Assurance : La Cour de Cassation suggère de réformer la prescription
Dans son rapport annuel, le Cour de Cassation suggère de réformer le délai de prescription en cours dans l'assurance. Elle préconise de l'aligner avec le droit commun.
C'est une histoire vieille de 90 ans que souhaite réécrire la Cour de Cassation. La loi du 13 juillet 1930 instaurait alors un délai de prescription de deux ans pour les contrats d'assurance. La loi dispose ainsi que « toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance ». Toutefois, au fil des années quelques exceptions s'ajoutaient. Ce fut notamment le cas pour les sinistres liés à la sécheresse dont le délai est de 5 ans.
Ce choix initial de deux ans résulte d'au moins deux explications indique la Cour de Cassation dans son rapport annuel. Tout d'abord, avant cette loi de 1930, les assureurs fixaient arbitrairement des délais de prescription très courts « parfois limités à six mois », écrit la plus haute juridiction judiciaire. Ensuite, dans l'entre-deux-guerres, le délai de prescription relevant du droit commun était fixé à 30 ans. Une période trop longue et inadaptée pour l'assurance, selon la Cour de Cassation.
Mettre un terme au régime dérogatoire de l'assurance
Mais depuis la loi du 17 juin 2008, le délai de droit commun est de cinq ans. Or, de ce décalage naissent « des contentieux abondants ». « Et les solutions sont tout à la fois imparfaites et sources de complexité », constate la Cour de Cassation. Certes, l'article R112-1 du code des assurances impose aux assureurs de préciser dans le contrat la règle régissant « la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance ». Mais c'est insuffisant pour l'autorité judiciaire.
C'est pourquoi, dans son rapport annuel, elle suggère « qu’il soit mis fin à ce régime dérogatoire. […] L’alignement du délai et du régime de prescription applicables aux actions dérivant du contrat d’assurance sur celui de droit commun entraînerait, en outre, une simplification du droit que ne permettent pas toujours d’atteindre les évolutions jurisprudentielles nécessaires à la préservation des droits des assurés ».
Un régime conforme à la Constitution
Le Conseil Constitutionnel était d'ailleurs récemment saisi sur ce sujet dans le cadre d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). En l'espèce, les époux T. reprochaient au code des assurances « de n'accorder qu'un délai de deux ans à l'assuré non professionnel pour intenter une action contre son assureur tandis que les autres consommateurs bénéficient du délai de droit commun de cinq ans pour intenter une action contre un professionnel ». Dans sa décision du 17 décembre 2021, le Conseil Constitutionnel concluait que l'article L. 114-1 du code des assurances, qui régit les délais de prescription, était conforme à la Constitution.
Les Sages considéraient en effet que « le contrat d'assurance se caractérise en particulier par la garantie d'un risque en contrepartie du versement d'une prime ou d'une cotisation ». A cet égard, il diffère d'autres contrats soumis au code de la consommation. Le législateur a alors tout loisir de prévoir un délai de prescription différent pour l'assurance. Et ce, sans que cela ne contrevienne à l'article 6 de la déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen. Ce dernier stipule en effet que « la loi doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». En d'autres termes, rien n'oblige le législateur à aligner les délais de prescription. Pas sûr, dès lors, qu'il en fasse un priorité.
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