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Tanguy Polet : "Changement de paradigme en assurance vie"

lundi 9 janvier 2023
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TRIBUNE – Tanguy Polet, directeur général de Swiss Life France, considère qu'il est important de ne pas balayer d’un revers de main tous les acquis des vingt dernières années. Cette tribune est publiée dans notre magazine sur le bilan 2022 de l’assurance.

Que retiendrons-nous de 2022 ? Sur le plan international, incontestablement le conflit en Ukraine. Et pour nous assureurs vie, deux éléments que cette crise a accélérés : l’inflation et la hausse des taux. Ces deux marqueurs économiques nous poussent vers un changement de paradigme. Certes, l’avenir n’est pas écrit, mais nous pouvons déjà tirer quelques hypothèses.

La hausse brutale de l’inflation impacte tous les pans de l’économie mais également le comportement des épargnants. En matière d’assurance vie, nous faisons face à deux types de comportements. Les clients patrimoniaux veulent préserver leur objectif de valorisation de leur patrimoine et cherchent ainsi à se protéger au mieux contre l’inflation. Les unités de compte restent, dès lors, au cœur de leurs stratégies d’investissement. Les autres clients, majoritaires, sont plus sensibles à une prise minimale de risque. Ils restent donc plutôt positionnés sur une épargne de sécurité via les livrets et les fonds en euros dont les rendements s’afficheront certes en hausse, mais sans du tout pouvoir couvrir l’inflation.

Une remontée des taux positive

La hausse des taux était attendue. En 2022, en France en tout cas, elle a pu être relativement contenue grâce à la bonne gestion de l’inflation, très inférieure à la moyenne de l’UE. Ce changement d’univers nous permettra, petit à petit, de prendre en compte les attentes des épargnants pour des rendements plus élevés sur le fonds euros. Mais il est important de ne pas balayer d’un revers de main tous les acquis des vingt dernières années. En effet, deux décennies de baisse des taux ont poussé les assureurs à diversifier leur offre vers des fonds patrimoniaux, puis des fonds structurés, de l’immobilier et autres unités de compte. Cette baisse des taux a finalement été bénéfique au secteur : elle a entraîné une bascule significative vers les UC, portée par un intérêt certain en termes de performances pour les assurés et de profitabilité pour les assureurs. De là à blâmer la remontée des taux, certainement pas. Elle est évidemment positive pour la solvabilité du secteur de l’assurance et elle permet aussi de redonner des couleurs à la classe d’actif obligataire, qui en avait bien besoin !

Préserver le couple rendement/protection

Face à ces évolutions, nous restons sereins. Les assureurs ont des solutions pour préserver le couple rendement/protection attendu par leurs clients : UC, poche obligataire, High Yield et produits structurés offrent de belles opportunités et de véritables performances en période de forte volatilité, notamment pour couvrir ou battre l’inflation. Quant à l’immobilier, sensible à la hausse des taux d’intérêt, même s’il s’agit d’un véhicule d’épargne qui fonctionne bien avec des niveaux de protection intéressants, la prudence est toutefois de mise, car la valorisation des actifs est plutôt derrière nous. Il faut donc être plus sélectif sur cette classe d’actifs. Au global, la diversification reste de mise dans un contexte où l’expertise et la qualité de conseil constituent un réel atout dans la mesure et l’appréhension du risque par nos assurés.

Vers un conseil client toujours plus expert

La pression règlementaire pousse sans cesse les assureurs vie à toujours mieux accompagner leurs clients car les solutions performantes sont évidemment plus complexes. Les dispositions prises dans le cadre de PRIPPS, DDA ou SFDR – et plus globalement le devoir de conseil de la profession – imposent toujours plus de pédagogie auprès des clients. Cette pression réglementaire implique pour chaque intermédiaire en assurance de bien faire son métier afin de permettre au client de faire les bons choix, de façon éclairée. Mais l’excès de règlementation peut aussi s’avérer contre-productif lorsqu’il conduit à trop de formalisme. C’est un risque sur lequel nous devons rester attentifs, notamment en matière d’information sur le couple frais/performances UC, très sensible en période d’inflation. Assureurs et assets managers ont et devront faire preuve de pédagogie pour permettre d’appréhender aisément la transparence attendue.

2022 : une année sur le marché de l’assurance vie en demi-teinte

Face à une collecte vie en baisse, conséquence des incertitudes géopolitiques et économiques, certains épargnants ont montré une réelle capacité de résilience. En premier lieu, la clientèle patrimoniale qui, forte de son expérience des dernières années, est plus mature face à la baisse des marchés. Certains clients ont vu dans la période une opportunité à épargner : ceci explique la collecte encore positive sur les UC. En parallèle, l’épargne retraite, promue par la loi Pacte, a conservé tout son attrait avec des chiffres positifs sur le PERin.

Une prise de conscience nécessaire

Aider à faire face au risque à venir est une mission prioritaire pour l’assureur y compris en assurance vie. C’est vrai pour la question des retraites et la réforme annoncée qui va plutôt promouvoir les solutions que nous offrons. Nous devrons faire montre de pédagogie pour inciter les Français à agir plus tôt dans leur vie professionnelle. Il en est de même en matière de responsabilité environnementale et d’information sur la durabilité des produits financiers. Portée par les règlementations européennes dans le domaine, la finance responsable et durable est une dynamique qui s’imposera à tous. Comme intermédiaires financiers, c’est par nous que l’épargne circule et par nous que celle-ci se tournera vers ces supports : car au-delà du règlementaire, c’est aussi une prise de conscience des épargnants que les assureurs portent en responsabilité.

Tanguy Polet, directeur général de Swiss Life France

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