Sécheresse : L'Assemblée vote la PPL modifiant les règles d'indemnisation

L’Assemblée nationale a adopté en première lecture la proposition de loi visant à mieux indemniser les dégâts provoqués par la sécheresse. Le texte modifie les critères de reconnaissance de catastrophe naturelle et oblige les assureurs à prendre en charge les frais de contre-expertise.

Malgré l’opposition du gouvernement, les députés ont adopté la proposition de loi « visant à mieux indemniser les dégâts sur les biens immobiliers causés par le retrait gonflement de l’argile » déposée par la députée Sandrine Rousseau. Le groupe écologiste-Nupes, les Républicains, le Rassemblement National et le groupe Libertés, indépendants outre-mer et territoires ont voté pour. Renaissance et Horizons ont voté contre. Le Modem s’est abstenu.

Les députés de la majorité estiment le coût des mesures de la proposition de loi entre 500 millions et un milliard d’euros supplémentaires pour le régime des catastrophes naturelles. Les députés ont rappelé à plusieurs reprises la nécessité de pérenniser le régime, dont les réserves s’amenuisent en raison de l’augmentation du phénomène de sécheresse.

Une circulaire attendue cet été

Le gouvernement a pointé du doigt l'augmentation du coût et des délais d'indemnisation induits par les nouvelles règles. « Votre texte vise à élargir le périmètre d’indemnisation et augmenter le nombre de personnes qui peuvent bénéficier d’une indemnisation. Le gouvernement peut le faire par une voie souple et flexible, qui est la voie règlementaire. L’ordonnance du 8 février 2023 sera suivie d’une circulaire qui va arriver cet été qui vise à tenir compte de la répétition des sécheresses, des communes limitrophes, à porter le délai de retour de 25 ans à 10 ans et donc à satisfaire un bon nombre de demandes faites par votre proposition de loi. La circulaire va permettre d’augmenter de 20% les personnes qui pourront bénéficier d’une reconnaissance cat nat au titre de la sécheresse », a précisé Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications

La proposition vise à assouplir les critères de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. La commune entière bénéficie d’un arrêté cat nat dès lors qu’elle est située sur une ou plusieurs mailles géographiques ayant été reconnues en état de catnat. Par ailleurs, les assurés seront indemnisés si leurs fissures antérieures s'aggravent pendant la période de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle de sécheresse.

Période de retour à 10 ans

Parmi les modifications introduites en séance publique, les députés ont trouvé un compromis sur la période de retour permettant de caractériser une sécheresse. Alors qu’aujourd’hui cette période est de 25 ans, la version initiale de la proposition de loi prévoyait de la porter à 5 ans. Finalement, les députés ont trouvé un compromis pour que l’état de catastrophe naturelle pour la sécheresse soit constaté dès lors que l’indicateur d’humidité des sols présente une durée de retour supérieure ou égale à 10 ans. La sécheresse en cause devra être l'une des cinq plus graves sur les 50 dernières années, et non plus l'une des deux plus graves.

Le texte prévoit également que la période de reconnaissance d’arrêté cat nat soit de 12 mois, pas au-delà, alors que la rédaction initiale du texte prévoyait une durée d’ « au moins 12 mois ».

Les députés ont adopté un amendement qui prévoit que les frais de contre-expertise soient à la charge de l’assureur, même lorsque la demande émane de l’assuré, dans le cas où l’assureur refuse d’indemniser les dommages. Sandra Marsaud, députée Renaissance, craint que les frais de contre-exertise, de 4.000 à 6.000 euros soient déduits du montant de l’indemnisation, qui s'élève en moyenne à 16.000 euros,

La commission des finances avait adopté la création de deux labels, l’un pour les experts et l’autre pour les entreprises de rénovation. Les députés sont allés plus loin et introduit l’obligation pour les assureurs de faire appel à « un professionnel inscrit au tableau national des experts près le Conseil d’État, aux tableaux des experts auprès des cours administratives d’appel et des tribunaux administratifs ». Les assureurs seront également obligés d'introduire une rotation parmi les experts afin d’éviter de travailler toujours avec les mêmes experts.

Autre modification du code des assurances, un amendement que vise à bannir les travaux de rénovation non-pérennes. « Chaque acteur concourant à la gestion du sinistre est responsable pendant dix ans à compter de la réception des travaux, en tant que professionnel, de sa prestation effectuée », précise le texte.

Motiver le refus d'indemnisation

Si l’assureur conteste le lien entre RGA et les fissures, alors l’assureur doit faire une étude de sol qui motive le refus. Le texte initial prévoyait « une étude de sol du type G5 ». Le gouvernement a tenté de supprimer cette obligation car ce type d’étude représente un coût de 5.000 euros. Mais les députés l’ont maintenu en remplaçant la mention étude du sol « du type G5 » par « vérifiant que les fondations des constructions sont adaptées aux caractéristiques du sol ».

Le texte prévoit également la production de plusieurs rapports que le gouvernement devra présenter au Parlement. Un des rapports doit évaluer le coût de la loi et formuler des « propositions de réforme afin de s’assurer de la soutenabilité financière du régime des catastrophes naturelles et des pistes de financement assurantiel ». En séance les députés ont souhaité exclure « une hausse des primes, cotisations et franchises pour les assurés » parmi les pistes de financement à l’étude.

Un autre amendement propose d’associer les assureurs et les collectivités à l’élaboration du rapport sur la prévention du risque sécheresse. Enfin, les députés ont demandé un rapport supplémentaire afin d’évaluer « les possibilités de perfectionnement du critère météorologique permettant de reconnaître l’état de catastrophe naturelle pour le phénomène de RGA »