Patrick Duplan : "Les réassureurs reviennent à la réalité technique du marché"

mercredi 14 septembre 2016
Image de Patrick Duplan : "Les réassureurs reviennent à la réalité technique du marché"

Patrick Duplan a pris le poste de délégué général de l'Apref à l'occasion du changement de gouvernance de l'association au mois de juin dernier. Après quelques semaines d'exercice, il livre sa vision du marché de la réassurance et les chantiers à venir de l'Apref.

S’approche-t-on de la fin du cycle baissier ?

Cela fait déjà plusieurs années que le cycle est clairement baissier. Le rol index des cat’nat’ a encore reculé de 9% en 2015, ce qui est significatif. On peut par conséquent se dire que, de même que les arbres ne montent pas jusqu’au ciel, les cycles baissiers ne descendent pas jusqu’au centre de la Terre. Et je pense que l’on ne doit pas être loin du moment où le cycle peut s’inverser. Il est vrai que pendant plu- sieurs années, il n’y a pas eu de sinistres majeurs, accentuant la pression tarifaire. Les résultats des réassureurs étaient globalement bons, avec des réserves importantes, dans lesquelles certains ont probablement puisé. Mais dans un contexte de résultats en demi-teinte du secteur de la réassurance, de choc réglementaire et de taux bas, ce serait sain de voir les tarifs repartir à la hausse. Pour toutes ces raisons, les renouvellements 2017 vont être particulièrement intéressants.

Comment les taux bas impactent-ils le secteur de la réassurance ?

En premier lieu, il faut voir le côté positif de la situation. Assureurs, comme réassureurs, reviennent à la réalité technique du marché. Ce ne sont plus les produits financiers qui vont faire une part significative du résultat. Et cela participe d’ailleurs à l’idée d’un redressement souhaité du marché. Mais d’un autre côté, cela contraint les réassureurs à repenser le placement des fonds propres et des provisions techniques.

Les règles de Solvabilité 2 sont-elles adaptées aux réassureurs ?

Sur le papier, on ne peut être qu’en adéquation avec les grands principes de Solvabilité 2 qui exigent un pilotage n des activités à risques assurantielles et réassurantielles. On ne peut plus avoir aujourd’hui un pilotage à vue des compagnies. Mais je suis plus critique sur la machinerie et la lourdeur engendrées par cette réglementation. C’est devenu un énorme corpus de règles d’une très grande complexité, lisible par une poignée d’élus. On a remis les clés du bateau à des super experts. Quelle est la compréhension profonde de Solvabilité 2 d’un président de conseil d’administration, ou d’un directeur général ? Je me pose la question.

Quelles sont les priorités de l’Apref ?

Nous continuons à travailler sur les sujets portés par l’Apref sous la présidence de François Vilnet. Les pouvoirs publics nous écoutent par exemple sur la question du risk manager pays et nous avons régulièrement des discussions avec le Trésor. Mais nous n’en sommes pas encore à la phase de concrétisation. Je constate que c’est un sujet assez éloigné du quotidien de Bercy, malgré les catastrophes naturelles qui touchent la France. Par ailleurs nous avons une quarantaine de groupes de travail à l’oeuvre sur autant de sujets.

Faut-il réformer le régime Cat’ Nat’ ?

C’est un outil qui a bien fonctionné depuis 1982. Mais on peut arriver à trouver des coopérations public/privé pour optimiser la couverture des risques naturels extrêmes. Au sein de l’Apref, nous réfléchissons à la façon de rendre le régime plus efficace, par l’ajout de capacités additionnelles.

Où en est le marché sur le cyber-risk ?

Au sein de l’Apref, nous avons un groupe de travail sur les problématiques de cyber-risk. Et on sent de l’appétit chez certains réassureurs pour ce type risque. Pour autant, en Europe, le marché reste peu développé. Mais je suis confiant sur le fait que le marché va s’ouvrir, car c’est un vrai besoin. Toutes les entreprises doivent aujourd’hui se protéger contre les conséquences d’attaques informatiques. Mais c’est un risque complexe sur lequel les assureurs et les réassureurs ne sont peut-être pas encore complètement mûrs.

Contenus suggérés