup évoluer. Du côté du passif, les nouveaux outils et le big data vont amener les actuaires à devenir experts en data science. Les écoles ont d'ailleurs déjà intégré de tels modules dans leurs formations. En matière de fonction de contrôle et de reporting, le métier va aussi beaucoup changer car les états, qu'ils soient réglementaires ou à usage interne, vont être générés automatiquement à partir de modèles. En parallèle, la fonction de responsable de fonction clé va se structurer davantage. En Grande-Bretagne, un certificat d'aptitude à exercer les fonctions clés a été créé récemment ».
L’actuaire français aussi se digitalise, puisqu’un quart d’entre eux a déjà suivi au moins une session de formation au big data que propose l’IA. Si la féminisation de la profession est réelle, elle échoue depuis dix ans à croître au-delà d’une borne infranchissable : depuis dix ans, il y a une femme pour deux hommes. Pas plus.
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