Retraite : La fiscalité du PEPP toujours dans le flou
Pensé au niveau européen, le nouveau produit d’épargne retraite PEPP doit encore définir son cadre fiscal au niveau national. Une étape importante pour le succès du produit qui pourrait tendre à concurrencer le PER.
A peine sur le marché, le PEPP fait déjà parler de lui. Depuis le 22 mars 2022, chaque état membre de l'Union européenne peut labelliser un produit d'épargne retraite PEPP (Pan-european Personal Pension Product). La Commission européenne tente ainsi de centraliser l’effort d’épargne du Vieux continent et faciliter la mobilité des travailleurs entre les territoires.
Mille et une faces
Ce nouveau produit peut prendre la forme d’un contrat d’assurance vie ou d’assurance retraite quand c’est un organisme d’assurance qui le propose, ou bien alors d’un compte titres, quand il est poussé par un prestataire de services d’investissement. « Conformément au partage des responsabilités existant en France, l’ACPR a vocation à être en charge des PEPP assurance vie et PER. L’AMF devrait être désignée pour les autres produits », confie un proche du dossier.
L’exception qui confirme la règle
Les modalités d’investissement, les obligations d’informations pré-contractuelles, de transparence et le niveau de frais plafonné à 1% sont des caractéristiques communes appliquées à tous les états membres. En revanche, la définition du régime fiscal reste un sujet sur lequel débattre au niveau national. « Les règles fiscales sont clairement la pièce manquante pour que le PEPP prenne tout son essor. Pour que le lancement de ce nouveau produit sur le marché soit effectif, le minimum c’est d’enclencher la mise à jour des textes fiscaux. Sans cela, les souscripteurs potentiels n’ont aucune visibilité sur l’avantage fiscal dont ils peuvent bénéficier. Or, ce point est crucial pour mesurer leur intérêt à investir dans ce dispositif, plutôt qu’un autre », explique Nelly Jean-Marie, avocate associée chez Avanty.
« À ce stade, l’ACPR n’a pas reçu de marque d’intérêt pour créer un PEPP de la part des organismes d’assurance », avance un observateur. L’absence de cadre fiscal pourrait expliquer ce manque d'intérêt. « Les acteurs ont d’ores et déjà effectué un effort considérable afin de déployer le plan d’épargne retraite conformément à la loi Pacte il y a moins de 3 ans. Bon nombre sont encore pleinement investis dans un processus de mise en place et de transformation des contrats préexistants, explique Nelly Jean-Marie. On peut comprendre qu’ils ne soient pas pressés de se lancer dans un nouveau chantier, et encore plus avec cette inconnue majeure dans l’équation ».
Pour autant, l’avocate alerte sur le sujet. « La législation fiscale relève, certes, de la compétence exclusive de chaque Etat membre, mais il ne faudrait pas que ces derniers prévoient trop de spécificités en l’occurrence. Cela irait à l’encontre de l’harmonisation souhaitée au niveau européen ».
Plusieurs pistes envisagées
L’une des caractéristiques du nouveau produit paneuropéeen pourrait bien donner une piste aux états membres dans leur réflexion fiscale. La structure du produit prévoit des sous-comptes nationaux permettant d’identifier et de tracer d’où viennent les efforts d’épargne au sein des contrats. « Nous pouvons imaginer qu’une somme déposée sur un PEPP via le sous-compte national français dépendra alors de de la législation française et notamment des règles fiscales françaises. Il en va de même si l'épargnant épargne un montant issu du canal allemand par exemple, alors cette somme se pliera aux exigences fiscales allemandes », explique Nelly Jean-Marie.
Dans ce contexte, il est par ailleurs intéressant de s'interroger sur une possible concurrence du PEPP face au PER. « A l’avenir, pour que le PEPP soit attractif, il faudrait au minimum aligner les règles fiscales entre le PER et le PEPP, voire proposer des mesures plus favorables, explique l’avocate associée chez Avanty. On imagine que le Code général des impôts sera logiquement adapté en ce sens, comme cela a déjà été fait auparavant pour le PER en 2019 ».
Face à autant d’incertitudes, le sujet devrait retomber dans les mains de l’exécutif afin de définir les mesures nationales d’adaptation. Elles devraient intervenir dans les prochains mois, selon Bercy.
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