Fiscalité : L’assurance vie et la succession remises en question
Dans un rapport sur les grands défis économiques remis au président de la République, Olivier Blanchard et Jean Tirole pointent du doigt des sujets clés comme la fiscalité des successions, de l’assurance vie et la réforme des retraites.
C’est armé d’une commission composée de 24 économistes et deux rapporteurs que le président de la République compte faire face aux défis structurels de long terme. Sur la table, le changement climatique, les inégalités économiques et le défi démographique. Missionnés au début de l’année 2020, Olivier Blanchard et Jean Tirole ont remis leur rapport à Emmanuel Macron ce 23 juin.
Plus de flexibilité pour les retraités
L’âge du départ à la retraite, donnée phare dans le secteur de l’assurance, a été remis en question par les deux économistes. Le rapport met en avant l’idée de passer d’un âge unique du taux plein à une « fenêtre de départ ». « Si les normes ou les 'incitations douces' sont utiles pour fixer un cap général, dans une société moderne, il importe aussi de respecter la diversité des individus. Nous préconisons donc d’introduire le concept de fenêtre de départ qui aurait l’âge minimal de départ pour borne inférieure, au lieu de faire en sorte que les choix se portent sur un âge de départ en retraite unique, identique pour tous les actifs », indique la note. Plus précisément, le rapport préconise un âge minimal de départ à la retraite basé sur l’évolution de l’espérance de vie dans le cadre du « mécanisme d’équilibrage corrigé ». Cela permettrait l’assouplissement des deux forces qui exercent une pression sur les finances du système de retraite telles que le départ à la retraite de la génération du baby-boom et la poursuite attendue de la hausse de l’espérance de vie.
« Une réforme des retraites, et tout particulièrement un relèvement de l’âge effectif de départ, doit s’accompagner de réformes du marché du travail », indique le rapport. Les deux économistes montrent l’importance de soutenir l’emploi des séniors avec « un éventail de mesures relatives au marché du travail » pour leur permettre de maintenir les travailleurs en activité.
Liberté, Égalité, Fiscalité
« Nous ne voyons pas comment le fait d’encourager des ménages bien informés à pratiquer l’optimisation fiscale peut rendre le système plus juste », indique la commission. À ce sujet, l’armée d’économistes se tourne vers le traitement réservé aux polices d’assurance vie et leur abattement de 150.000 euros par bénéficiaire ainsi que les taux préférentiels prévus au-delà de ce seuil. Cette exonération « devrait être réexaminée ». Les estimations actuelles suggèrent que les recettes seraient 20% plus élevées sans cette exonération. Les auteurs du rapport concède qu'il s'agit « d’un sujet politiquement sensible », le secteur de l’assurance-vie, en partie soutenu grâce à cet avantage fiscal, représentant plus de 1.800 milliards d’euros.
Du côté des successions, ils préconisent de se concentrer sur ce que reçoit le bénéficiaire et non sur ce que donne le donateur. Ils recommandent par ailleurs de discuter des abattements prévus tous les quinze ans. « Un individu A qui reçoit 200.000 euros de son père et 200.000 euros de sa mère sera imposé au même taux qu’un individu B ayant reçu 200.000 euros de sa mère et rien de son père. Quant à l’individu C qui reçoit 400.000 euros de son père seulement, il sera imposé à un taux supérieur à celui qui s’applique à l’individu A, même si les montants totaux reçus sont identiques ». La commission préconise d’établir un niveau d’abattement élevé pour ne pas pénaliser les ménages les plus défavorisés. Elle souligne aussi, la capacité redistributive de cette mesure en pointant du doigt le fait que « de nombreuses niches fiscales ne répondent ni à une logique de redistribution ni à une logique d’efficacité ».
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