La concurrence entre les bancassureurs et les assureurs dits alternatifs s’accentue sur le terrain de l’emprunteur. Quand est-ce que l’assurance alternative devient vraiment attractive ? Décryptage sur les différentes pratiques commerciales, les prix et les garanties.
Le moment de souscrire un prêt immobilier est anxiogène et chronophage et l’assurance emprunteur arrive souvent en bout de course, au moment où l’emprunteur est lassé de toutes les formalités administratives. Seulement 15% de ceux qui souscrivent un prêt immobilier prennent le temps de faire le tour du marché et choisissent in fine une assurance différente de celle proposée par la banque.
La délégation d’assurance pourrait augmenter dans les années à venir mais les banques sont prêtes à faire des efforts pour que leurs emprunteurs partent avec l’assurance en poche. Elles commercialisent des contrats dits « défensifs » qui sortent du cadre des contrats de groupe proposés par défaut. Ces contrats défensifs représenteraient environ 15 à 20% des contrats commercialisés par les bancassureurs, selon un courtier spécialisé. Les bancassureurs sont réticents à communiquer des chiffres. Renaud Dumora, directeur général de BNP Paribas Cardif affirme avoir « un bon équilibre entre les contrats de groupe et les contrats défensifs », sans donner plus de détails.
La dérogation tarifaire est une autre pratique commerciale visant à garder le client. Selon un rapport du CCSF, environ 80% des bancassureurs appliquent des réductions de tarif de l’assurance emprunteur sur un contrat groupe lorsque l’emprunteur arrive avec une offre alternative. Ces dérogations tarifaires peuvent atteindre jusqu’à 70% du tarif de base, selon le cabinet d’actuariat BAO.
« En période de taux bas, les gens sont tellement focalisés sur le taux de crédit, qu’ils oublient de regarder le prix de l’assurance emprunteur », affirme Maël Bernier, porte-parole de MeilleurTaux.com, courtier et comparateur en crédit et assurance. Quand on sait que l’assurance représente entre un tiers et la moitié du coût global du prêt, et que le potentiel d’économie atteint quelques milliers d’euros, la tentation d’aller faire le tour du marché est forte. Ainsi, « En octobre 2016, 11% des demandes emprunteur déposées sur notre site internet concernaient la loi Hamon. En février 2017, la loi Hamon concernait 26% des demandes », affirme M. Bernier.
La différence se joue sur le prix, mais les acteurs du marché conseillent de bien veiller à l’équivalence des garanties, car lorsque l’on intègre toutes les options prévues dans les contrats de groupe, la différence de tarif entre les bancassureurs et les assureurs dits alternatifs n’est pas flagrante à court terme. Olivier Jourdan, directeur associé de Persona courtage, alerte sur les différences de couverture entre les contrats dits alternatifs et les contrats des banques, dits de groupe. « La plupart des contrats de délégation d’assurance ne couvrent pas, par défaut, les MNO, maladies non objectives (le mal au dos ou la dépression) et que si l’assuré est hospitalisé au minimum une semaine, tandis que les contrats d’assurance groupe des banques prennent en charge ces maladies sans condition ». La deuxième différence concerne l’invalidité permanente partielle (IPP). « Les contrats d’assurance groupe remboursent le prêt des assurés qui sont atteints d’une invalidité dès 33%, tandis que les contrats en délégation d’assurance ne couvrent, par défaut, que les invalidités dès 66% ». Le tarif des contrats en délégation augmentent sensiblement lorsque l’on intègre les MNO et l’IPP à 33%. Persona courtage a comparé différents contrats de groupe et contrats en délégation à garanties équivalentes (avec l’option IPP et MNO).
« Avec une délégation d’assurance, le montant de l’assurance varie en fonction du capital restant dû, alors que dans les contrats d’assurance groupe le montant est le même tout au long de la durée du prêt et il n’y a pas de distinction de tarif entre les fumeurs et les non-fumeurs. En revanche, les contrats en délégation adaptent le prix en fonction du risque du profil et pratiquent des exclusions ou des surprimes sur certaines professions ou sports à risque ", explique Olivier Jourdan.
"Comme une délégation d’assurance est calculée sur le capital restant dû, les mensualités sont plus élevées au début du prêt et parfois plus élevées que le contrat groupe. Même si le taux moyen est plus intéressant sur la durée totale du prêt, la délégation d’assurance peut être moins intéressante si le bien est revendu dans les premières années du prêt », considère Olivier Jourdan.
Le cabinet d’actuariat BAO a effectué une autre comparaison sur un exemple concret d’un emprunt de 150.000€ qui correspond à l'emprunt médian actuel. Avec un taux de 1,5%, ceci correspond à des emprunteurs disposant de 2.800€ et un taux d'endettement de 30%. « Quand l'emprunteur choisit une assurance bancaire, l'assurance représente plus de 21.000€ sur toute la durée du crédit, soit 95% du coût des intérêts (22 596€), ou 49% du coût global du crédit (intérêts + assurance). L'écart de tarif entre une assurance bancaire et une assurance alternative est alors de 9.000€, sur le déroulé du crédit », indique BAO dans son rapport de février 2017 sur les tarifs bancaires.
Dans les années à venir, il faut donc s’attendre à une guerre des prix entre les assureurs dits alternatifs et les banques. Les baisses de tarif peuvent être substantielles, étant donné que la marge de l’assurance emprunteur peut atteindre 50% de la prime d’assurance.
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