Assurance : Le bilan de la mandature Macron en 11 réformes

vendredi 8 avril 2022
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Le marché de l’assurance s’est profondément transformé ces cinq dernières années. Les réformes se sont succédé à un rythme soutenu pendant le quinquennat d’Emmanuel Macron, que ce soit dans le domaine de la santé, l‘emprunteur, le courtage, l’épargne ou l’assurance des biens.

Clap de fin pour le RSI et le régime étudiant

La plupart des réformes qui concernent la complémentaire santé ont eu lieu en début de quinquennat. Emmanuel Macron a tenu ses promesses de campagne et mis fin au régime étudiant de la sécurité sociale et au régime social des indépendants. La couverture des étudiants et des indépendants a été confiée au régime général. Par ricochet, les mutuelles étudiantes et celles ayant une délégation de gestion du RSI ont été impactées.

Une partie du personnel a été transférée à la Cnam. Privées de cette délégation de gestion, les mutuelles sont désormais cantonnées à leur rôle d’organisme complémentaire. Certaines mutuelles étudiantes ont disparu, d’autres ont fusionné et d’autres se sont accrochées à un nouveau groupe.

Le 100% santé, réforme phare d’Emmanuel Macron

La réforme majeure du quinquennat est celle du 100% santé ou réforme dite du reste à charge zéro. Portée par la ministre des Solidarités et de la Santé Agnès Buzyn, elle est entrée en vigueur progressivement, de 2018 à 2021. Les personnes couvertes par un contrat de complémentaire santé responsable ont désormais accès à certaines lunettes, prothèses dentaires et aides auditives sans reste à charge.

L’objectif de la réforme était de réduire le renoncement aux soins pour des raisons financières. Le 100% santé a notamment bénéficié aux personnes ayant une complémentaire santé d’entrée de gamme. La part des équipements du panier 100% santé atteint 37,9% en audio, 56,6% en dentaire et 16,8% en optique. La réforme a donc eu un impact contrasté. En optique, le reste à charge moyen a même augmenté, selon une étude de l’Unocam.

L’impact de cette réforme sur le niveau de cotisations des contrats santé reste un sujet épineux car le gouvernement n’accepte pas d’imputer la hausse des tarifs à la réforme. Le ministère n’a pas cessé de demander aux complémentaires de contenir leurs cotisations.

Les mutuelles se désintéressent de la complémentaire santé solidaire

Autre réforme de simplification importante, la fusion de deux dispositifs d’assurance santé réservés aux foyers modestes : l’aide au paiement d’une complémentaire santé (ACS) et la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C). Le nouveau dispositif renommé “complémentaire santé solidaire” peut être payant ou pas, en fonction du niveau de ressources. Les organismes complémentaires, auparavant assureurs de l’offre ACS, sont désormais opérateurs de gestion de la C2S.

Malgré la prise en charge des prestations aux frais réels, les ocam dénoncent un niveau de frais de gestion insuffisant. La liste d’opérateurs souhaitant distribuer cette complémentaire solidaire se réduit tous les ans, tout comme le nombre de bénéficiaires gérés par les ocam. En effet, depuis sa création en novembre 2019, les caisses primaires d’assurance maladie distribuent également la complémentaire santé solidaire et prennent une part de plus en plus importante dans le dispositif.

La RIA en santé, la réforme que le secteur n’avait pas demandé

La résiliation infra-annuelle des contrats de complémentaire santé est entrée en vigueur en 2020. Cette mesure ne faisait pas partie du programme électoral d’Emmanuel Macron. Pourtant, c’est le président sortant qui l’a mise sur la table lors d’une rencontre avec les représentants des organismes complémentaires en décembre 2019. En pleine crise des gilets jaunes, le président n’avait pas apprécié que la Mutuelle Centrale des Finances (MCF) justifie une hausse de cotisations en raison de l’entrée en vigueur du 100% santé.

Coup d’envoi de la PSC des fonctionnaires

En fin de mandat, la ministre de la transformation et de la fonction publiques Amélie de Montchalin a lancé un chantier important qui occupera les organismes complémentaires jusqu’en 2026. L’objectif est de proposer une couverture santé aux agents de la fonction publique, prise en charge par l’employeur public à hauteur de 50%.

A terme, cette réforme doit permettre d’aligner la protection sociale des fonctionnaires avec celle des salariés du secteur privé. Pour les organismes complémentaires, cette réforme pourrait rebattre les cartes sur ce marché et favoriser les alliances.

En assurance emprunteur, la RIA enfin !

En assurance emprunteur, la Loi Lemoine introduit la résiliation infra-annuelle sur les assurances de prêt. C’est une victoire pour le secteur de l’assurance qui avait milité pour la RIA depuis des années, afin de favoriser la concurrence sur ce marché fortement dominé par les bancassureurs.

La Loi Lemoine introduit d’autres changements importants. Elle renforce le loi à l’oubli pour les pathologies cancéreuses et l’hépatite C virale qui passent à 5 ans. Elle acte également la fin du questionnaire médical pour les prêts avec un encours de crédit cumulé inférieur à 200.000 euros qui arrivent à échéance avant le 60ème anniversaire de l’emprunteur.

Les courtiers poussés à l’auto-régulation

Initiée durant l’été 2018, la réforme du courtage est entrée en vigueur au 1er avril 2022 avec l’obligation pour les courtiers d’adhérer à l’une des sept associations d’autorégulation agréées par l’ACPR pour exercer sur le marché. Initialement prévu au 1er janvier 2020, censuré par le Conseil Constitutionnel puis retardé par la crise sanitaire, le dispositif aura mis près de trois ans à voir le jour, au prix de discussions houleuses et de rebondissements à répétition (comme nous le résumons dans cette vidéo).

Encadrement du démarchage téléphonique

La question du démarchage téléphonique a beaucoup occupé les parlementaires durant cette mandature. Au-delà des nombreuses initiatives parlementaires sur le sujet, le CCSF a rendu en 2019 un avis venant préciser l’encadrement des pratiques, notamment autour de l’information précontractuelle et l’envoi de SMS pour consentement ou signature.

En avril 2021, la loi relative à la réforme du courtage (voir chapitre 7) contenait elle aussi une partie visant à encadrer le démarchage téléphonique. Le décret d’application de cette loi est ainsi venu préciser de nouveaux points : enregistrement et conservation de conversations téléphoniques, différence entre leads chauds et leads froids, réception et signature des documents précontractuels… Les nouveaux contours du démarchage téléphoniques (à retrouver dans notre Plan Séquence dédié) sont entrés en vigueur au 1er avril dernier.

Réforme du régime des catastrophes naturelles

Longtemps attendue, la réforme du régime des catastrophes naturelles est enfin arrivée dans les dernières semaines du quinquennat. Certains n’y voient toutefois qu’une "réformette", loin des enjeux pour le régime, notamment sur le risque sécheresse. Reste que la loi a été définitivement adoptée le 14 décembre. Parmi les mesures phares figurent la prise en charge des frais de relogement automatique, ou encore l’encadrement des délais d’indemnisation.

Le texte instaure plus de transparence dans les décisions prises par la commission interministérielle. La mise en œuvre de la réforme est désormais suspendue à la publication des décrets.

Réforme de l’assurance agricole

En avril 2021, la “ferme France” est décimée par un épisode de gel tardif. L’Etat est obligé de débloquer une enveloppe d’urgence pour soutenir les agriculteurs. Ce sera le déclic pour lancer la réforme de l’assurance agricole dont les contours sont esquissés par Emmanuel Macron devant les jeunes agriculteurs au mois de septembre.

Le texte adopté par le Parlement le 25 février dernier acte la mise en place d’un système à 3 étages : une forme d’autoassurance complétée par la couverture assurantielle avec la création d’un pool et enfin la garantie de l’Etat. La prime d’assurance devrait être subventionnée à hauteur de 65% par l’Etat.

Cette réforme doit entrer en application le 1er janvier 2023. D’ici là, les pouvoirs publics devront publier les décrets d’application. La partie financement du régime est quant à ele renvoyée au projet de loi de finances 2023.

L’épargne retraite pour tous, et surtout pour les entreprises !

Entré en vigueur en mai 2019, le Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises, dit loi Pacte, a permis de redessiner le paysage de l’épargne retraite française. Destiné à renforcer le financement des entreprises, Bercy lance quelques mois plus tard le PER afin de rediriger l’épargne des Français vers elles. Un produit simplifié, distribué par les banquiers et assureurs sur un marché jusqu’ici difficile à appréhender.

Portabilité des droits, extension de la sortie en capital, sortie du contrat plus flexible, cadre fiscal avantageux, le produit a (presque) tout pour plaire. Seul bémol, le niveau des frais jugé « excessif » par le ministre de l’Économie, de la Relance et de la Finance. Pour autant, un peu plus de deux ans après sa sortie, 4,5 millions d’épargnants ont versé près de 50Mds d’euros vers ce produit.

Mathilde Castagna, Florian Delambily, Thierry Gouby et Mariona Vivar

Retrouvez ici notre deuxième article sur le bilan du quinquennat sur les réformes manquées.

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