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Maurice Ronat (Unocam) : "Les dépenses de santé doivent être plus encadrées"

mardi 3 janvier 2017
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Maurice Ronat, Président de l’Unocam (Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire), entité regroupant les trois familles d’assureurs complémentaires, fait le point sur la révision des conventions médicale et dentaire. Sous certaines conditions, les complémentaires santé sont prêtes à s’impliquer davantage dans le financement des soins.

News Assurances Pro : Quel sera l’impact de la nouvelle convention médicale pour les complémentaires santé ?

Maurice Ronat : Elle aura pour conséquence d’augmenter d’environ 315 M€ le financement des actes et des soins médicaux par les complémentaires santé, ce qui représente un peu plus d’un point de hausse sur les cotisations des adhérents. Via le forfait médecin traitant, un praticien percevra en moyenne et selon son activité de 15.000 à 18.000 euros par an. Ce montant sera financé par les complémentaires santé à hauteur de 40 % environ et le reste par la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam). Les médecins n’ont pas la possibilité de se rendre compte d’où viennent ces fonds. C’est pourquoi, avec la Caisse nationale d’assurance maladie et la Direction de la Sécurité sociale, nous réfléchissons actuellement à un système qui leur permettrait d’identifier la provenance de ces recettes sans générer de complexité. La Cnil a donné son autorisation pour qu’un tiers de confiance intervienne entre les complémentaires santé d’une part et les médecins d’autre part. Nous souhaitons également que nos adhérents puissent identifier le versement que nous faisons pour leur compte à leur médecin. Si une solution est trouvée, les complémentaires santé signeront l’avenant conventionnel.

NAP : Où en sont les négociations à propos de la convention dentaire ?

MR : Toutes les parties s’accordent à reconnaître que les soins conservateurs sont sous-évalués. C’est pourquoi les dentistes se réservent des marges sur les prothèses. Pour les bénéficiaires de la CMU-C, les tarifs dentaires sont bloqués. En revanche, Marisol Touraine a constaté que ceux qui perçoivent l’Aide à l’Acquisition de la complémentaire santé (ACS) ont plutôt tendance à souscrire les garanties de niveaux moyen ou supérieur. Est donc apparue l’idée de mettre en place des tarifs normés à la fois pour l’ACS et la CMU-C. Cela impliquerait un surcoût de 52 M€ pour les complémentaires. Selon la Fédération des Syndicats dentaires libéraux (FSDL), les complémentaires santé estimeraient ce montant trop élevé et refuseraient de le prendre en charge. Je m’élève contre cette information car elle est fausse : soit le forfait de la CMU-C serait augmenté et ce sont les complémentaires santé qui assumeraient cette hausse via la taxe CMU-C sur les contrats, soit le forfait de la CMU-C demeurerait identique et, dans ce cas, les mutuelles assumeraient ces coûts directement.

NAP : Sur quelles bases les soins dentaires seraient-ils revalorisés ?

MR : A ce stade, la Sécurité sociale est prête à mettre 540 M€ sur la table pour la revalorisation des soins dentaires et les complémentaires santé prendraient en charge 160 M€. Les discussions sont en cours et ce montant pourrait être revu et se mettre en place sur une période de quatre ans au lieu des trois années évoquées initialement. Le but est de diminuer le recours aux prothèses en agissant en amont via les soins conservateurs. Il nous paraît essentiel de concourir à l’amélioration des soins, même si cela implique une hausse du financement par les complémentaires santé. Concernant l’encadrement du prix des prothèses, une étude va être réalisée par la Caisse nationale d’Assurance Maladie car les dentistes accepteraient l’encadrement du prix de certaines prothèses mais souhaitent conserver la liberté de tarifer pour d’autres prothèses. Se pose aussi la question de fixer une tarification différente en fonction des zones géographiques. Si un encadrement du prix des prothèses n’est pas établi et si le reste-à-charge des assurés ne baisse pas, les complémentaires santé ne seront pas disposées à augmenter leur participation.

NAP : Que penser des idées de François Fillon, candidat à l’élection présidentielle, à l’égard du financement de la santé ?

MR : François Fillon aura au moins eu le mérite d’amener sur le devant de la scène le sujet du financement de la santé. Neuf à dix millions de Français ont un niveau de vie proche du seuil de pauvreté. Comment organiser le financement de la santé sans qu’il y ait d’exclusions ? Les cotisations des complémentaires santé augmentent plus rapidement que les salaires et les assurés en viennent à diminuer leurs garanties. Ce n’est pas satisfaisant. Pour contrer ce phénomène, il est indispensable que les dépenses de santé soient plus encadrées.

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